Eugène de Ménorval

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Eugène de Ménorval
Illustration.
Fonctions
Conseiller municipal de Paris
(Quartier de l'Arsenal)

(8 ans)
Prédécesseur Henri Harant
Successeur Pierre-Nicolas Hervieu
Conseiller général de la Seine

(9 ans)
Biographie
Nom de naissance Eugène de La Goublaye de Ménorval
Date de naissance
Lieu de naissance Ancien 10e arrondissement de Paris
Date de décès (à 68 ans)
Lieu de décès 4e arrondissement de Paris
Nationalité Drapeau de la France Française
Parti politique Radical,
Boulangiste
Profession Chef d'institution

Signature de Eugène de Ménorval

Eugène de Ménorval (de son vrai nom, Eugène de La Goublaye de Ménorval) né à Paris le et mort dans cette même ville le [1], est un historien et homme politique français du XIXe siècle.

Biographie[modifier | modifier le code]

Eugène de Lagoublaye de Ménorval, fils aîné d'Adélaïde Corneille Saint-Marc et du capitaine de cavalerie Eugène-Jean-Laurent de La Goublaye de Ménorval (1790-1860), est le descendant d'une branche cadette de la maison de La Goublaye, une famille aristocratique bretonne attestée depuis le XIVe siècle[2]. Cependant, en tant que républicain, il n'arborera jamais de titre nobiliaire et signera ses publications et sa correspondance « E. de Ménorval ».

Après avoir étudié dans un collège de province, Eugène de Ménorval devient professeur au collège de Dreux après 1848 et prépare l'agrégation au moment où survient le coup d’État du 2 décembre 1851. Ayant protesté publiquement, tout comme son ami Adolphe Royannez, contre ce coup de force (en arrachant les affiches contenant la proclamation de Louis-Napoléon Bonaparte), Eugène doit renoncer à son poste et à toute carrière universitaire[3]. Il revient alors à Paris et se fixe dans l'actuel 4e arrondissement, où, après avoir été maître répétiteur à l'institution Jauffret[4] (alors installée dans l'hôtel Le Peletier de Saint-Fargeau), il fonde en 1859 sa propre institution privée (située dans l'ancien hôtel de Lyonne, entre le 16 de la rue des Lions-Saint-Paul[5] et le 14 de la rue Beautreillis) destinée aux élèves du Lycée Charlemagne. La même année, il épouse une cousine, Clarisse Corneille Saint-Marc, qui lui donnera trois enfants, Eugène (1864-19??), artiste-peintre, Marguerite et Hélène[2]. Partisan de la démocratisation de l'enseignement, officier de l'Instruction publique[1], Eugène de Ménorval est vice-président de l'Association polytechnique[4] fondée en 1830 par Auguste Comte.

Activités politiques[modifier | modifier le code]

Caricature par Henri Demare (1881).

L'engagement politique d'Eugène de Ménorval le place tout d'abord à la gauche du mouvement républicain. Il participe ainsi à la campagne de Désiré Barodet en 1873[6]. Nommé premier adjoint au maire du 4e arrondissement en 1879[4], il est élu conseiller municipal de Paris pour le quartier de l'Arsenal le . Réélu le (contre le républicain modéré Émile Kern) et le , siégeant parmi les indépendants[4] puis parmi les autonomistes[7], il devient également conseiller général de la Seine. À cette époque, Eugène de Ménorval est un radical autonomiste et anticlérical, partisan de l'autonomie communale de la capitale[4], de la suppression du Sénat, de la séparation de l’Église et de l’État, et de la laïcisation de l’École[8]. Il figure ainsi sur la liste de la Fédération républicaine radicale (menée par des leaders de l'extrême gauche et de la gauche radicale tels que Floquet, Lockroy, Brisson, Allain Targé, Clemenceau, De La Forge et Barodet) lors des élections législatives de 1885[9]. Il se définira plus tard comme un « Républicain socialiste » tout en se distinguant nettement des internationalistes en tant qu'« ardent patriote »[10].

