Duloxétine

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Duloxétine
Image illustrative de l’article Duloxétine
Identification
Nom UICPA (+)-(S)-N-méthyl-3-(naphtalèn-1-yloxy)-3-(thiophèn-2-yl)propan-1-amine
No CAS 116817-13-1 (racémique)
116539-59-4 S(+)
116539-60-7 R(–)
No ECHA 100.116.825
Code ATC N06AX21
PubChem 60835
SMILES
InChI
Propriétés chimiques
Formule C18H19NOS  [Isomères]
Masse molaire[1] 297,415 ± 0,021 g/mol
C 72,69 %, H 6,44 %, N 4,71 %, O 5,38 %, S 10,78 %,
Données pharmacocinétiques
Biodisponibilité ~ 50 % (32 % à 80 %)
Métabolisme Hépatique (CYP2D6) et (CYP1A2)
Demi-vie d’élim. 12 heures
Excrétion

70 % urines, 20 % selles

Considérations thérapeutiques
Classe thérapeutique Antidépresseur IRSNA
Voie d’administration Orale

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.
Cymbalta 60 mg

La duloxétine, commercialisée dans divers pays sous les noms de Cymbalta, Yentreve, Xeristar ou AriClaim est un antidépresseur inhibiteur de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline. Il est utilisé pour le traitement de l’épisode dépressif majeur, du trouble de l'anxiété généralisée, de la douleur liée à la neuropathie diabétique.

Dans certains pays, il est autorisé dans le traitement de la fibromyalgie et de l'incontinence urinaire d'effort.

La duloxétine a été découverte et brevetée par le laboratoire Eli Lilly.

Histoire[modifier | modifier le code]

La duloxétine a été créée par les chercheurs David Robertson, David Wong (également codécouvreur de la fluoxétine) et Joseph Krushinski, du laboratoire Eli Lilly. La demande de brevet a été déposée en 1986 et le brevet accordé en 1990[2]. La première publication sur la découverte de l'un des deux énantiomères de la duloxétine, connu sous le nom de LY227942, a été faite en 1988[3], mais c'est le second énantiomère (+) LY248686 qui sera choisi pour la suite des études car il inhibait deux fois plus la recapture de sérotonine que l'énantiomère (–).

Après de nombreux tests, en 2001, Eli Lilly présente la duloxétine à la FDA pour le traitement de la dépression, celle-ci ne l'acceptera qu'en 2004 après qu'Eli Lilly eut résolu des problèmes d'hépatotoxicité et d'augmentation de la pression artérielle.

La FDA approuve donc la duloxétine dans le traitement de l’épisode dépressif majeur et de la neuropathie diabétique[4].

En 2007, c'est au tour de Santé Canada d'approuver la duloxétine dans le traitement de l’épisode dépressif majeur et de la neuropathie diabétique[5].

Dans l'Union européenne, la commission a accordé la mise sur le marché de la duloxétine pour l'incontinence urinaire d'effort et de l’épisode dépressif majeur respectivement en août et et en pour le traitement des douleurs périphériques liées à la neuropathie diabétique[6], ce contrairement aux États-Unis où la FDA refusa cette indication et Lilly abandonna cette demande sur le marché américain un an plus tard[7].

Le , la FDA accorde une autorisation à la duloxétine pour le traitement de la fibromyalgie[8]. La commission d'AMM européenne donne en un avis défavorable à cette indication parce que l'efficacité de ce psychotrope n'était pas solidement démontrée[9]. Quatre essais, indépendants du Laboratoire Lilly, n'auraient pas permis d'améliorer l'état des patients souffrant de fibromyalgie[10].

Pharmacologie[modifier | modifier le code]

La duloxétine inhibe les transporteurs de sérotonine et de noradrénaline augmentant celles-ci dans la fente synaptique. La duloxétine augmente la dopamine (DA) spécifiquement dans le cortex préfrontal où il y a peu de pompes de recapture de la DA mais en agissant comme inhibiteur de la recapture de pompes de la noradrénaline qui ont une plus grande affinité pour la dopamine que pour la noradrénaline. Cela permet une plus grande diffusion de la DA dans le cerveau[11]. Cependant, la duloxétine n'a pas d'effet significatif pour les récepteurs de la recapture dopaminergiques, de l'adrénaline, cholinergiques, histaminergiques, opioïdes, glutamatergiques, et les transporteurs de la recapture du GABA et peuvent par conséquent être considérés comme des récepteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline. La duloxétine subit un métabolisme assez complet mais ses métabolites ne semblent pas avoir d'effets pharmacologiques[12],[13].

Indications[modifier | modifier le code]

La duloxétine est homologuée et indiquée dans le traitement :

Depuis le , Eli Lilly est en cours de test pour l'approbation de la duloxétine dans le syndrome de fatigue chronique[14].

Efficacité[modifier | modifier le code]

Les études évaluant l'efficacité de la duloxétine dans l'anxiété généralisée démontrent une amélioration du critère d'analyse (échelle d'anxiété d'Hamilton) mais cette amélioration est d'une pertinence clinique douteuse[15].

La revue Prescrire rapporte dès 2009 à propos du cymbalta que ce psychotrope est à éviter, quelle que soit la situation[16].

La duloxétine est utilisée depuis mai 2012 dans le traitement de la laxophobie.[réf. nécessaire]

Dans une méta-analyse chez un millier de patients dépressifs sévères et souffrant de fibromyalgie, l'effet de la molécule sur les douleurs fibromyalgiques semble indépendante de l'effet sur le syndrome dépressif[17].

Dans la neuropathie périphérique diabétique[18] ou post-chimiothérapique[19], elle réduit les douleurs comparativement au placebo (le placebo n'est pas le traitement de référence de ces pathologies). Elle a été testée dans l'arthrose du genou avec une amélioration de la douleur et de l'usage de l'articulation face au placebo avec pour corollaire une augmentation notable des effets secondaires et des arrêts de traitement[20] (le placebo n'étant pas le traitement de référence de cette pathologie).

D'après la Commission de la Transparence française, en l'absence de données comparatives, la duloxétine n'apporte pas d'amélioration de service médical rendu (ASMR V = absence de données comparatives) dans la dépression et dans le trouble anxieux généralisé par rapport aux autres traitements plus anciens[21], mais elle qualifie son efficacité d'importante. D'après la revue Prescrire, la balance bénéfice-risque de la duloxétine est défavorable dans ces deux indications[22]. C'est également le cas dans l'indication sur l'incontinence urinaire[23].

Contre-indications[modifier | modifier le code]

La duloxétine ne doit pas être utilisée en cas :

  • d'allergie à la duloxétine ;
  • glaucome à angle fermé.

Elle peut aussi interagir négativement avec la mirtazapine.

Dans le cas où il existe des dysfonctions sexuelles (désir sexuel hypoactif, anorgasmie, trouble de l'excitation...) antérieures à l'apparition d'un état dépressif, une autre molécule devra être préférée[24].

Interactions[modifier | modifier le code]

La duloxétine est un inhibiteur du cytochrome P4502D6, influençant les concentrations de l'ensemble des médicaments concernés par ce cytochrome[25]. Il augmente également l'efficacité des antivitamines K avec un risque de surdosage[26].

La duloxétine ne doit pas être utilisée avec des substances à actions sérotoninergiques (augmentant la sérotonine dans le cerveau) comme les antidépresseurs (tricycliques, ISRS, IRSNA, IMAO), le millepertuis, les suppléments en 5-HTP, la Rhodiola rosea, la Griffonia (toutes ces associations pouvant conduire à un syndrome sérotoninergique).

Elle ne doit pas non plus être utilisée avec la thioridazine.

Effets secondaires[modifier | modifier le code]

Dans deux études cliniques où les patients prenaient 60 mg de duloxétine par jour, portant sur le trouble dépressif majeur, les manifestations indésirables les plus souvent observées étaient par rapport au placebo : nausée (20 % contre 7 %), sécheresse de la bouche (15 % contre 6 %), constipation (11 % contre 4 %), diminution de l’appétit (8 % contre 2 %), fatigue (8 % contre 4 %), somnolence (7 % contre 3 %) et augmentation de la sudation (6 % contre 2 %).

Depuis 2006, la revue Prescrire, indique « trop d'effets indésirables » à propos de cette substance[27].

121 effets indésirables ont été répertoriés par l'association NEPTUNE [28].

Le taux d’abandon global dû aux manifestations indésirables pour la duloxétine comparativement au placebo était de 10 % contre 4 %. La nausée était la seule manifestation indésirable courante mentionnée comme raison d’abandon du traitement et considérée comme étant causée par le médicament (1,4 % contre 0,1 %)[29].

La libération excessive de dopamine induirait une réaction exagérée au stress (Voir article Doctissimo) provoquant des pertes de mémoire (oubli d'objets et manque de discernement) occasionnant encore plus de stress.

Sevrage[modifier | modifier le code]

L'arrêt d'un IRSNA nécessite une diminution progressive de la dose prescrite pour éviter un syndrome de sevrage qui a lieu lorsque l'arrêt est net, les symptômes de ce sevrage seraient alors de l'irritabilité, des étourdissements ou de la paresthésie.

Marché[modifier | modifier le code]

Il s'agit du cinquième médicament le plus vendu aux États-Unis, en termes de valeur, en 2013, avec un chiffre d'affaires dépassant les 4 milliards de dollars[31].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  2. Dépôt de brevet
  3. LY227942, un inhibiteur de la sérotonine et de la noradrénaline, potentiel futur antidépresseur
  4. La FDA approuve la duloxétine dans le traitement des douleurs neuropathiques liées au diabète
  5. « Santé Canada approuve la duloxétine en tant qu'antidépresseur et analgésique »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) (consulté le )
  6. La commission européenne autorise la mise sur le marché de la duloxétine pour le traitement de la dépression majeure, de l'incontinence urinaire et des douleurs neuropathiques périphériques du diabétique
  7. Lilly abandonne le marché US pour l'indication d'incontinence urinaire d'effort pour sa duloxétine
  8. La FDA approuve l'utilisation de la duloxétine dans le traitement de la fibromyalgie
  9. Rédaction Prescrire « Duloxétine :refus d'AMM dans la fibromyalgie, tant mieux ! » Rev Prescrire 2009;29 (303):15
  10. Rédaction prescrire « Duloxétine : à éviter aussi dans la fibromyalgie » Rev Prescrire 2008;28(300):730
  11. Stahl, S. (2013). Stahl's essential pharmacology, 4th ed. Cambridge University Press, New York. p. 305, 308, 309.
  12. SM Stahl et Grady, Moret, Briley, « SNRIs: their pharmacology, clinical efficacy, and tolerability in comparison with other classes of antidepressants », CNS Spectrums, vol. 10, no 9,‎ , p. 732–747 (PMID 16142213)
  13. FP Bymaster et Lee, Knadler, « The dual transporter inhibitor duloxetine: a review of its preclinical pharmacology, pharmacokinetic profile, and clinical results in depression », Curr Pharm Des, vol. 11, no 12,‎ , p. 1475–93 (PMID 15892657, DOI 10.2174/1381612053764805)
  14. Eli Lilly étudie la duloxétine dans le traitement du syndrome de fatigue chronique
  15. Prescrire rédaction « duloxétine : Dans l'anxiété généralisée non plus » Rev Prescrire 2009;29(303):9
  16. "Duloxétine (Cymbalta°)" Rev Prescrire 2009 ; 29 (303) : 9.
  17. Marangell LB, Clauw DJ, Choy E, et al. Comparative pain and mood effects in patients with comorbid fibromyalgia and major depressive disorder: secondary analyses of four pooled randomized controlled trials of duloxetine, Pain, 2011;152:31-37
  18. Wernicke JF, Pritchett YL, D’Souza DN et al. A randomized controlled trial of duloxetine in diabetic peripheral neuropathic pain, Neurology, 2006;67:1411-1420
  19. Lavoie Smith EM, Pang H, Cirrincione C et al. Effect of duloxetine on pain, function, and quality of life among patients with chemotherapy-induced painful peripheral neuropathy, JAMA, 2013;309:1359-1367
  20. Chappell AS, Desaiah D, Liu-Seifert H et al. A double-blind, randomized, placebo-controlled study of the efficacy and safety of duloxetine for the treatment of chronic pain due to osteoarthritis of the knee, Pain Pract, 2011;11:33-41
  21. Commission de la Transparence, Avis du 14 mars 2007 http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_523247/cymbalta
  22. a b c et d Revue Prescrire « Duloxétine : bilan après trois ans » Rev Prescrire 2009;29(303):22
  23. Maund E, Guski L, Peter C. Gøtzsche, Considering benefits and harms of duloxetine for treatment of stress urinary incontinence: a meta-analysis of clinical study reports, CMAJ, 2016
  24. Sutherland JE, Sutherland SJ, Hoehns JD, « Achieving the best outcome in treatment of depression », Journal of Family Practice, vol. 52, no 3,‎ , p. 201–09 (PMID 12620174, lire en ligne)
  25. Skinner MH, Kuan HY, Pan A et al. Duloxetine is both an inhibitor and a substrate of cytochrome P4502D6 in healthy volunteers, Clin Pharmacol Ther, 2003;73:170-177
  26. Glueck CJ, Khalil Q, Winiarska M, Wang P, Interaction of duloxetine and warfarin causing severe elevation of international normalized ratio, JAMA, 2006;295:1517-1518
  27. « prescrire.org », sur www.prescrire.org (consulté le )
  28. « cymbalta-duloxetine-effets-secondaires-ou-indesirables-sevrage »
  29. études cliniques et données des effets secondaires de la duloxétine par rapport à un placebo
  30. a b et c « Plans de gestion des risques (Afssaps) »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) (consulté le )
  31. Top 100 Drugs for 2013 by Sales