Histoire de l'Irlande (795-1169)

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L'histoire de l'Irlande de 795 à 1169 couvre la période s'étendant entre le premier raid viking sur l'île et le début de l'invasion normande.

L'Irlande à la fin du VIIIe siècle[modifier | modifier le code]

Carte politique de l'Irlande vers 800.

À la fin du VIIIe siècle, l'Irlande est une île de culture et de langue entièrement gaéliques. Sa christianisation, débutée au Ve siècle, est quasiment complète, bien que le Martyrologe de Tallaght, rédigé au VIIIe ou au IXe siècle, semble sous-entendre que l'ancienne religion païenne n'est pas encore totalement éradiquée à ce stade.

En dépit de cette unité culturelle et religieuse, l'île est divisée entre de nombreuses dynasties concurrentes, dont la plus puissante est celle des Uí Néill. Les Uí Néill du Nord contrôlent le nord-ouest de l'Irlande, la branche des Cenél Conaill à l'ouest et celle des Cenél nEógain à l'est. Ces derniers prennent l'ascendant sur les Cenél Conaill en 789 et s'étendent vers l'est et le sud, prenant le contrôle de l'importante communauté monastique d'Armagh, ainsi que du royaume d'Airgíalla. Ces conquêtes se font aux dépens des Ulaid (branches principales : Dál Fiatach et Dál nAraidi), dès lors confinés à l'est de la Bann. Au centre de l'île, la plaine de Mide est contrôlée par les Uí Néill du Sud depuis le VIIe siècle. Jusqu'en 728, c'est la branche des Síl nÁedo Sláine qui domine, puis elle est supplantée par le Clan Cholmáin.

Les seuls à pouvoir rivaliser avec les Uí Néill sont les Eóganachta du Munster, qui prétendent à la suzeraineté sur tout le sud de l'île, en vertu de la division traditionnelle de l'Irlande entre Leath Cuinn et Leath Moga. En Laigin (Leinster), la dynastie dominante est celle des Uí Dúnlainge, étroitement liée à l'abbaye de Kildare. Ils ont supplanté les Uí Cheinnselaigh à partir de 728, et ces derniers se sont retirés dans le sud-est de la région, autour de l'abbaye de Ferns. En Connacht, les Uí Briúin dominent depuis le début du siècle. Leur influence s'étend jusqu'au royaume de Breifne, au sud du territoire des Uí Néill du Nord.

Premier âge viking (795-902)[modifier | modifier le code]

Le premier raid viking connu sur le sol irlandais a lieu en 795 : une attaque sur l'île Lambay. Les décennies qui suivent voient se produire d'autres attaques ponctuelles sur toutes les côtes de l'île, jusqu'aux îles Skellig en 823. Les responsables sont probablement des aventuriers norvégiens ayant transité par les Shetland, les Orcades et les Hébrides. Au fil du temps, les offensives vikings prennent de l'ampleur : ils arrivent en plus grands nombres et commencent à établir des camps permanents, les longphort. Les deux premiers sont fondés en 841 à Linn Dúachaill (Annagassan) et à Duiblinn (Dublin). Ils s'attaquent désormais à l'intérieur des terres en remontant des fleuves comme la Shannon, la Boyne ou la Liffey.

Face aux Vikings, le roi de Mide Máel Sechnaill réagit énergiquement : en 845, l'année de son arrivée au pouvoir, il capture le viking Turgeis et le fait noyer dans le Lough Owel. Ses nombreuses victoires face aux autres rois gaéliques lui permettent d'exercer son hégémonie sur la quasi-totalité de l'île jusqu'à sa mort, en 862, mais son œuvre politique ne lui survit pas.

En 853, un chef nommé Olaf le Blanc arrive en Irlande et se rend maître de Dublin, dont il devient le premier roi. Lui et son frère Ivarr lancent de nombreuses offensives sur les deux rives de la mer d'Irlande dans les deux décennies qui suivent. Ils n'hésitent pas à s'allier avec des rois irlandais contre d'autres rois irlandais, dans des alliances toujours mouvantes. Olaf disparaît des annales en 871, et Ivarr meurt deux ans plus tard. C'est le début d'une période troublée pour les Vikings de Dublin, qui passent le plus clair de leur temps en luttes intestines. La ville est pillée et détruite par les rois Máel Finnia mac Flannacain et Cerball mac Muirecáin en 902.

Second âge viking (914-980)[modifier | modifier le code]

Les principales colonies vikings en Irlande au Xe siècle.

Après leur départ de Dublin, les Uí Ímair, ou « descendants d'Ivarr », restent actifs en mer d'Irlande. L'un d'entre eux, Sigtryggr Caoch, réinvestit Dublin en 917, trois ans après la prise de Waterford par une flotte viking venue de Bretagne. Un autre Uí Ímair, Ragnall, bat les Vikings de Waterford, puis se lance à la conquête du royaume viking d'York, en Angleterre. Dans les années qui suivent, de nouveaux établissements sont fondés à Cork, à Wexford et à Limerick, tandis que Dublin devient le principal centre commercial de l'île. Peu à peu, les mariages mixtes finissent par donner naissance aux Norvégiens-Gaëls.

Les premiers rois de Dublin remportent de brillants succès face aux Irlandais : ainsi, le haut-roi Niall Glúndub est vaincu et tué en 919. Son fils Muirchertach mac Neill inverse la tendance et inflige plusieurs défaites aux Uí Ímair. Ceux-ci sont en outre préoccupés par les vicissitudes du royaume d'York. Ils sont définitivement chassés d'Angleterre en 952. Le haut-roi Máel Sechnaill mac Domnaill remporte une victoire à Tara en 980 et contraint les rois de Dublin à lui verser tribut.

La lutte pour le pouvoir (980-1169)[modifier | modifier le code]

Les décennies qui suivent voient Máel Sechnaill lutter contre le roi de Munster Brian Boru. Ils se partagent l'Irlande en 997, mais continuent à s'opposer jusqu'à ce que Brian Boru soit reconnu comme le souverain de toute l'île. Il est tué lors de la bataille de Clontarf, livrée le Vendredi saint de l'an 1014. Clontarf a longtemps été considérée dans l'imaginaire irlandais comme le symbole de la résistance gaélique aux Vikings, et Brian Boru comme un héros national, mais la bataille l'opposait en réalité au Leinster révolté, allié au roi de Dublin Sigtryggr Silkiskegg. L'hégémonie de Brian Boru ne lui survit pas, et Máel Sechnaill redevient haut-roi après sa mort.

Les successeurs de Máel Sechnaill sont appelés rí Érenn co fressarba (« hauts-rois avec opposition ») dans les annales irlandaises : suivant l'exemple de Brian Boru, ils n'hésitent pas à s'emparer du titre par la force, au détriment des Uí Néill dont l'hégémonie disparaît après cette période. Se succèdent ainsi Donnchad mac Briain de Munster († 1064), Diarmait mac Mail na mBo de Leinster († 1072), Toirdelbach Ua Briain de Munster († 1086), Domnall MacLochlainn d'Ailech († 1121), Muirchertach Ua Briain de Munster († 1119), Toirdelbach Ua Conchobair de Connacht († 1156), Muirchertach MacLochlainn des Cenél nEógain († 1166) et Ruaidri Ua Conchobair de Connacht, le dernier haut-roi avant l'invasion normande.

Références[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]