À l'instar de nombreux radicaux partisans d'une révision constitutionnelle que leur refuse la majorité parlementaire républicaine opportuniste, il adhère au boulangisme, en participant, en [11], à la fondation de la « Ligue d'action républicaine » de Georges Laguerre[12] puis en appartenant au Comité républicain national, véritable état-major du mouvement. Outre le révisionnisme, c'est également le nationalisme qui l'attire dans le sillage du « général Revanche » : repreneur de l'hebdomadaire L'Antiprussien (renommé La Défense nationale depuis )[13], membre de la Ligue des patriotes de Paul Déroulède, dont il intègre le comité directeur[14], il essaiera de surmonter la dissolution de ce groupe en appelant en 1891 à la formation d'une « Ligue anti-allemande », en réaction à l'arrestation de nationalistes qui avaient manifesté contre la représentation du Lohengrin de Wagner à l'Opéra[15]. Après la mort du général Boulanger, il participera avec d'autres boulangistes de gauche (tels que Laisant, Planteau et Roche) à la création d'une « Ligue intransigeante socialiste » présidée par Henri Rochefort[16].

Sa participation active au mouvement boulangiste l'expose à la violence des luttes politiques de l'époque : en 1888, une de ses réunions publiques dégénère en bagarre ponctuée de coups de feu[17] et, à la suite d'une altercation au conseil municipal, il affronte en duel son collègue Émile Chautemps[18].

Eugène de Ménorval lors de la campagne de 1889.

Candidat boulangiste dans la première circonscription du 4e arrondissement (correspondant aux quartiers de l'Arsenal et Saint-Gervais) lors des élections législatives de 1889, il talonne Barodet au premier tour avant d'être battu par son ancien colistier à l'issue d'une campagne diffamatoire[19]. À la suite de cette défaite, il démissionne le de son mandat municipal[20] puis tente de reconquérir son siège lors des élections municipales des 27 avril et 4 mai 1890 : largement en tête au premier tour, Eugène de Ménorval est cependant battu au second tour par le modéré Pierre-Nicolas Hervieu, candidat de l'Union libérale qui a bénéficié de la discipline républicaine appliquée par les anti-boulangistes. Lors des législatives de 1893, il est à nouveau candidat (en tant que « révisionniste plébiscitaire »[21]) contre Barodet, qui le devance largement dès le premier tour. En , une élection législative partielle dans le 13e arrondissement (provoquée par la démission d'Abel Hovelacque) lui offre une nouvelle occasion, cette fois-ci en tant que socialiste révisionniste. Or, le meneur de cette tendance, Henri Rochefort, tout d'abord favorable à l'ex-conseiller municipal, se concerte avec Jean Jaurès[22] et choisit finalement de soutenir un autre socialiste, Gérault-Richard[23]. Eugène de Ménorval maintient cependant sa candidature mais celle-ci n'ayant recueilli qu'un faible nombre de suffrages au premier tour, il se désiste en faveur de Gérault-Richard[24]. Il tente une dernière fois de reprendre son siège de conseiller municipal en 1896. Patronné par les blanquistes du comité socialiste révolutionnaire[25], il n'obtient que 542 voix mais parvient à mettre Hervieu en ballotage face au radical Vaudet.

Travaux historiques[modifier | modifier le code]

Passionné d'histoire dès son plus jeune âge, Eugène de Ménorval est marqué par sa rencontre, en 1840, avec le célèbre historien Augustin Thierry, époux d'une cousine d'Eugène, Julie de Querengal, et par la lecture des œuvres de Chateaubriand[3].

Membre puis vice-président de la Société des amis des monuments parisiens, membre de différentes commissions relatives à l'histoire de la capitale, il met à profit son mandat municipal pour plaider en faveur du patrimoine et de la connaissance du vieux Paris, notamment en demandant la conservation des arènes de Lutèce (1883)[26] et en obtenant les fonds nécessaires à la continuation du plan archéologique de Paris entrepris par Albert Lenoir et Adolphe Berty (1887)[27]. Passionné par l'histoire de sa ville natale, il publie des études érudites sur le passé de son quartier, écrit des articles pour Le Figaro puis pour L’Éclair et contribue à L'Intermédiaire des chercheurs et curieux. Son œuvre maîtresse, une histoire de Paris des origines jusqu'en 1789, reste inachevée, le quatrième volume, consacré au XVIIIe siècle, n'ayant jamais été publié.

Il meurt le en son domicile du no 20 la rue du Petit-Musc. Il est tout d'abord inhumé au cimetière de Bagneux avant d'être transféré, deux mois plus tard[28], au Père-Lachaise (division 92)[29], une concession perpétuelle ayant été accordée gratuitement par la ville de Paris[30].

