Hubert Selby, Jr.

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Hubert Selby, Jr.
Naissance
New York, État de New York, Drapeau des États-Unis États-Unis
Décès (à 75 ans)
Los Angeles, Californie, États-Unis
Activité principale
Auteur
Langue d’écriture Anglais américain

Œuvres principales

Hubert Selby, Jr., né le à New York et mort le (à 75 ans) à Los Angeles[1], est un écrivain américain.

Biographie[modifier | modifier le code]

Né à New York, dans l'arrondissement de Brooklyn en 1928, Selby quitte l'école à l'âge de 15 ans pour s'engager dans la marine marchande, où son père, orphelin, avait travaillé[2]. Atteint de la tuberculose à 18 ans, les médecins lui annoncent qu'il lui reste deux mois à vivre. Il est opéré, perd une partie de son poumon, et restera 4 ans à l'hôpital[1].

Lors de la décennie suivante, Selby, convalescent, est cloué au lit et fréquemment hospitalisé (1946-1950) à la suite de diverses infections du poumon. « C'est à l'hôpital que j'ai commencé à lire avant d'éprouver le besoin d'écrire. »[1] Incapable de suivre une vie normale à cause de ses problèmes de santé, Selby dira : « Je connais l'alphabet. Peut-être que je pourrais être écrivain. ». Grâce à sa première machine à écrire, il se lance frénétiquement dans l'écriture[3].

Son premier roman, Last Exit to Brooklyn, une collection d'histoires partageant un décor commun, Brooklyn, entraîna une forte controverse lorsqu'il fut publié en 1964. Allen Ginsberg prédit que l'ouvrage allait « exploser sur l'Amérique comme une bombe infernale qu'on lirait encore cent ans après. »[4] Il fut l'objet d'un procès pour obscénité en Angleterre, interdit de traduction en Italie, et interdit à la vente aux mineurs dans plusieurs états des États-Unis. Son éditeur, Grove Press, exploita cette controverse pour la campagne de promotion du livre, qui se vendit aux alentours de 750 000 exemplaires la première année. Il fut également traduit en douze langues. L'auteur le résume ainsi : « Quand j'ai publié Last Exit to Brooklyn, on m'a demandé de le décrire. Je n'avais pas réfléchi à la question et les mots qui me sont venus sont : "les horreurs d'une vie sans amour" . »[5] L'ouvrage est republié sous une nouvelle traduction française début 2014[4].

Son second ouvrage, La Geôle, publié en 1971, est un échec commercial, malgré les critiques positives, ce qui décourage l'auteur[1].

Selby connaît des problèmes d'alcool, et devient dépendant à l'héroïne, ce qui le conduira deux mois en prison et un mois à l'hôpital, et lui permettra de sortir de cette dépendance. Cependant, après cette cure, il tombera encore plus dans l'alcoolisme[1].

En 1976 sort son roman Le Démon, l'histoire de Harry White, jeune cadre New-yorkais en proie à ses obsessions. Cette histoire présente de grandes similitudes avec American Psycho, écrit quinze ans plus tard par Bret Easton Ellis.

Deux ans plus tard, il publie Retour à Brooklyn ((en) Requiem for a Dream), qui sera adapté plus de 20 ans plus tard au cinéma, en 2000, sous le même titre, par Darren Aronofsky, avec qui il écrira le scénario.

En 1986 sort son recueil de nouvelles Chanson de la Neige Silencieuse ((en) Songs of the Silent Snow), et en 1998 son roman Le Saule (The Willow Tree), plus apaisé : « Mes premiers livres avaient tous ce côté pathologique, il fallait parler du "problème" sous tous les angles possibles alors que, dans Le Saule, j'essaie de parler de la solution et des moyens d'y parvenir. »[5]. Enfin, en 2002, est publié Waiting Period, roman où le héros, contraint de reporter son suicide, reconsidère son projet.

Il a vécu à Manhattan, puis à Los Angeles, où il a enseigné à l'Université[3],[6]. Il a été marié trois fois et a eu quatre enfants, deux filles et deux garçons.

À la fin de sa vie, il confiait à l'un de ses amis " je peux tout juste taper une lettre sur ce putain d'ordinateur ". En effet, Selby avait acheté un ordinateur, dans le seul et unique but de remplacer sa " bonne vieille machine à écrire ".

Il est mort le à Los Angeles d'une maladie pulmonaire chronique, consécutive à la tuberculose contractée durant sa jeunesse. Il s'est éteint accompagné de ses proches : son ex-femme Suzanne, chez qui il se trouvait, les enfants de son premier mariage, et son chien[7].

