Effet de foehn

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Régime de foehn dans les Pyrénées caractérisé par une bande de ciel bleu (le trou de fœhn) puis, en aval du phénomène, des nuages « soufflés » traduisant un vent puissant

L’effet de foehn, ou effet de föhn, est un phénomène météorologique créé par la rencontre de la circulation atmosphérique et du relief quand un vent dominant rencontre une chaîne montagneuse. Le nom vient de foehn, nom donné à un vent fort, sec et chaud dans les Alpes.

L'air situé sur le versant ascendant subit un refroidissement adiabatique sec, ce qui augmente son humidité relative jusqu'à possiblement saturation. S'il y a condensation, il y aura production de nuages et précipitations de ce côté puis le taux de changement devient celui plus lent du gradient adiabatique humide. En aval de l'obstacle, l'air redescend et se réchauffe selon l'adiabatique sèche ce qui dégage le ciel de ce côté. Selon la quantité de vapeur d'eau perdue et la différence d'altitude avant et après l'obstacle, la température en aval pourra être plus chaude qu'en amont.

Principe

Variation de la température en amont et en aval de l'obstacle

Lorsque le vent rencontre une montagne plus ou moins perpendiculairement, il suit le relief et s'élève. La pression atmosphérique diminuant avec l'altitude, la température de l'air diminue, par détente adiabatique, d'abord selon le gradient adiabatique sec.

Si l'humidité est assez grande au départ, la vapeur d'eau contenue dans l'air va se condenser à partir du niveau où il atteint la saturation, ce qui réchauffe l'air. En effet, le rayonnement solaire, qui a fourni de la chaleur et permis de faire s'évaporer l'eau au niveau du sol, est restitué à l'air par la chaleur latente. Le taux de diminution de la température de la parcelle d'air se fera donc à partir de ce moment selon le gradient adiabatique humide plus lent, tant qu'il y aura de la vapeur à condenser.

Si l'air est stable au-dessus de la chaîne de montagne, la parcelle soulevée ne peut continuer sa montée une fois la cime passée et redescend l'autre versant. Il est alors sous le point de saturation car l'eau est tombée sous forme de pluie. Lorsqu'il descend, l'air se comprime (puisque la pression augmente vers le bas) et donc sa température augmente par compression adiabatique selon le taux adiabatique sec.

L'effet de fœhn ne demande pas qu'il y ait de précipitations (pluie) ou de nuages abondants produits du côté en ascendance mais l'effet sera d'autant plus fort que la masse d'air perd de son humidité et en particulier que la couche nuageuse est épaisse en amont de l'obstacle. Dans ce cas, l'air a reçu de la chaleur par la condensation de l'eau, donc l'air est plus chaud et plus sec sur le versant "sous le vent" (flèche rouge) que sur le versant dans le vent (flèche bleue).

Sur la photographie illustrant l'effet de fœhn, on voit clairement à l'arrière le trou de fœhn qui est la bande de ciel bleu. À l'aval du trou de fœhn, on reconnaît parfaitement des altocumulus lenticularis (nuages soufflés) qui sont des marqueurs d'ondes de gravité et des cumulus fractus (petits nuages déchiquetés) qui marquent la présence d'un rotor.

État de la couche atmosphérique en aval de l'obstacle

Diagramme de relevé de données atmosphériques.
Effet de fœhn à Reno.

En aval de l'obstacle, l'air se réchauffe adiabatiquement et s'assèche en descendant et devient moins dense. À titre d'illustration, le sondage atmosphérique ci-contre montre l'état de la couche atmosphérique par un fort vent d'ouest à Reno, cette ville étant située à l'est de la Sierra Nevada. Il apparaît clairement que le gradient de température est égal au gradient de l'adiabatique sèche (9,75 K/km) jusqu'au niveau 630 hPa soit une altitude de 3 700 m. De plus l'air est beaucoup plus sec au sol qu'en altitude ce qui se traduit dans le sondage par un écart plus élevé entre la température de l'air et le point de rosée au niveau du sol. Ce sondage, qui a été effectué au milieu de l'hiver, montre ainsi l'accroissement adiabatique de la température de l'air et son assèchement lorsque celui-ci redescend en aval de la chaîne de montagnes

L'air devient donc plus chaud que la masse d'air environnante et va donc rebondir en altitude comme on le verra plus bas.

Variante

Une variante de ce processus est lorsque l'air provient d'une région source plus en altitude que la région en aval. C'est le cas du vent de Santa Ana qui transporte de l'air sec de l'intérieur des montagnes et descend vers l'océan Pacifique. Il est en partie un foehn et en partie un vent catabatique. Dans ce cas, l'air soulevé n'a pas besoin d'atteindre la saturation et d'obtenir un apport de chaleur latente. La masse d'air soulevée suivra l'adiabatique sèche à la montée comme à la descente de la montagne. Le niveau final étant plus bas que celui de départ, la température finale sera plus élevée. Naturellement, on peut avoir une combinaison des deux effets, soit une différence de niveau entre le départ et l'arrivée ainsi qu'un dégagement de chaleur latente par condensation de la vapeur d'eau.