Publications d'Eugène de Ménorval[modifier | modifier le code]

  • Les Jésuites de la rue Saint-Antoine, l'église Saint-Paul-Saint-Louis et le lycée Charlemagne, notice historique, Paris, Aubry, 1872.
  • Paris depuis ses origines jusqu'à nos jours, 3 vol., Paris, Firmin-Didot, 1889-1897.
  • Bourdaloue, vie d'un jésuite de la maison professe de la rue Saint-Antoine au XVIIe siècle, Paris, Champion, 1897.
  • Promenades à travers Paris, Paris, L.-Henry May, 1897 (recueil d'articles parus dans Le Figaro puis dans L’Éclair à partir de 1891).

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b État civil reconstitué de Paris, acte de naissance du 25 octobre 1829, ancien 10e arrondissement ; état civil du 4e arrondissement, 1897, fo 43, acte de décès no 2420 du 27 octobre (archives en ligne).
  2. a et b J. de La Goublaye de Ménorval, Arrêt de maintenue de noblesse de la maison de La Goublaye, Saint-Brieuc, 1897, p. 9 et 25.
  3. a et b E. de Ménorval, Paris ..., vol. 1, p. X-XII.
  4. a b c d et e « Mort de M. de Ménorval », Le XIXe siècle, 29 octobre 1897, p. 2.
  5. La Presse, 24 septembre 1862, p. 3.
  6. Le Rappel, 27 avril 1873, p. 3.
  7. Journal des débats, 25 février 1889, p. 1.
  8. « Élections municipales », Le Rappel, 28 décembre 1880, p. 3.
  9. Le Rappel, 29 septembre 1885, p. 1.
  10. « M. Robin candidat », Le Matin, 31 octobre 1894, p. 1.
  11. « Boulangisme et antiboulangisme », Journal des débats, 27 avril 1888, p. 3.
  12. Haute Cour de Justice, Affaire Boulanger, Dillon, Rochefort, vol. 2 (procédure), Paris, 1889, p. 346-347.
  13. Bertrand Joly, « La France et la Revanche (1871-1914) », Revue d'histoire moderne et contemporaine, avril-juin 1999, p. 342, n. 96.
  14. « La journée de Buzenval », La Presse, 21 janvier 1889, p. 2.
  15. L'Intransigeant, 21 septembre 1891, p. 1, et Le Gaulois du même jour, p. 3.
  16. « La Ligue intransigeante socialiste », Journal des débats, 31 octobre 1891, p. 3.
  17. Haute Cour de Justice, Affaire Boulanger, Dillon, Rochefort, vol. 4 (annexes), Paris, 1889, p. 240-241.
  18. « L'incident Chautemps-Ménorval », Le Rappel, 9 décembre 1888, p. 2.
  19. « Élections législatives », Le Figaro, 1er octobre 1889, p. 2.
  20. Bulletin municipal officiel de la ville de Paris, 8e année, no 281, 12 octobre 1889, p. 3031.
  21. Le Gaulois, 21 août 1893, p. 1.
  22. « L'Élection du XIIIe », Le Gaulois, 21 décembre 1894, p. 2.
  23. « Chronique électorale », Le XIXe siècle, 17 décembre 1894, p. 1.
  24. « Élection de Gérault-Richard », Le XIXe siècle, 8 janvier 1895, p. 2.
  25. « Chronique municipale », Le Gaulois, 27 avril 1896, p. 3.
  26. Pierre Dumas, « Conseil municipal », Le Gaulois, 17 mai 1883, p. 3 et « Conseil municipal de Paris », La Presse, 30 mai 1883, p. 3..
  27. Charles Normand (dir.), Bulletin de la Société des Amis des Monuments parisiens, vol. 11, no 37-38, Paris, 1897, p. 71-72.
  28. « Nécrologie », Journal des débats, 31 décembre 1897, p. 3.
  29. Jules Moiroux, Le Cimetière du Père Lachaise, Paris, s. d., p. 247.
  30. Bulletin municipal officiel de la ville de Paris, 16e année, no 321, 28 novembre 1897, p. 3390.

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Eugène de la Goublaye de Ménorval : nécrologie, p. 69, 71-72, dans Bulletin de la Société des amis des monuments parisiens, 1897, tome 11 (lire en ligne)
  • René Kerviler (dir.), Répertoire général de bio-bibliographie bretonne, livre premier, t. 16 (Ger-Gour), Rennes, 1906, p. 343-344.
  • Jules Lermina, Dictionnaire universel illustré biographique et bibliographique de la France contemporaine, Paris, Boulanger, 1885, p. 999.

Liens externes[modifier | modifier le code]

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