Frits van den Berghe

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Frits van den Berghe
Frits van den Berghe (1915).
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Frits van den Berghe, né le à Gand (province de Flandre-Orientale) et mort dans cette même ville le , est un peintre, graveur et dessinateur belge, membre du deuxième groupe de Laethem-Saint-Martin.

Biographie[modifier | modifier le code]

Pêcheurs à la Lys (1923).
Fécondité (Musée d'art à la mer d'Ostende).

Fils d'un bibliothécaire de l'Université de Gand[1], il bénéficie d'une éducation soignée et baigne durant son enfance dans une atmosphère érudite et libérale.

L'habitude que lui a inculquée son père de n'attacher de réelle importance qu'à des valeurs spirituelles laisse Frits à jamais démuni de sens pratique. Devant les problèmes de la vie matérielle, il est d'une maladresse déconcertante. Vêtu d'un complet noir ou d'une salopette, qu'il ait la barbe drue comme dans sa jeunesse ou le menton glabre comme dans son âge mûr, il a tour à tour l'allure d'un fonctionnaire ou d'un artisan. Rondouillard, presque replet, il a un visage cireux et un front blanc prolongé par un crâne très tôt dénudé qu'entoure d'une tempe à l'autre, en cachant la nuque, un demi-cercle de cheveux noirs de jais.

Son ami Paul-Gustave van Hecke dira de lui : « Raisonneur. Très intelligent. Vaste culture livresque, de Platon à Nick Carter ! Volontiers professeur. Individualiste perpétuellement attiré par le social et l'humain, jusqu'à l'inquiétude [...] Sybarite pauvre mais sans rancune. Jouisseur de peu. Héroïsme humble et secret - mais orgueilleux - du renoncement volontaire ».[réf. nécessaire]

C'est un jeune artiste très raisonneur, un peu doctoral et grand dévoreur de livres.[réf. nécessaire] C'est à l'Académie des beaux-arts de Gand (Ferdinand Willaert, Jean Delvin et Jules Van Biesbroeck) qu'il reçoit, de 1897 à 1903, sa formation artistique. En 1902, il suit également les cours d'art décoratif de F. Wante à l'école des arts et métiers. Albert Servaes (1883-1966) et Léon de Smet (1881-1966) comptent parmi ses condisciples. Ensemble, ils suivent de près la vie artistique belge, en particulier les activités du cercle bruxellois La Libre Esthétique qui organise régulièrement des expositions d'art impressionniste et symboliste. Se distanciant du symbolisme à caractère religieux ou mystique de la première école de Laethem, il réalise néanmoins, dès 1910, des œuvres symbolistes en dehors de tout contexte religieux.

Il rencontre Gustave de Smet (1877-1943), Constant Permeke (1886-1952), Robert Aerens (1883-1969) et Clément De Porre (1874-1947). De 1904 à 1913, il travaille un peu chaque été à Laethem-Saint-Martin, où il côtoie un groupe d'intellectuels flamands et, parmi eux, Paul-Gustave van Hecke qui jouera le rôle de théoricien et d'animateur de ce qu'on appellera le deuxième groupe de Laethem-Saint-Martin.

À l'époque, les questions d'esthétique — qui d'ailleurs ne cesseront jamais de le préoccuper — le passionnent plus que la création artistique. En 1907, il contracte avec Elvire Van Houtte un mariage qui ne sera pas toujours des plus heureux, est nommé professeur[2] à l'Académie de Gand — sa tendance à disséquer les choses de l'art le prédisposant à l'enseignement — et fait dès lors la navette entre son village d'élection et sa ville natale. Par économie, il partage quelque temps une bicoque avec Albert Servaes (1883-1966), le commis voyageur en sucreries et épices déjà présent à Laethem et qui se mêle maintenant aux nouveaux venus comme il s'était mêlé aux artistes du premier groupe, c'est-à-dire pas assidûment.

En 1913-1914, il renonce à son poste de professeur et effectue un voyage d'études de six mois aux États-Unis — dont il revient désenchanté — pour s'y familiariser avec l'avant-garde internationale. De retour en Belgique au moment où la guerre éclate, il prend le chemin de la Hollande pour s'installer à Amsterdam, puis, en 1916, à Laren, chez Gustave de Smet. Revenu en Belgique en , il travaille quelque temps dans l'administration publique. Craignant d'être accusé d'activisme à la fin de la guerre, il retourne précipitamment aux Pays-Bas en , deux mois après l'armistice. Installé à Blaricum, près de Laren, il se rapproche encore de ses amis Gust et Gusta de Smet.

