Hugues de Die

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Hugues de Die
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Hugues de Die, aussi connu sous le nom de Hugues de Bourgogne ou Hugues de Romans (né vers 1040- mort à Suze en Piémont le ) est un homme d'Église qui fut évêque de Die (Drôme) puis, à partir de 1082 archevêque de Lyon, Primat des Gaules.

Nommé légat du pape par Grégoire VII en 1075, il est l'un des principaux artisans de la réforme grégorienne en Bourgogne et en Francie.

Évêque de Die[modifier | modifier le code]

Son origine n'est pas certaine : il semble être natif de Romans, ou du moins du diocèse de Vienne. Présenté aussi comme un neveu des ducs de Bourgogne Hugues Ier et d'Eudes Ier, il est vraisemblablement le frère de Guigues, abbé de l'Île Barbe, et l'oncle de Hugues, qui sera en 1104 prieur clunisien de Saint-Marcel-les-Chalon[1],[2],.

Il devient « chamarier »[note 1] du chapitre cathédral de Lyon le , au moment où le légat Géraud, cardinal évêque d'Ostie, le substitue à Lancelin, évêque de Die, qu'il vient de déposer pour simonie[3]. Il est alors simple clerc. Il se rend à Rome se faire ordonner et consacrer évêque le deuxième dimanche de Carême 1074 par Grégoire VII ; il assiste au concile qui se tient en mars. C'est sans doute sur la route qu'en compagnie de Guinamand, archevêque d'Embrun, il consacre une chapelle des moines de Saint-Robert de Cornillon[4].

La confirmation de son investiture est réclamée par le pape à Henri de Bourgogne[5]. Grégoire VII écrit également à Guillaume, comte de Die, pour lui demander de réparer les dommages causés à l'église[6]. Enfin, il fait d'Hugues son vicaire chargé de récolter les versements des églises des Gaules au Saint-Siège[7].

Cette charge fait d'Hugues un représentant du pape dans diverses affaires en Bourgogne[8] ; c'est lui qui préside à l'installation de Guillaume, abbé de Saint-Chaffre[9], renforçant ainsi les liens entre cette abbaye bénédictine et le diocèse de Die.

Il semble qu'Hugues ne rejoigne que fin 1074 ou début 1075 son siège épiscopal, où ses ouailles ne lui font pas forte impression[10].

Légat du pape[modifier | modifier le code]

Il devient légat du Saint-Siège apostolique[11] du pape Grégoire VII de 1075 à 1085 puis des papes Urbain II de 1090 à 1099 et de Pascal II jusqu'à sa mort en 1106. Cette légature est pour lui l'occasion de poursuivre de manière acharnée les évêques simoniaques contre lesquels Rome s'oppose.

Réforme Grégorienne[modifier | modifier le code]

Lors du concile romain réuni en (quand est publié par ailleurs le décret contre les investitures laïques), le pape le nomme légat pour la Francie et la Bourgogne.

Il applique ainsi les préceptes réformateurs du pape vigoureusement et à plusieurs niveaux :

  • Au plan local, il s'efforce de faire régler dîmes et prémices, et pour améliorer la qualité du clergé, soutient le développement des chanoines réguliers.
  • Au plan du haut clergé, il réunit une série de conciles régionaux où il diffuse les décrets grégoriens et lutte de façon intransigeante contre l'investiture laïque. Des évêques sont déposés (à Clermont, à Tours) ou leur élection est cassée (à Chartres, à Chalon-sur-Saône). Les archevêques de Sens et Bourges sont momentanément suspendus en 1078, et Hugues s'efforce d'obtenir la déposition de l'archevêque de Reims Manassès de Gournay (effective en 1080) [note 2].

Liste des conciles régionaux présidés par le légat[modifier | modifier le code]

Son action est parallèle à celle de l'autre grand légat grégorien dans l'ouest de la France, Amat d'Oloron.

À travers son action souvent jugée radicale, Hugues cherche, comme Grégoire VII, à redéfinir la place de l'Église dans la société médiévale en luttant pour son indépendance vis-à-vis des puissances temporelles. Le roi de France, l'archevêque de Reims et le duc d'Aquitaine ont parfois entravé son action. Engagé dans une longue lutte contre l'empereur Henri IV, Grégoire VII qui devait les ménager pour ne pas ouvrir un « second front », a ainsi tempéré l'action de son légat de 1077 à 1080, en lui adjoignant en particulier comme légat Hugues de Semur, abbé de Cluny.

