Ibn Sab'în

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Ibn Sab'în
Biographie
Naissance
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Valle de Ricote (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Décès
Activité
Œuvres principales
Réponses aux questions du Roi de Sicile et du Saint-Empire Germanique (d)Voir et modifier les données sur Wikidata

Ibn Sab'în, (Muḥammad Ibn Abd-al-Ḥaqq Ibn Sab’in ; arabe : محمد بن عبد الحق بن سبعين), né à Murcie en al-Andalus (actuelle Espagne) en 1216 ou 1217 et mort à La Mecque vers 1270, est l'un des éminents philosophes et mystiques soufis de l'Andalousie du XIIIe siècle.

Biographie[modifier | modifier le code]

Sa vie est marquée par plusieurs controverses, et il dû faire face à des persécutions, étant souvent incompris de ses contemporains[1],[2].

Il acquiert une bonne formation dans les sciences coraniques, la philosophie islamique , la théologie musulmane et le droit musulman. Plus tard il est aussi initié à la mystique. On le trouve ensuite à Ceuta, dans une zawiya, entouré de quelques disciples. D'abord en bonne relation avec le gouverneur de la ville, il est bientôt accusé d'hétérodoxie et doit quitter Ceuta[1].

Il se rend alors à Bougie, où le grand mystique al-Shustarī devient son disciple[3]. Après quoi, il gagne Tunis, où il fait à nouveau face à des accusations. Il s'en va alors en Égypte, puis à la Mecque. Il soigne le chérif de la Mecque, qui avait une fracture du crâne. Il ne quittera plus cette ville où il a trouvé la paix, et c'est là qu'il meurt vers 1270[1]. Toutefois, selon des traditions qui le concernent, il se serait ouvert les veines, par désir de ne plus reporter la vision de Dieu[3], une « légende aussi malveillante que fantaisiste », selon Michel Chodkiewicz qui, à la suite de P. Spallino rejette cette affirmation[4].

Pensée[modifier | modifier le code]

Ibn Sab'in est d'abord influencé par Aristote et Plotin[1],[3], et dans son Kitāb budd al-‘arif, il a réuni les connaissances qu'il avait héritées de la tradition grecque. Si le livre n'est pas très original sur le plan philosophique, il constitue un document de grande valeur[1].

Par la suite, c'est vraisemblablement l'influence d'Ibn Arabi qui l'amène à un monisme faisant de Dieu la forme (c'est-à-dire la cause formelle) de toute chose[3]. Il va alors développer une théorie philosophico-spirituelle de l'union à Dieu[3]. Ibn Sab'in réduit l'existence à l'unité absolue (wahda mutlaqa) de l'être (wahdat al-wujud). Selon lui, Dieu seul existe, tout le reste n'ayant qu'une existence aussi chimérique, comme l'ombre d'une personne. Il n'y donc qu'une unité dans laquelle est contenue la multiplicité, celle-ci étant la fabrication de l'imagination humaine.

Mêlant les apports grecs et musulmans, il fonde une école doctrinale dans laquelle soufisme et philosophie hellénistique se côtoient, et dont la lignée initiatique (silsila) remonte à des cheikhs andalous, mais aussi à Hermès, Platon et Aristote. Cette voie soufie prône le détachement et la vie errante, et elle prendra, en Égypte, le nom de tariqa sab'îniyya[2].

Les Questions siciliennes[modifier | modifier le code]

Si l'on a pu douter de l'attribution à Ibn Sab'in[3] des Questions siciliennes (« Al-Masâ’il al-Siqilliyya »), ce n'est plus le cas. Ce livre est constitué des réponses données par Ibn Sabîn à quatre de questions posées par l'empereur Frédéric II de Hohenstaufen (1194-1250), et qui avaient été transmises à Ibn Sab'in par l’intermédiaire du monarque almohade al-Rashid ‘Abd al-Wâhid (r. 1232-1242)[5].

Les questions de l'empereur portaient sur les sujets suivants: 1) l'éternité du monde; 2) la science divine; 3) les catégories; 4) l'âme[4]. À ces questions, on ajoute parfois une cinquième[Note 1] à propos de l'interprétation du hadith « « Le cœur du croyant est entre les deux doigts du Miséricordieux ». Mais Michel Chodkiewicz rejette cette lecture, arguant qu'il s'agit en réalité d'un long excursus de plus de quinze pages qu'Ibn Sab'in fait sur ce thème qu'il considère comme un aspect subsidiaire de la question de l'âme (traitée à la question quatre)[4].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. C'est le cas de P. Spallino, 2002 (v. Bibliographie), ainsi que, par exemple, d'Alain de Libera, Penser au Moyen Âge, Paris, Seuil, 1991, p. 171-172.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d et e Roger Arnaldez, « IBN SAB‘IN (1216-env. 1270) », sur universalis.fr (consulté le )
  2. a et b Éric Geoffroy, « L'apparition des voies: les khirqa primitives » in Alexandre Popovic (Dir.) et Gilles Veinstein (Dir.), Les Voies d'Allah. Les ordres mystiques dans le monde musulman des origines à aujourd'hui, Paris, Fayard, , 711 p. (ISBN 978-2-213-59449-1), p. 54
  3. a b c d e et f Georges Chehata Anawati et Louis Gardet, Mystique musulmane, Paris, Vrin, , 310 p., p. 65; 70
  4. a b et c Michel Chodkiewicz, « Revue des livres: Patrizia Spallino Le questioni siciliane de Ibn Sabʿīn, Palerme, 2002 », Studia Islamica, no 96 « Écriture, Calligraphie et Peinture »,‎ , p. 135-137 (lire en ligne)
  5. Fabrizio Speziale, « Le questioni siciliane. Federico II e l’universo filosofico. Introduzione, traduzione e note a cura di Patrizia Spallino, Officina di Sudi Medievali, Palermo, 2002, 354 p. » (Compte-rendu). Abstracta iranica, 2006 vol. 27 [lire en ligne (page consultée le 18 février 2023)]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Traductions[modifier | modifier le code]

  • (it) Ibn Sab'in (Introduction, traduction et notes de Patrizia Spallino), Ibn Sabʿīn, Le questioni siciliane. Federico II e l’universo filosofico, Palerme, Officina di Studi Medievali, , XIII-354 p. (ISBN 978-8-888-61542-4, présentation en ligne)

Études[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]