En 1921, Frits van den Berghe est de retour en Belgique. Dans un premier temps, il réside à Ostende en compagnie de Gustave de Smet, chez Constant Permeke. Ensemble avec Permeke et Gustave de Smet, ils connaissent une des périodes les plus fertiles de leur carrière.

L'année suivante, les deux peintres s'installent à Bachte-Maria-Leerne, dans la région de Laethem-Saint-Martin, pour ensuite occuper la villa que Paul-Gustave van Hecke met à leur disposition à Afsnee. Les deux artistes entretiennent des contacts étroits avec Van Hecke et André De Ridder qui, au lendemain de la guerre, par l'intermédiaire de la galerie et de la revue Sélection, se sont faits les défenseurs de l'expressionnisme. La galerie assure aux artistes une existence confortable, libre de tout souci matériel. Elle permet en outre de faire connaître leur travail à un large public, par l'intermédiaire d'expositions organisées en Belgique et à l'étranger.

En 1936, il réalise des bandes dessinées, dessins de presse et illustrations assisté du fils de son ami le peintre Victor Van Den Berghe, Leo De Buth ultérieurement connu sous le pseudonyme de Buth publiés dans Vooruit[3]. En 1937-1938, il met en image la série de bande dessinée Les Enquêtes d'Edmund Bell, avec le scénariste John Flanders (Jean Ray), dans l'hebdomadaire Bravo[4],[5],[6].

Cercles artistiques[modifier | modifier le code]

Les amants au village.

Évolution artistique[modifier | modifier le code]

L'Idiot devant l'étang (1926, Musée des beaux-arts de Gand).

Au début de la période Laethem-Saint-Martin, ses œuvres montrent l'assimilation du luminisme d'Émile Claus (1849-1924), du pointillisme de Théo Van Rysselberghe (1862-1926) et de la mélancolie des Nabis. Intimisme qui estompe les formes et les contrastes et transpose le réel comme dans un rêve plein de poésie. Mais déjà, pointent dans son œuvre des éléments décoratifs et symboliques hors de tout contexte religieux, ce qui le distingue du premier groupe de Laethem.

La période passée aux Pays-Bas est décisive pour Frits van den Berghe. Il peut se familiariser avec les tendances modernistes européennes, en particulier les débuts de l'abstraction et découvre l'expressionnisme de l'École de Bergen. Leur assimilation progressive détermine son œuvre et l'amène, vers 1920, à développer un langage expressionniste personnel (Les Baigneuses, 1920) se caractérisant par l'emploi de tons sombres et par de grandes surfaces peintes en larges aplats. Il est marqué par le fauvisme et le futurisme de Jan Sluyters (nl) (1881-1955), l'expressionnisme cubiste de Henri Le Fauconnier (1881-1946) et le magazine Das Kunstblatt qui l'introduit à l'expressionnisme allemand.

Les tableaux réalisés dans les années 1922-1926 forment le prolongement du travail entamé en Hollande. De style expressionniste, ils se caractérisent toutefois par un climat de sérénité sans précédent dans l'œuvre. Il s'agit le plus souvent de scènes de campagne pleines d'humour et de malice. Les références à l'expressionnisme allemand sont absentes. Leur composition libre rappelle davantage Marc Chagall (1887-1985), artiste bien connu des expressionnistes flamands.

L'assimilation de ces influences le conduit à un langage expressionniste personnel se caractérisant par l'emploi de tons à la fois chauds et sombres et par de grandes surfaces peintes en larges aplats, les formes étant anguleuses, tendues et synthétiques, influencées par l'« art nègre ». On retrouve ces mêmes tendances dans ses linos et ses bois.