Une autre variante de ce processus est le heat burst. Une parcelle d'air subsidente sous une virga d'orage s'assèche en descendant. Elle se réchauffe alors suivant l'adiabatique sèche. Si elle est suffisamment puissante, elle va devenir par inertie plus chaude que l'air environnant.

Effets atmosphériques secondaires

Onde de gravité

L'effet de foehn est la première partie de ce qui se passe une fois que l'air est passé de l'autre côté de l'obstacle. En aval, l'air se réchauffe adiabatiquement en descendant et devient moins dense. Lorsque sa température dépasse celle de l'environnement, si cela se produit avant de toucher le sol, la poussée d'Archimède le fait rebondir vers le haut jusqu'à ce que son refroidissement le rende plus froid que l'environnement. Ceci peut produire une alternance de mouvements ascendants et descendants sur de grandes distances en aval des montagnes. En outre apparaissent sous ces ondes orographiques des rotors. Ces mouvements peuvent être associés avec des nuages (cumulus fractus) dans la partie ascendante et de la forte turbulence. Une modélisation correcte du phénomène fait intervenir les équations de la mécanique des fluides en utilisant le gradient de pression, la stabilité de l'air, la friction, la force de Coriolis et la gravité.

Les effets de l'onde de gravité engendrée par le foehn sont appréciés des pilotes de planeur qui peuvent s'élever à de très grandes altitudes. En outre, les mouvement ascendants et descendants dans ces ondes peuvent être très intenses. Il est possible d'avoir des vitesses verticales de 10 m/s. Grâce à ces ascendances, de très longues distances peuvent être parcourues en planeur.

Hydrodynamique et stabilité

Le flux de la masse d'air pourrait être comparé à la circulation d'un liquide. On utilise le nombre de Froude F qui est équivalent au nombre de Mach. Il exprime la relation entre l'énergie cinétique (le carré de la vitesse) et l'énergie potentielle (stabilité et hauteur de la chaîne de montagnes). La valeur critique du nombre de Froude est 1. Dans ce cas, la probabilité d'avoir des ondes orographiques est grande. Si , le flot est bloqué car l'air est trop stable en amont et la parcelle qui remonte la pente ne peut atteindre le sommet. Si , alors l'air s'écoule sans oscillations majeures car il n'est pas assez stable et l'onde produite se disperse en altitude.

Le cas correspond à ce que la FAA enseigne quand elle dit que les ondes de gravité ne peuvent se former que si l'air est stable en amont et au sommet de la montagne. Ce qui se passe peut être plus complexe. Par exemple, à Fayence, il se forme des ondes orographiques par temps de mistral qui sont exploitées par les pilotes de planeur locaux. Dans ces conditions l'air est instable à certaines altitudes et il y a souvent des cumulonimbus sur le Mercantour. L'air peut être stable à bas niveau mais l'instabilité absolue ou conditionnelle peut être atteinte lors du soulèvement de la masse d'air. Ceci peut donner des nuages stratiformes dans la couche stable et des nuages cumuliformes au-dessus de celle-ci.

Les phénomènes deviennent ainsi beaucoup plus complexes. Ainsi, il peut arriver que la condition de puisse être satisfaite pour induire des ondes de gravité en aval des montagnes mais que des cumulonimbus se forment dans la région en amont.

Effets climatiques

L'effet de foehn se rencontre fréquemment sur les montagnes dans les régions côtières. Le versant côté mer est humide, alors que le versant côté terre est plus aride; il est ainsi une des façons de créer une ombre pluviométrique. En Amérique, le versant est des Montagnes Rocheuses ou des Andes est très aride et connait des vents dus au phénomène comme le Chinook et le Zonda. Un cas extrême où le foehn aide à créer une telle ombre est la Vallée de la Mort, coupée de l'influence océanique par la Sierra Nevada, est un désert presque absolu. En Asie, on peut penser au flux de mousson remontant l'Himalaya et inondant le sous-continent indien mais donnant un climat aride au plateau tibétain de l'autre côté des montagnes.