Archevêque de Lyon[modifier | modifier le code]

Après la mort, le , de Gébuin (Jubin), archevêque de Lyon et primat des Gaules, le siège de Lyon demeure vacant pendant quelque temps. Le , Hugues de Die est nommé par le pape comme son successeur, mais ce n'est qu'au début de 1083 (le ou le 1er février) que Hugues de Die prend possession du siège de Lyon[15] qu'il occupera jusqu'à sa mort en 1106.

Il s'efforce de faire correspondre cette primatie nouvelle à des pouvoirs réels, dans une optique centralisatrice, contrairement au sens simplement honorifique que l'Église a finalement donné à la primatie lyonnaise.

En 1094[16], Il donne à l'abbaye de Cluny la capelle de Reorterio cum ecclesia sancti Pauli infra castri ipsius munitionem site (la chapelle de Riottier (Jassans-Riottier) avec l'église Saint-Paul, dans la forteresse de Riottier)[17].

Entre le et le , Hugues de Die effectue un pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle. Il y célèbre la messe le jour de la Pentecôte, le , et est de retour à Lyon trois jours avant la Saint-Jean[18]. C'est probablement à la suite de ce voyage qu'il fait don de l'église de Saint-Victor-sur-Loire à l'abbaye de Conques-en-Rouergue[19].

En 1096, il reçoit du comte Guillaume Ier de Forez l'église Saint-Julien de Moingt[20] qu'il remet à l'abbaye de la Chaise-Dieu.

En 1097, il autorise Robert de Molesme, Étienne Harding et cinq autres personnes à fonder un établissement ecclésiastique dans une recherche de retour à la pureté bénédictine. Cet établissement s'installe sur des terres donnée par le vicomte Renard de Beaune, au sud de Dijon, sur un lieu-dit nommé cistels et est le premier édifice de l'ordre cistercien.

Mais les moines le fondant ayant rompu pour venir ici leurs vœux de stabilité en quittant irrégulièrement leur ancienne communauté de Molesme, ils sont attaqués par leurs anciens compagnons qui leur demandent de revenir. Le pape Urbain II demande à l'archevêque de Lyon de régler le litige. Celui-ci réunit un synode à Port d'Anselle (près de Mâcon) en 1099 et ordonne à Robert de retourner à Molesme, interdit à chacun des autres moines de deux monastères d'aller dans l'autre et confirme la fondation de Citeaux[21].

Lutte entre le roi et le pape[modifier | modifier le code]

Il est pressenti pour devenir pape après la mort de Grégoire VII[22], et s'oppose à Didier, abbé du Mont-Cassin, qui est finalement élu sous le nom de Victor III. Au concile de Bénévent en , ce dernier l'excommunie de même que Richard, légat et abbé de Saint-Victor de Marseille,

Urbain II (1088-1099) le réhabilite et il retrouve ses pouvoirs de légat. Il va en particulier traiter de la question de l'adultère royal de Philippe Ier qui a enlevé Bertrade de Montfort, femme du Comte d'Anjou. En octobre 1094, c'est sous sa présidence que le concile d'Autun, réuni à sa demande, excommunie le roi de France, excommunication confirmée par le pape lui-même au concile de Clermont en 1095 ; l'interdit est jeté sur le royaume de 1096 à 1104.

En 1097, il accueille Anselme de Cantorbéry, archevêque en conflit avec le roi Guillaume II d'Angleterre[22].

En 1098, il aide à la fondation de l'abbaye de Citeaux en soutenant le déplacement des moines de Molesme vers Cîteaux[22].

Mal acceptée par le clergé de France soucieux de conserver son autonomie, l'autorité du primat (qui reposait sur les pouvoirs du légat) s'effondre avec l'élection du pape Pascal II en 1099, qui lui retire cette prérogative.

