Indigofera suffruticosa

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Indigofera suffruticosa, indigotier[1] ou indigo bâtard (digo bata aux Antilles françaises) est un arbrisseau de la famille des Fabacées, originaire d'Amérique tropicale. Tout comme l'espèce apparentée, l'indigo des teinturiers (Indigofera tinctoria), ses feuilles sont utilisées pour la préparation de la teinture d'indigo.

Étymologie[modifier | modifier le code]

Le terme d'indigo remonte à l'Antiquité gréco-latine où Pline signalait que le pigment coloré pourpre, « indicum...vient d'Inde » (H.N. livre XXXV, 46).

Le botaniste britannique Philip Miller a décrit cet arbuste en 1768, dans The Gardeners Dictionary, sous le nom de Indigofera suffruticosa. Il le caractérise par ses fruits velus et arqués[2].

Son nom générique Indigofera s'analyse en indigo dérivant du grec indikon (ινδικόν) et du latin indicum et signifiant « de l'Inde » (faisant allusion au pays d'où les Gréco-romains importaient un pigment bleu-indigo) et de fera « porter ». L'épithète spécifique suffruticosa vient du latin sub- (suf-) « sous » et fruticosus (frutex arbrisseau) « plein de rejetons, arbrisseau ». (Gaffiot[3]).

Description[modifier | modifier le code]

Racème axillaire

Aspect général[modifier | modifier le code]

Indigofera suffruticosa est un arbrisseau érigé de 1 à 1,5 m de haut[4]. Les jeunes rameaux sont couverts d'une pubescence blanchâtre, formée de poils apprimés. Les poils sont plus denses et moins fins que ceux d'Indigofera tinctoria.

Feuille[modifier | modifier le code]

La feuille imparipennée est formée de 9 à 17 folioles, elliptiques ou obovales, opposées, de 15-25 x 8-10 mm, à apex arrondi à subaigu, mucroné. Le limbe est pubescent sur les deux côtés, en raison de la présence de poils apprimés. Les stipules sont petites (2,5 à 3 mm) et subulées.

Indigofera suffruticosa et ses gousses arquées (falciformes) brun-rouge, caractéristiques

Fleurs[modifier | modifier le code]

Les racèmes sessiles, de 2 à 4,5 cm de haut, sont axillaires (ils émergent aux aisselles des feuilles). Les fleurs nombreuses et serrées, sont bisexuées et zygomorphes. Chacune comporte un calice pubescent, de 1,5 à 2 mm, à lobes triangulaires, une corolle de 3,5 à 5 mm, blanche ou jaunâtre, panachée de pourpre ou d'orangé, 10 étamines et un ovaire supère.

La floraison se déroule en mai-juin puis en octobre-janvier, aux Antilles.

Fruits[modifier | modifier le code]

Le fruit est une gousse très nettement falciforme, de 10-15 mm x 2 mm, finement pubescente ou glabre, brune. La gousse est deux fois plus petite que celle de I. tinctoria (qui est de 25 à 30 mm de long) et de couleur brun-rouge. Les graines au nombre de 3 à 7 par gousse, sont cylindriques ou un peu angulées.

Distribution[modifier | modifier le code]

Indigofera suffruticosa est originaire d'Amérique tropicale[5] (du sud des États-Unis à l'Amérique du Sud). Il est probablement indigène aux Petites Antilles[4] comme dans toutes les Caraïbes.

Il a été introduit dans l'Ancien Monde où il a été cultivé dans quelques régions tropicales. Introduit en Chine, il s'y est naturalisé dans les provinces du sud[6].

Aux Antilles, il est présent sur le littoral, dans les friches ou les décombres, souvent en société avec Indigofera tinctoria.

Il fut cultivé pour extraire de ses feuilles la teinture d'indigo, en Amérique tropicale et en Asie tropicale et subtropicale[6].

Il a été introduit en 1860 en Nouvelle-Calédonie[7].

Caractère envahissant[modifier | modifier le code]

En Nouvelle-Calédonie, l'espèce est considérée envahissante[7].

Utilisations[modifier | modifier le code]

Teinture[modifier | modifier le code]

indoxyle + indoxyle → indigotine

Trois espèces étroitement apparentées sont utilisées pour la production d'indigo[8] : Indigofera tinctoria, Indigofera arrecta et Indigofera suffruticosa. Il a été trouvé des espèces intermédiaires entre ces trois espèces qui peuvent être d'origine hybride.

L'indigo bâtard est comme l'indigo des teinturiers, la source de l'indigo naturel. Celui-ci n'est pas directement présent dans la plante mais existe sous forme d'un précurseur, l'indican (indoxyle β-D-glucoside). Lors du traitement de la plante dans une série de bassins, l'indican est d'abord hydrolysé en indoxyle puis celui-ci est oxydé en un pigment coloré nommé indigotine (ou aussi indigo, au risque de confusion).

Indigofera suffruticosa peut être cultivé dans les régions semi-arides et sur des sols peu fertiles. Originaire d'Amérique tropicale, il est maintenant localement cultivé ailleurs dans les tropiques, notamment en Afrique (mais pas en Afrique de l'Est) et à Madagascar[8].