Dès 1926 se produit un changement dans son œuvre (Naissances au Kunstmuseum de Bâle). S'éloignant du réalisme des expressionnistes flamands, Frits van den Berghe se laisse aller à des expérimentations formelles, expression immédiate des pensées qui l'habitent. Cette sensibilité nouvelle rejoint celle du surréalisme naissant. Bien introduit dans le milieu artistique bruxellois, il apprend à connaître le surréalisme à la galerie "L'Époque", fondée par Van Hecke en 1927, et y expose aux côtés de Magritte (1898-1967), Hans Arp (1886-1966), André Breton (1896-1966) et les figures marquantes de l'École de Paris, et enfin Max Ernst (1891-1976) : c'est ce dernier qui l'impressionne le plus. Les vingt-cinq œuvres sur papier exposées en 1928 à "L'Époque" sont représentatives de l'orientation nouvelle : visionnaires ou fantastiques, elles se caractérisent par une montée de l'irréel, l'halluciné et l'expressif avec une tendance pour le grotesque, le baroque et la fantasmagorie.

Poussé par la crise du début des années 1930, Frits van den Berghe illustre des œuvres littéraires et, à partir de 1932, produit des illustrations, des caricatures et des portraits pour les journaux gantois Vooruit et Koekoek. Obligé pour vivre de travailler comme illustrateur, il ne peut plus se consacrer à son art comme auparavant. Sa production - basée essentiellement sur des compositions antérieures - diminue considérablement. Les dernières œuvres comprennent une critique amère de l'humanité ou montrent la douleur de l'artiste. Atteint d'urémie, il meurt à Gand dans sa sombre maison de la rue Sainte-Catherine où il vivait entouré - comme de cauchemars - de ses objets étranges, de ses fétiches nègres et de ses collections d'art folklorique[5],[7].

Œuvres marquantes[modifier | modifier le code]

Portrait de Stella van de Wiele (1915).
  • Période impressionniste
    • Intérieur, 1904-1905
    • Paysan devant la maison bleue, 1905
    • Portrait de Raphaël van den Berghe, 1912
  • Courte période symboliste
    • Le Faune, 1912-1913
  • Période expressionniste
    • Le Peintre, 1916
    • Portrait de Madame Lucien Brulez, 1919
    • Obsession, 1919
    • Le Semeur, 1919
    • Portrait de Constant Permeke, 1922-1923
    • Les Baigneuses, 1922-1923
    • Dimanche, 1923-1924
  • Période "Fantasmagorique"
    • L'Homme dans les nuages, 1926-1927
    • L'Homme géographique, 1927
    • Généalogie, 1929
    • Autoportrait à la tête de mort, 1938

Muséographie[modifier | modifier le code]

Expositions rétrospectives[modifier | modifier le code]

Autoportrait (c.1933).

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Son père, Raphaël van den Berghe est un homme remarquable, polyglotte, lisant couramment plusieurs langues anciennes.
  2. Il y enseigne les principes de la peinture.
  3. (en) Kjell Knudde et Bas Schuddeboom, « Buth - Leo de Budt, Tijl (19 February 1919 - 25 October 2010, Belgium) », sur Lambiek, (consulté le ).
  4. Paul Haesaerts 1982, p. 20/174/179/312/321
  5. a et b Sibylle Valcke 1995
  6. Hervé Louinet, « Jean Ray / John Flanders scénariste de bandes dessinées (1/3) », BDzoom,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  7. Paul Haesaerts 1982, p. 355-356.

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Études[modifier | modifier le code]

  • Danny De Laet et Yves Varende, Au-delà du septième art : histoire de la bande dessinée belge, Bruxelles, Ministère des affaires étrangères, du commerce extérieur et de la coopération au développement, coll. « Chroniques belges » (no 322), , 302 p., ill. (OCLC 301693218, lire en ligne).

Livres[modifier | modifier le code]

  • André De Ridder, Laethem-Saint-Martin, colonie d'artistes, Bruxelles, Lumière, , 381 p.
  • Paul-Gustave Van Hecke, Frits van den Berghe, Anvers, De Sikkel, , 16+24
  • Émile Langui, Frits van den Berghe, Catalogue raisonné, Laconti, Bruxelles, 1966
  • Émile Langui, Frits van den Berghe, l'homme et son œuvre, Fonds Mercator, Anvers, 1968
  • Paul Haesaerts, Laethem-Saint-Martin : Le village élu de l'art flamand, Anvers, Fonds Mercator, , 523 p., ill. ; 30 cm (OCLC 1400584401)
  • Sibylle Valcke, Dictionnaire des peintres belges, Bruxelles, La Renaissance du livre, (lire en ligne)
  • Piet Boyens, Frits van den Berghe, avec catalogue raisonné par Patrick Derom et Gilles Marquenie, Pandora, Anvers, 1999

Périodiques[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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