Infatigable voyageur, après un pèlerinage à Compostelle (1095), Hugues fait celui de Terre sainte (1101-1103). Il meurt le à Suze, sur la route du concile de Guastalla. Il est enterré dans la cathédrale San Giusto.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Le « chamarier » (auj. camérier) était l'un des huit grands dignitaires du chapitre cathédrale de Lyon. Chanoine, il supervisait la sécurité, la justice, la voirie et avait sous ses ordres douze agents de surveillance. C'est lui qui détenait les clefs des six portes de l'enceinte
  2. La personnalité de Manassès de Gournay est évoquée sur la page de Bruno le Chartreux, au paragraphe : « L'archevêque chassé ».

Références[modifier | modifier le code]

  1. Adolphe Vachet, Pierre Hector Coullié, Les anciens chanoines-comtes de Lyon, Lyon, impr. de E. Vitte, , 388 p. (lire en ligne), p. 152.
  2. Patrice Béghain op. cit., Dictionnaire historique de Lyon, Stéphane Bachès, 2009, p. 658 & "Un religieux bénédictin de l'Abbaye Saint-Bénigne de Dijon", Histoire Générale et particulière de Bourgogne..., Dijon, chez Antoine de Fay, 1739, t.I, p. 284.
  3. Jean Julg, Les évêques dans l'histoire de la France: des origines à nos jours, Éditions Pierre Téqui, 2004, p. 76 & Regeste Dauphinois, n° 2094 (confirmé par Rome en décembre : n° 2095).
  4. Regeste Dauphinois, n° 2101.
  5. Regeste Dauphinois, n° 2105 (15-16 mars 1074). Henri, roi de Bourgogne et de Germanie, fils d'Henri le Noir, ne sera empereur du Saint-Empire qu'en 1084.
  6. Regeste Dauphinois, n° 2106 (23 mars 1074).
  7. Regeste Dauphinois, n° 2107 (mars 1074).
  8. Regeste Dauphinois, n° 2109, 2112 & 2113 (1074-1075).
  9. Regeste Dauphinois, n° 2108 (1074).
  10. Regeste Dauphinois, n° 2125 (5 janvier 1075).
  11. Titre précisé par le Regeste Dauphinois, n° 2126 & 2136.
  12. Regeste Dauphinois, n° 2136 (1075).
  13. Regeste Dauphinois, n° 2137-2138.
  14. Regeste Dauphinois, n° 2141.
  15. Francois Villard, Primatie des Gaules et réforme grégorienne., Bibliothèque de l'école des chartes, 1991, no 149-2, p. 428
  16. André Bazzana, Guillemine David, Agnès Gonnet, Jean-Michel Poisson, Mottes castrales de Dombes (Ain) - Éléments pour un atlas, Lyon, Direction des Antiquités Historiques Rhône-Alpes, 1986, p. 44.
  17. Chartes de Cluny, V, no 3680
  18. Hugonis, Chronicon, MGH, SS, t. 8, p. 474.
  19. Aecclesia Sancti Fidei de Castello et Aecclesi Sancti Vitoris, 1097-1106 (Cart. de Conques, p. 362), n°502. Lire en ligne.
  20. La Mure (1675/1860), tome III, Preuves, 23, p. 20. Lire en ligne.
  21. Marcel Pacaut, Les ordres monastiques et religieux au Moyen âge, Paris, A. Colin, coll. « Fac. Histoire », , 256 p. (ISBN 2-200-34258-6, BNF 40005066), p. 141.
  22. a b et c Patrice Béghain, op. cit., p. 658

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Principales sources

Études

  • W. Luhe, Hugo von Die und Lyon, Breslau, 1898
  • Abbé Rony, "Hugues de Romans, légat pontifical", Revue des questions historiques, 107, 1927, p. 287-303. ID., "La politique française de Grégoire VII. Conflit entre le pape et son légat", Revue des questions historiques, 109, 1928, p. 5-34. ID., "La légation d'Hugues, archevêque de Lyon sous le pontificat d'Urbain II", Revue des questions historiques, 112, 1930, p. 124-147.
  • Theodor Schieffer, Die päpstlichen Legaten in Frankreich vom Vertrage von Meersen (870) bis zum Schisma von 1130, Berlin, 1935
  • Bernard Bligny, L'Église et les ordres religieux dans le royaume de Bourgogne, Grenoble, 1960.
  • Gilles Bollenot, Un légat pontifical au XIe siècle. Hugues, évêque de Die (1073-1082), primat des Gaules (1082-1106), thèse (Université de Lyon, Faculté de Droit et des Sciences économiques), 1973.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]