Grâce (droit)

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La grâce est le droit d'annuler ou de modifier une peine, confié en général par la justice à la plus haute instance politique du pays.

La grâce entraîne la non-mise à exécution de la peine ou de la peine subsistante et s'apparente à un « pardon ». N'effaçant pas la condamnation, elle se distingue donc :

  • de l’amnistie, qui efface la condamnation et annule la peine subsistante, sans effet sur la peine déjà effectuée ;
  • de la révision judiciaire d'un procès, à même d'annuler la condamnation et, autant que faire se peut, toutes ses conséquences.

Grâce royale[modifier | modifier le code]

La grâce est un des droits les plus anciens et les plus répandus attachés à la fonction royale. À la rigueur de la justice, le roi oppose sa miséricorde.

Ancien régime français[modifier | modifier le code]

En France, la grâce pouvait s'exercer par lettre de rémission, qui effaçait les conséquences de la condamnation, ou par lettre d'abolition, qui effaçait la condamnation elle-même[1].

Droit canadien[modifier | modifier le code]

Il existe une prérogative royale de clémence en droit pénal canadien. Elle s'exerce par le gouverneur-général sur recommandation du conseil des ministres. Il existe des directives ministérielles à la Commission des libérations conditionnelles du Canada pour orienter l'exercice du pouvoir de clémence[2].

Grâce présidentielle et exécutive[modifier | modifier le code]

Le pouvoir de grâce régalien se perpétue dans celui des présidents républicains, représentant symboliquement, comme un monarque, la continuité et la légitimité de l'État, qu'ils soient ou non détenteurs du pouvoir exécutif[3] : la grâce présidentielle est le pouvoir par lequel, dans certains pays, le président de la République a le pouvoir d'annuler une peine ou d'ordonner qu'elle ne soit pas mise à exécution. Il peut éventuellement s'accompagner d'un pouvoir d'amnistie. Le pouvoir de grâce est partagé dans le cas du fédéralisme.

En Allemagne[modifier | modifier le code]

Le président fédéral de l'Allemagne a le droit de grâce individuelle pour les cas jugés en instance fédérale, ce qui concerne souvent les cas graves.

Pour les actes relevant de la juridiction du Länder, seuls l'exécutif ou le gouvernement local peuvent accorder la grâce. Souvent, ce pouvoir est délégué au ministre fédéral de la justice[4].

En France[modifier | modifier le code]

L'Ancien Régime et la République ont quasiment donné, respectivement au roi et au président, le droit de grâce.

Aux États-Unis[modifier | modifier le code]

Le président des États-Unis, par l'article deux de la Constitution, a le droit de grâce (pardon) pour les actes relevant de la loi fédérale, les crimes fédéraux. Cette prérogative ne s'applique pas pour les procédures relevant de l'impeachment. La Cour suprême en 1866 précisa les modalités de la grâce, qui est illimité et qui peut être exercée dès que le crime est commis. L'auto-grâce présidentielle (self-pardon) est une hypothèse évoquée pour Richard Nixon, Bill Clinton et Donald Trump mais sa faisabilité divise les juristes étant donné que c'est un cas où les textes sont muets[5],[6].

Pour les États fédérés, les procédures et conditions d'éligibilités varient selon leurs législations. Pour la grande majorité d'entre-eux, le droit de grâce est partagé entre le gouverneur et une commission (board), qui, dans plusieurs États, décide également des libérations conditionnelles ; le board peut, selon les cas, être seulement consultatif ou être obligatoire pour accorder une grâce. Seuls une minorité d'États excluent le gouverneur de la procédure[7].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Pierre Prétou, « Les lettres de grâce des rois de France au Moyen Âge », Criminocorpus. Revue d'Histoire de la justice, des crimes et des peines,‎ (ISSN 2108-6907, lire en ligne, consulté le )
  2. Commission des libérations conditionnelles. « Prérogative royal de clémence - Directives ministérielle ». En ligne. Page consultée le 2022-05-28
  3. Maurice Duverger, La monarchie républicaine, Paris, Robert Laffont, 1974, 316 p.
  4. « L'amnistie et la grâce. Étude de législation comparée n° 177 », sur Sénat,
  5. (en) « Can a president pardon himself? », sur CBS News,
  6. (en) « The impending indictment (and pardon) of William Jefferson Clinton », sur CNN,
  7. (en) « 50-State Comparison: Pardon Policy & Practice », sur Collateral Consequence Ressources Center,

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Pierre Prétou, « Les lettres de grâce des rois de France au Moyen Âge », Criminocorpus. Revue d'Histoire de la justice, des crimes et des peines,‎ 8 mars 2018 (ISSN 2108-6907, lire en ligne, consulté le 24 décembre 2021)
  • Yves-Marie Bercé, Alfred Soman (éd.), La Justice royale et le parlement de Paris (XIVe – XVIIe siècle), Bibliothèque de l'École des chartes, Tome 153-2, 1995

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]