Les Mayas mêlaient de l'indigo avec une argile spéciale (la palygorskite) pour produire le bleu maya, utilisé pour décorer les poteries, les statues, les fresques murales et les textiles[9]. La teinture indigo était probablement tirée de l'indigo bâtard (Indigofera suffruticosa). L'analyse du contenu d'une poterie trouvée dans un gouffre au Yucatan (dans le Cénote Sacré à Chichén Itzá) a montré qu'outre l'indigo et la palygorskite, le colorant contenait du copal, une résine d'arbre utilisée comme encens. Il semble que ce soit la combinaison de ces trois éléments qui soit responsable de la grande stabilité du bleu maya. Le pigment bleu était fabriqué en brûlant de l'encens, lors d'un rituel dédié au dieu de la pluie, Chaak. Pour attirer les pluies, les prêtes organisaient des cérémonies au cours desquelles des objets et des humains sacrifiés étaient peints en bleu (la couleur de Chaak) et jetés dans le cénote.

La culture et l'extraction de la teinture d'indigo à partir d'Indigofera suffruticosa est semblable à celles de l'indigo des teinturiers. Pour une description détaillée, se reporter à l'entrée Indigofera tinctoria. Indigofera suffruticosa est principalement cultivé en Amérique Centrale et du Sud[10] où il est en général propagé par des boutures de 30 cm de long. Une étude[11] portant sur une culture de I. suffruticosa à Veracruz au Mexique, a indiqué une production d'indigo de l'ordre de 1 % du poids sec des feuilles, 150 jours après les semis, à la date pour obtenir la production maximum.

Usage médicinal[modifier | modifier le code]

Les Aztèques utilisaient ses graines pour traiter les problèmes urinaires et les ulcères. Au Mexique, les feuilles étaient appliquées sur le front des enfants fiévreux et les graines réduites en poudre servaient à traiter les ulcères[12]. Indigofera suffruticosa croît au nord-est du Brésil où il est traditionnellement utilisé par les populations pour le traitement des inflammations et les épilepsies[13].

En 2006, une étude pharmacologique[13] a montré que l'extrait aqueux des feuilles d'Indigofera suffruticosa possédait une bonne activité antimicrobienne (contre Staphylococcus aureus ). Une autre étude récente, de 2013, a montré que les extraits méthanoliques de la plante possédaient d'excellents effets anticonvulsivants[14].

Synonymes[modifier | modifier le code]

The Plant List répertorie les synonymes suivants[15] (avec un degré de confiance élevé) :

  • Indigofera angolensis D.Dietr.
  • Indigofera anil L.
  • Indigofera comezuelo DC.
  • Indigofera divaricata Jacq.
  • Indigofera drepanocarpa Bergman
  • Indigofera guatimala Lunan
  • Indigofera micrantha Desv.
  • Indigofera oligophylla Lam.
  • Indigofera tinctoria Mill.
  • Indigofera uncinata G.Don

Références[modifier | modifier le code]

  1. Bernard Suprin, Mille et une plantes en Nouvelle-Calédonie, Nouméa, Editions Photosynthèse, , 382 p. (ISBN 978-2-9527316-3-8), p. 287
  2. « BHLfr »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) (consulté le )
    « BHLen »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) (consulté le )
  3. Gaffiot
  4. a et b Jacques Fournet, Flore illustrée des phanérogames de Guadeloupe et de Martinique, Gondwana éditions, Cirad,
    Tome 1 (ISBN 2-87614-489-1) ; Tome 2 (ISBN 2-87614-492-1).
  5. (en) Référence GRIN : espèce Indigofera suffruticosa
  6. a et b (en) Référence Flora of China : Indigofera suffruticosa
  7. a et b Vanessa Hequet, Mickaël Le Corre, Frédéric Rigault, Vincent Blanfort, Les espèces exotiques envahissantes de Nouvelle-Calédonie, IRD, Institut de Recherche pour le Développement, , 87 p. (lire en ligne), p. 17, p. 47
  8. a et b (en) Paulos Cornelis Maria Jansen, Prota, Colorants et tanins, PROTA, , 237 p. (ISBN 978-90-5782-163-9)
  9. Dean Arnold, « The First Direct Evidence for the Production of Maya Blue: Rediscovery of a Technology » (consulté le )
  10. (en) Thomas Bechtold, Handbook of Natural Colorants, John Wiley & Sons, , 434 p. (ISBN 978-0-470-74496-3, lire en ligne)
  11. F. Sandoval-Salas, « Effect of harvest time on dye production in Indigofera suffruticosa Mill. », Agrociencia (Montecillo), vol. 40, no 5,‎ , p. 585–591 (ISSN 1405-3195, lire en ligne, consulté le )
  12. Australia
  13. a et b Sonia Pereira Leite, « Antimicrobial Activity of Indigofera suffruticosa », Evidence-based Complementary and Alternative Medicine, vol. 3, no 2,‎ , p. 261–265 (ISSN 1741-427X, PMID 16786057, PMCID PMC1475935, DOI 10.1093/ecam/nel010, lire en ligne, consulté le )
  14. de Almeida, E. R., Chaves, T. M., de Almeida Luna, R. L., da Silva, A. R., Aragão-Neto, A. C., da Silva, L. L. S., & Couto, G. B. L. (2013). « Anticonvulsant effect of Indigofera suffruticosa Mill: Indication of involvement of the GABAergic system ». African Journal of Pharmacy and Pharmacology, 7(11), 622-628.
  15. Plant List

Liens externes[modifier | modifier le code]