Les vents de type foehn vont souvent apparaître soudainement au sol même si la circulation des vents est favorable à leur présence depuis quelque temps. Cela est dû au fait qu'on peut avoir une couche d'air très froid au sol au pied des montagnes, du côté sous le vent, qui constitue une inversion de température. Le foehn qui descend la pente ne pourra percer cette masse d'air très stable et restera en altitude jusqu'à ce que l'inversion se retire. Ce retrait se produit généralement quand les vents au sol deviennent faibles et parallèles aux montagnes du côté sous le vent. Lorsqu'il atteint le sol, il réchauffe soudainement la région, souvent de manière très spectaculaire. Comme l'air est renouvelé et comprimé en permanence, un régime de foehn peut se traduire par des nuits beaucoup plus chaudes qu'à l'accoutumée, vu que le réchauffement de l'air est lié à un phénomène mécanique. Ainsi, par vent de sud, Grenoble et son agglomération sont parfois soumises à des températures très élevées lors des nuits d'été[1] et plus généralement à des températures excessivement élevées pour la saison.

France

En France métropolitaine, les Cévennes subissent un effet de foehn par circulation d'ouest. À l'ouest de la chaîne, les haut-plateaux sont très humides, alors que les basses vallées de l'Ardèche et du Gard, ainsi que la basse vallée du Rhône sont beaucoup plus arides et ont un climat méditerranéen. On observe aussi un phénomène similaire au nord du Massif central : la Chaîne des Puys provoque également un effet de foehn qui a pour conséquence de réduire considérablement les précipitations dans la plaine de la Limagne (qui a un climat semi-continental d'abri). Ainsi, la moyenne annuelle de précipitations n'est que de 57 cm à Clermont-Ferrand[2] ce qui en fait l'une des villes avec la pluviométrie la plus faible de France. Un phénomène analogue se produit dans les vallées intra-alpines (notamment autour de Grenoble et sur la Savoie). Il en est de même en Haute-Provence. La région de Sierre dans le Valais central, est connue pour être particulièrement sèche, certains auteurs affirmant même que Sierre possède un climat méditerranéen,

Un phénomène similaire de produit sur les versants français et espagnols des Pyrénées. Par vent de sud, il règne une forte chaleur sèche sur l'Aquitaine tandis que par vent du nord un régime similaire au mistral s'établit en Aragon.

De même, l'effet de foehn fait que Colmar, en Alsace, est aussi une ville française assez sèche avec 61 cm de précipitations par an[3].

Effets divers

Début d'incendie par régime de foehn dans les Hautes-Pyrénées
  • Les régions sous les foehns peuvent voir leur température augmenter jusqu'à plus de 30 °C en quelques heures (ex. [4]). Ils sont appelés les « mangeurs de neige », de par leur capacité à faire rapidement fondre le couvert neigeux. Cette capacité est principalement due à leur température, mais la déshydratation de la masse d'air y participe également. Les foehns peuvent aussi favoriser les feux de forêts, y rendant les régions où ils sévissent particulièrement sèches et en attisant les flammes une fois le feu démarré.
  • Les foehns sont bien connus (et redoutés) des alpinistes alors qu'ils ajoutent une difficulté supplémentaire à l'ascension.
  • Une étude de l'université Louis-et-Maximilien de Munich a trouvé une augmentation de 10 % des suicides et accidents lors d'épisodes de foehn en Europe. La mythologie populaire associe également diverses affections allant de la migraine à la psychose avec des vents de ce type dont le Santa Ana qui est appelé le vent du meurtre. Celui qui commet un crime passionnel un jour de foehn en Bavière bénéficiera de circonstances atténuantes, dit-on... Cependant, ces croyances ne sont qu'anecdotiques.
  • Un dicton paysan allemand dit : Kriegt der Knecht vom Föhn einen Wahn, schlachtet er den Wetterhahn (« Un valet d'étable rendu fou par le foehn ira tuer le coq-girouette.»)

Vol à voile

Un effet de fœhn est en général associé à des ondes orographiques. Celles-ci peuvent s'élever très haut (à plus de 15 km) et permettent donc d'atteindre de très grandes altitudes et de parcourir de très grandes distances en planeur.

Différents noms

Selon les régions, ces vents sont connus sous différents noms, notamment :

Références

  1. Guilhem Martin, Grenoble, un climat à part (8e édition), Amazon, , 170 p. (ISBN 978-295455300-9, lire en ligne), p. 41
  2. Météo de la France, p. 226
  3. Météo de la France, p. 239
  4. (fr) « Valeurs remarquables de février en France », Météo-France (consulté le )

Bibliographie

  • McKnight, TL & Hess, Darrel (2000). Foehn/Chinook Winds. dans Physical Geography: A Landscape Appreciation, pp. 132. publié par Prentice Hall, Upper Saddle River, NJ ISBN 0-13-020263-0
  • (fr) [Météo de la `France] Jacques Kessler et André Chambraud, La météo de la France, JClattès, , 312 p. (ISBN 978-2-709-60491-8)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes