Demodex folliculorum

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Demodex folliculorum est une espèce d'acariens vermiformes de la famille des Demodecidae. Il s'agit de l'une des deux espèces du genre Demodex vivant dans les follicules pileux des humains, l'autre étant D. brevis. À l'état adulte, il est long de 0,3 à 0,4 mm. Transmis de la mère à l'enfant, il vit dans les pores de la peau du visage et n'en sort que pour se reproduire de nuit.

D. folliculorum n'est généralement pas dangereux ; si sa surabondance a été associée à des pathologies telle la rosacée[1],[2], rien ne prouve qu'elle en serait la cause[3].

Selon une étude de 2022, la relation exclusive avec son hôte le conduit à un appauvrissement génétique tel qu'il pourrait évoluer du statut de parasite externe obligatoire vers, à terme, un état d'endosymbiote obligatoire[3].

Description[modifier | modifier le code]

Mesurant environ 0,3 millimètre, ce type d'acarien possède un corps vermiforme[4]. Son opisthosome est strié transversalement et occupe les deux tiers de l'individu. Quatre courtes paires de pattes, assez trapues, sont clairement visibles. Il n'y a ni soies, ni griffes visibles.

Les femelles sont un peu plus courtes et plus rondes que les mâles et deviennent adultes en 28 jours. L'adulte mâle vit deux mois et la femelle, trois mois[5].

Le nombre de cellules est maximal au dernier stade de développement (nymphe), puis décroit à l'état adulte[3]. D. folliculorum ne peut pas se protéger des ultraviolets et se cache dans les pores de la peau pendant la journée[3]. Il ne produit plus sa propre mélatonine et utiliserait celle de son hôte[3].

Contrairement à ce qui avait été supposé, cet acarien dispose bien d'un anus[6].

Répartition[modifier | modifier le code]

La répartition de D. folliculorum correspond à celle de son hôte, Homo sapiens. Il vit dans les follicules pileux de ces derniers, sur le visage et autres parties du corps[7]. On estime qu'un visage humain peut abriter jusqu'à plusieurs millions de spécimens[8],[9].

Évolution[modifier | modifier le code]

Des analyses moléculaires suggèrent que le genre Demodex a divergé il y a au moins 87 millions d'années[10].

Écologie[modifier | modifier le code]

Demodex folliculorum

D. folliculorum, tout comme D. brevis, est fréquemment trouvé dans les follicules pileux d'humains en bonne santé, en particulier ceux des sourcils, où il se nourrit de sébum.

Des études ont relevé une association entre son abondance et certaines pathologies de la peau. Bien que les premières observations remontent à près de 200 ans, la nature de cette association ne fait toujours pas l'objet d'un consensus[11],[12]. Des résultats récents suggèrent que D. folliculorum serait normalement commensal, voire symbiote, mais pourrait devenir parasite sous certaines conditions de l'hôte[13].

Infectiologie[modifier | modifier le code]

Prévalence[modifier | modifier le code]

Tout être humain peut être colonisé par D. folliculorum, à l'exception des nouveau-nés, puisque la colonisation (par contact) se fait après la naissance. D. folliculorum a été trouvé dans toutes les populations humaines étudiées[14]. La prévalence de D. folliculorum n'est pas bien comprise. Selon les études, elle varie de 3 % à 100 % des individus[15]. Cette variation pourrait être en partie expliquée par la méthode d'échantillonnage, l'âge des individus échantillonnés et les régions du corps sur lesquelles les échantillons ont été prélevés[11].

Par ailleurs, une étude récente portant sur Demodex canis, associé aux chiens, a montré que plusieurs échantillons pris en différents points du corps sont nécessaires pour détecter l'acarien chez les individus en bonne santé, chez lesquels on le retrouve en petites populations[16].

Rosacée[modifier | modifier le code]

Selon le chercheur Kevin Kavanagh de l’université nationale d’Irlande, des acariens de type Demodex folliculorum qui se nourrissent de sébum et colonisent le visage dès la puberté peuvent être liés à la présence de rosacée, notamment lors de périodes de stress[17]. La présence de cet acarien serait donc plus un accélérateur du phénomène que la cause réelle[18].

Selon le professeur Didier Raoult de la faculté de médecine La Timone à Marseille[19], « les patients atteints d'acné rosacée ont plus de Demodex et ces derniers portent plus de bactéries que les spécimens retrouvés sur des individus sains ». Selon le site du Dictionnaire Vidal, l'ivermectine est présenté, dans le cas d'inflammation trop importante, comme un moyen d'éliminer les Demodex[20].

Blépharite[modifier | modifier le code]

Dans le cas de blépharite chronique, qui consiste en une inflammation répétée des paupières, l’infestation par l'acarien Demodex est généralement évoquée, leur rôle pathologique ne faisant cependant pas l'unanimité car d'autres agents infectieux sont également évoqués[21].

Applications[modifier | modifier le code]

Le généticien évolutionniste américain Michael F. Palopoli et ses collègues ont récemment étudié la diversité génétique de D. folliculorum recueillis sur 70 humains d'origines diverses. Leurs résultats suggèrent qu'il est possible de faire correspondre les divergences génétiques de l'acarien à la provenance géographique de son hôte, ce qui pourrait éventuellement permettre de mieux comprendre l'histoire des migrations humaines[22].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Jarmuda S, O'Reilly N, Zaba R, Jakubowicz O, Szkaradkiewicz A, Kavanagh K, « The potential role of Demodex folliculorum mites and bacteria in the induction of rosacea », J Med Microbiol,‎ (DOI 10.1099/jmm.0.048090-0, lire en ligne).
  2. (en) Casas C, Paul C, Lahfa M, Livideanu B, Lejeune O, Alvarez-Georges S, Saint-Martory C, Degouy A, Mengeaud V, Ginisty H, Durbise E, Schmitt AM, Redoulès D, « Quantification of Demodex folliculorum by PCR in rosacea and its relationship to skin innate immune activation », Exp Dermatol, vol. 21, no 12,‎ , p. 906-10. (PMID 23171449, DOI 10.1111/exd.12030) modifier.
  3. a b c d et e (en) Gilbert Smith, Alejandro Manzano-Marín, Mariana Reyes-Prieto, Cátia Sofia Ribeiro Antunes, Victoria Ashworth, Obed Nanjul Goselle, Abdulhalem Abdulsamad A Jan, Andrés Moya, Amparo Latorre, M Alejandra Perotti, Henk R Braig, « Human Follicular Mites: Ectoparasites Becoming Symbionts », Molecular Biology and Evolution, OUP, vol. 39, no 6,‎ (ISSN 0737-4038 et 1537-1719, OCLC 439813139, DOI 10.1093/MOLBEV/MSAC125)Voir et modifier les données sur Wikidata.
  4. Site sciencesetavenir.fr, article d'Hugo Jalinière, consulté le 22 avril 2020.
  5. site biomnis, page sur le Demodex folliculorum, consulté le 22 avril 2020.
  6. (en) « y », sur oup.com, .
  7. (en) T. Rufli et Y. Mumcuoglu, « The hair follicle mites Demodex folliculorum and Demodex brevis: biology and medical importance », Dermatologica, vol. 162, no 1,‎ , p. 1-11 (lire en ligne).
  8. Site "maxisciences.com", article d'Emmanuel Perrin, "Les Demodex, ces millions d'acariens qui vivent sur votre visage", consulté le 22 avril 2020
  9. site ladepeche.fr, article "Les Demodex, ces acariens qui vivent en permanence sur notre visage", consulté le 22 avril 2020.
  10. (en) Michael F. Palopoli, Samuel Minot, Dorothy Pei, Alicia Satterly et Julie Endrizzi, « Complete mitochondrial genomes of the human follicle mites Demodex brevis and D. folliculorum: novel gene arrangement, truncated tRNA genes, and ancient divergence between species », BMC Genomics, vol. 15, no 1124,‎ (DOI 10.1186/1471-2164-15-1124, lire en ligne).
  11. a et b (en) Elizabeth Bonnar, Peter Eustache et Frank C. Powell, « Demodex mite in normal skin », The Lancet, vol. 337, no 8750,‎ , p. 1168 (lire en ligne).
  12. Carine Gautier, Françoise Botterel et Patrice Bourée, « Le Demodex: commensal ou pathogène ? », Revue Française de Laboratoires, no 329,‎ , p. 23-25 (lire en ligne).
  13. (en) Noreen Lacey, Síona Ní Raghallaigh et Frank C. Powell, « Demodex mites - Commensals, parasites or mutualistic organisms? », Dermatology, vol. 222,‎ , p. 128-130 (DOI 10.1159/000323009, lire en ligne).
  14. (en) Clifford E. Desch, « Human hair follicle mites and forensic acarology », Experimental & Applied Acarology, vol. 49, nos 1-2,‎ , p. 143-146 (DOI 10.1007/s10493-009-9272-0, lire en ligne).
  15. (en) Megan S. Thoemmes, Daniel J. Fergus, Julie Urban, Michelle Trautwein et Robert R. Dunn, « Ubiquity and diversity of human-associated Demodex mites », PloS one, vol. 9, no 8,‎ , e106265 (DOI 10.1371/journal.pone.0106265, lire en ligne).
  16. (en) Iván Ravera, Laura Altet, Olga Francino, Armand Sánchez, Wendy Roldán, Sergio Villanueva, Mar Bardagi et Lluís Ferrer, « Small Demodex populations colonize most parts of the skin of healthy dogs », Veterinary Dermatology, vol. 24, no 1,‎ , p. 168-e37 (DOI 10.1111/j.1365-3164.2012.01099.x, lire en ligne).
  17. Site gurumed.org, page "Voici Demodex Folliculorum, il crapahute sur votre visage et ses excréments provoqueraient la couperose.", consulté le 22 avril 2020
  18. Site rosaceahelp.ca, page « les causes de la rosacée », consulté le 22 avril 2020.
  19. Site lefigaro.fr, article de Tristan Vay "Nous avons tous des acariens sur le visage", consulté le 22 avril 2020
  20. site vidal.fr page sur l'ivermectine, consulté le 22 avril 2020.
  21. Site dr-fauquier-ophtalmologiste.fr, page "Les blépharites infectieuses Diagnostic et prise en charge", consulté le 22 avril 2020.
  22. (en) Michael F. Palopoli, Daniel J. Fergus, Samuel Minot, Dorothy T. Pei, W. Brian Simison, Iria Fernandez-Silva, Megan S. Thoemmes, Robert R. Dunn et Michelle Trautwein, « Global divergence of the human follicle mite Demodex folliculorum : Persistent associations between host ancestry and mite lineages », Proceedings of the National Academy of Sciences,‎ (DOI 10.1073/pnas.1512609112, lire en ligne).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Références taxinomiques[modifier | modifier le code]