Écriture[modifier | modifier le code]

Son écriture « est composée avec les nerfs »[6], très rythmée et très rapide, notamment du fait d'une syntaxe très abrupte et d'une ponctuation délibérément lacunaire, dans la continuité des expériences stylistiques de Faulkner aux États-Unis, de Beckett en Irlande ou Guyotat en France. Par exemple, dans certains dialogues, plusieurs personnes peuvent prendre la parole sans qu'on puisse y trouver un seul tiret ni un seul point, ou encore, dans la pagination, « des lignes commençant au milieu », comme le souligne son traducteur français du Démon, Marc Gibot[8]. Selby évoque, dans une interview, en 1999 : «  "Ce n'est pas de l'écriture mais de la typographie" , a-t-on dit un jour. C'est plutôt un compliment parce que j'ai toujours voulu m'effacer derrière mes personnages. J'ai peut-être réussi au-delà de mes espérances. Ça me rend triste parfois. »[5]

Par ailleurs, il rapproche cela du langage musical : « Dans Last Exit to Brooklyn, j'ai travaillé dur pour développer cette espèce de topographie : la chute de lignes, les lignes flottantes sont toujours comme des citations musicales »[1], et dit être influencé dans son écriture par les œuvres de Beethoven[1].

Il explique, dans le documentaire Hubert Selby Jr, deux ou trois choses de Ludovic Cantais, tourné en 1998 : « Je change sans aucun complexe de temps, de pronom, de voix, 3e personne, 1re personne. Je vais en tous sens, selon l’exigence de l’œuvre »[9], et ajoute, dans une interview en 1999 : « J'essaie toujours d'écrire de l'intérieur, de me glisser dans mes personnages, de voir le monde à travers leurs yeux. »[5]

Pour le réalisateur Ludovic Cantais, grâce à son roman Le Saule ((en) The Willow Tree, 1998), Selby renoue avec une écriture « caractérisée par une grammaire unique, déchiquetée, une langue argotique, qui lui a souvent valu d'être comparé à Céline ou William Carlos Williams, son mentor. »[3]. Selon Selby, concernant cet ouvrage : « Il ne s'agit plus seulement de s'enfoncer dans les ténèbres mais de trouver un moyen de rejoindre la lumière. La base de mon écriture reste la même, j'essaye de lui donner un cadre plus large. »[5]

Un an avant sa mort, il écrit à Nick Tosches, avec qui il avait signé en 2000 l'album Blue Eyes And Exit Wounds : « J'ai l'impression d'avoir oublié comment écrire comme j'oublie tout le reste. Tout a changé. Peux pas respirer, peux pas rester éveillé, peux pas beaucoup bouger. Parfois, je m'assois pour pleurer. Le cœur brisé par tout ça. J'ai travaillé très dur pour apprendre à écrire une ligne toute simple, qui veuille dire quelque chose, et voilà que je ne peux plus me servir de ce que j'ai appris. »[7]

Œuvres[modifier | modifier le code]

Littérature[modifier | modifier le code]

Romans et nouvelles[modifier | modifier le code]

  • Last Exit to Brooklyn (Last Exit to Brooklyn), 1964, trad. Jeanne Colza, Albin-Michel, 1972
    Note : en janvier 2014 est publiée une nouvelle traduction française de l'ouvrage, par Jean-Pierre Carasso et Jacqueline Huet, Albin Michel, 01-2014[4] (ISBN 9782226254306)
  • La Geôle (The Room), 1971, trad. J. Lanturle, Albin-Michel 1972, rééd. 10/18, 2004
  • Le Démon (The Demon), 1976, trad. Marc Gibot, Les Humanoïdes associés, 1977
  • Retour à Brooklyn (Requiem for a Dream), 1978, trad. Daniel Mauroc, Paris, Les Humanoïdes associés, 1980 ; rééd. 10/18, 1990
  • Chanson de la Neige Silencieuse (Songs of the Silent Snow), 1986, trad Marc Gibot, éditions de l'Olivier, 2014 - recueil de nouvelles
  • Le Saule (The Willow Tree), 1998, trad Francis Kerline, éditions de l'Olivier, 1999
  • Waiting Period (Waiting Period), 2002, trad Christophe Claro, Flammarion, 2005

Entretiens[modifier | modifier le code]

  • Bayon et Hubert Selby, Selby, de Brooklyn : entretiens avec un mystique US, traduit par Marc Gibot, Paris, Christian Bourgois, 1986, 169 pp.
    Recueil de textes extraits du journal Libération, 1983

Essais[modifier | modifier le code]

Posthume

Préface[modifier | modifier le code]

  • Lydia Lunch, Paradoxia, journal d'une prédatrice ((en) Paradoxia, a Predator’s Diary), Paris, Le Serpent à plumes, 1999 (ISBN 2-84261-153-5)

Filmographie[modifier | modifier le code]

Scénarios
Acteur

Discographie[modifier | modifier le code]

Adaptations cinématographiques[modifier | modifier le code]

Documentaires sur l'auteur[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) James R. Giles, Understanding Hubert Selby Jr, Univ. of South Carolina Press, 1998. 164 pp
Étude comparée
  • (en) Evan Hughes, Literary Brooklyn: The Writers of Brooklyn and the Story of American City Life, New York, Henry Holt, 2011 (ISBN 9780805089868)
  • (en) Tyrone R. Simpson, Ghetto images in twentieth-century American literature: writing apartheid, New York, Palgrave Macmillan, 2012
    Et plus particulièrement la troisième partie : « "Something Tangible to Strike At": urban moralism and the transvestitic antidote in Hubert Selby Jr.'s Last Exit to Brooklyn ».

Liens externes[modifier | modifier le code]