Gyromitra esculenta

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Gyromitre, Fausse morille

Gyromitra esculenta, fausse morille ou gyromitre fausse morille, est une espèce de champignons toxiques de la famille des Discinaceae dans l'ordre des Pezizales.

Cette espèce a longtemps été considérée comme un champignon comestible car son taux de toxines, extrêmement variable, plus faible sous les climats froids, est encore atténué selon le mode de préparation, mais il peut occasionner chez l'homme des troubles neurologiques tels que la maladie de Charcot et une atteinte du foie et des reins, parfois fatale.

Description[modifier | modifier le code]

Sa chair est cassante et cireuse, il possède un pied trapu et creux à maturité qui peut atteindre 5 cm et son chapeau, qui peut atteindre 5 cm de haut et 10 cm de large, présente des lobes cérébriformes assez fins de couleur brun bistre à brun rouille.

Confusions possibles[modifier | modifier le code]

Les débutants pourront confondre le gyromitre dit « comestible » avec certaines morilles qui, elles, sont de bons comestibles (après cuisson).

Le chapeau du gyromitre évoque plus une forme de cervelle, et la couleur est également plus foncée que celle des morilles.

Taxonomie[modifier | modifier le code]

Synonymes[modifier | modifier le code]

  • Helvella esculenta Pers. 1800[2] (synonyme)
  • Physomitra esculenta (Pers.) Boud. 1907 (synonyme)

Variétés[modifier | modifier le code]

  • Gyromitra esculenta var. alba (Pilát 1951[3]) : variété blanche, rencontrée notamment au Québec ;
  • Gyromitra esculenta var. aurantiaca (Benedix 1969[4]) ;
  • Gyromitra esculenta var. bubaci (Velen.) (J. Moravec 1986[5]) ;
  • Gyromitra esculenta var. crispa Peck 1898[6] ;
  • Gyromitra esculenta var. fragilis (A. Marchand ex Réaudin 2008[7]) : spécimens grêles et friables, récoltés sous feuillus ;
  • Gyromitra esculenta var. fulva (J. Moravec 1986[8]).

Toxique[modifier | modifier le code]

Contrairement à ce qu'indique son nom (l'épithète esculenta signifiant « comestible » en latin), ce champignon est toxique pour les humains, voire mortel s'il est consommé cru. Il peut provoquer des intoxications graves ou des accidents mortels, même lorsqu'il est cuit, en cas de consommation répétée ; séché, il reste légèrement toxique car la gyromitrine (en) se transforme en monométhylhydrazine (ou méthylhydrazine), qui est dégradée lors du séchage mais reste présent sous forme d'hydrazine[9].

Une étude publiée en 2023 associe la consommation de ce champignon avec une recrudescence dans un village de Savoie de cas de sclérose latérale amyotrophique (plus connue sous le nom de « maladie de Charcot », qui est en fait une maladie neurodégénérative)[10] ; une région de Finlande où le champignon est recherché en cuisine voit notamment sa population plus touchée par cette maladie[11].

Légalité[modifier | modifier le code]

Son taux de toxines étant extrêmement variable, plus faible sous les climats froids[9], ce champignon reste toujours consommé dans le nord de l'Europe ou dans les régions montagnardes. En Finlande ce gyromitre est toujours vendu, avec les avertissements appropriés[12]. En Suède on ne le recommande plus, il reste toutefois toléré chez les restaurateurs avertis et en conserve seulement pour la vente directe au particulier[12]. En France, par décret, le gyromitre dit « comestible » est interdit à la vente[13].

Syndrome gyromitrien[modifier | modifier le code]

Fausses morilles à la vente sur un marché à Helsinki.

La gyromitrine[modifier | modifier le code]

Le principe toxique, la gyromitrine (N-méthyl-N-formylhydrazone), est hydrolysé dans l’organisme en méthylhydrazine. La méthylhydrazine, antagoniste de l’action de la pyridoxine (vitamine B6) sur les nombreuses réactions cellulaires dont elle est le cofacteur, est responsable des manifestations observées.

Troubles neurologiques[modifier | modifier le code]

Les troubles neurologiques (convulsions) peuvent être expliqués par un défaut de synthèse de l’acide γ-aminobutyrique (dépendant de la pyridoxine) qui induit une diminution du taux intracérébral en GABA, avec abaissement du seuil épileptogène. L’atteinte hépatique s’explique par la formation intracellulaire de radicaux libres. Il faudrait environ 1 kg de gyromitrine pour que les effets soient mortels pour l’homme. L’intoxication subaiguë est possible par consommation rapprochée et répétée de faibles doses que l'organisme élimine très lentement. Les acétyleurs lents seraient prédisposés à l’accumulation.

Une étude publiée en 2021 associe la consommation de ce champignon avec la maladie de Charcot[11].

Symptômes[modifier | modifier le code]

L’incubation est longue (6 à 8 heures le plus souvent, parfois 2 à 24 heures). Le début des troubles est brutal, marqué par une asthénie, des vertiges, des céphalées, des douleurs abdominales, des vomissements et parfois des diarrhées. Les signes persistent 1 à 2 jours puis s’amendent progressivement. Les formes graves sont caractérisées par des troubles neurologiques (convulsions), des troubles métaboliques (hypoglycémie, acidose métabolique), et par l’apparition, au 2e ou 3e jour, d’une atteinte hépatique cytolytique qui peut être sévère. L’atteinte rénale est indirecte. Des cas d’hémolyse intravasculaire aiguë sont rapportés, associés à un déficit enzymatique érythrocytaire. Le traitement consiste en une prise en charge symptomatique des troubles digestifs et de l’atteinte hépato-rénale, associée à l’administration intraveineuse de vitamine B6 (1 à 2 grammes par 24 heures)[9].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Summa veg. Scand., Section Post. (Stockholm): p. 346, 1849
  2. Comm. Schaeff. Icon. Pict.:64, 1800
  3. Stud. Bot. Čechoslav. 12: p. 71 (1951)
  4. Kulturpflanze, 17, p. 275 (1969)
  5. Česká Mykol. 40(1): p. 17 (1986)
  6. Ann. Rep. N.Y. St. Mus. 51: p. 299 (1898)
  7. Docums Mycol. 34(nos 135-136): p. 82 (2008)
  8. Česká Mykol. 40(1): p.15 (1986)
  9. a b et c Claude Andary, Guy Privat et Marie-Jo Bourrier, « Variations of Monomethylhydrazine Content in Gyromitra Esculenta », Mycologia, no 77:2,‎ , p.259-264 (DOI 10.1080/00275514.1985.12025094, lire en ligne).
  10. « Quand la fausse morille détruit le cerveau », Science et Avenir, no 921,‎ , p. 48-50
  11. a et b « Un champignon lié à des cas de maladie de Charcot : la fin d'une énigme médicale vieille de plus de dix ans »
  12. a et b (en) Jørn Gry et Christer Andersson, Mushrooms traded as food. Vol II sec 2: Nordic risk assessments and background on edible mushrooms, suitable for commercial marketing and background lists for industry, trade and food inspection. Risk assessments of mushrooms on the four guidance lists.. Éditeur Nordic Council of Ministers, 2014, page 195. (ISBN 9289327057 et 9789289327053).
  13. depuis le (voir le Journal officiel de cette date)

Lien interne[modifier | modifier le code]

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