Conte

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Un troll par John Bauer

Le mot conte désigne à la fois un récit de faits ou d'aventures imaginaires[1] et le genre littéraire (avant tout oral) qui relate les dits récits. Le conte, en tant qu'histoire, peut être court ou long. Qu'il vise à distraire ou à édifier, il porte en lui une force émotionnelle ou philosophique puissante. Depuis la Renaissance, les contes font l'objet de réécritures, donnant naissance au fil des siècles à un genre écrit à part entière. Cependant, il est distinct du roman, de la nouvelle et du récit d'aventures par l'acceptation de l'invraisemblance.

Il y a deux pratiques du genre littéraire qu'est le conte : orale et écrite. Ces deux pratiques se différenciant par leur mode de création et de diffusion comme par leur contenu, il convient de les distinguer.

Le conte est un objet littéraire difficile à définir étant donné son caractère hybride et polymorphe. Le genre littéraire comme les histoires elles-mêmes font l'objet d'études convoquant des savoirs connexes, à la lumière des sciences humaines, tels que l'histoire littéraire, la sémiologie, la sociologie, l'anthropologie ou la psychanalyse.

Il faut noter que le terme de « conte » est utilisé parfois pour désigner l'activité de conter, quel que soit le type d'histoires (épopée, légende, histoire de vie, nouvelle…).

Histoire d'un terme difficile à cerner

Origine du terme « conte »

Étymologiquement « conte » vient du latin computare qui signifie « dénombrer », « tenir une liste »[2]. Traditionnellement, le conte est un récit qui se transmet au fil du temps par le biais de l'oralité.

Mythe, légende et conte : liens et divergences

Le conte est intemporel (de tous les temps) et universel (s'adresse à tous les humains quels qu'ils soient et où qu'ils soient) : "il était une fois.. dans un pays loin d'ici ... ". Le conte s'adresse aux humains de tout âge de façon générale mais certains contes peuvent faire écho à des problématiques propres à un âge de vie (ex: Jean de l'ours: puberté du garçon) ou à certains événements de la vie et ainsi peuvent s'adresser préférentiellement à une catégorie de personne. Mais depuis déjà le XVIIe siècle les contes ont été utilisés pour agrémenter ou renforcer l'éducation des enfants, en leur faisant porter un message éducatif ou moral. Cette dimension est contraire à l'essence du conte populaire traditionnel. Mais de nos jours, pour beaucoup, "conte" est synonyme de gentille historiette pour les enfants

Le conte merveilleux se déroule dans un univers où l'invraisemblable est accepté, où le surnaturel s'ajoute au monde réel sans lui porter atteinte. Les personnages jouent des rôles bien définis et leurs aventures se terminent généralement bien.

Le conte fantastique s'attache d'abord à plonger le lecteur dans un univers qui ressemble en tous points au réel: un univers dont les lieux, les personnages et les actions sont décrits avec un souci de vraisemblance. Le surnaturel fait une irruption dans le réel, ce qui peut provoquer un malaise, voire de la peur chez l'auditeur ou le lecteur.

La fable est une histoire porteuse d'un message ou d'une recommandation, morale ou sociale. Cette dimension est étrangère à celle du conte qui touche à la profondeur des êtres humains.

Le mythe est une histoire inventée pour répondre aux questions que se pose l'être humain sur ses origines et sur celles du monde, pour expliquer des phénomènes naturels comme l'apparition de l'eau sur la Terre[3]. Le mythe fait presque toujours intervenir des êtres divins: il constitue alors une croyance d'une communauté, d'un peuple.

La légende est une histoire dans laquelle les actions, les lieux ou les personnages se rattachent à des faits historiques connus, mais qui ont été déformés, amplifiés, embellis par l'imagination. Souvent, la légende s'apparente au mythe, car elle tente d'expliquer un phénomène naturel. À la différence du mythe, la légende ne repose pas sur les divinités quoique beaucoup de légendes, en occident catholique, fassent intervenir le pouvoir de saints : par exemple, on trouve en Bretagne de nombreuses fontaines guérisseuses dont les vertus sont attribuées à des saints locaux.

Un terme, deux réalités littéraires : conte oral / conte écrit

Le conte oral ou conte populaire

Le conte oral est aussi souvent appelé conte populaire par les ethnologues et historiens(ennes)[4] en raison de l'aspect traditionnel et communautaire qui a longtemps régi la création et la circulation de ces histoires et de l'importance qu'il a revêtue dans l'émergence des nationalismes au XIXe siècle[5] (référence à la notion de « peuple »).

Ce type de récit fait partie de la famille de la littérature orale. Celle-ci englobe aussi l'épopée, la saga, le mythe, la devinette, le cas, la légende, le proverbe, la comptine, le mémorat, la fable, la légende urbaine etc.

Le conte est un genre narratif, contrairement à la devinette, au proverbe ou à la comptine. Il est aussi délibérément fictif, contrairement à la légende, la saga et le mémorat qui se présentent comme véridiques. Contrairement au mythe, le conte de tradition orale a pour cadre narratif principal le monde des hommes, avec son environnement animal végétal et minéral, même si, notamment dans le cas du conte merveilleux, ce monde est souvent en contact avec l'autre monde, celui des morts, des esprits, du petit peuple ou des dieux.

Comment est construit le conte merveilleux ?

Comme les autres types de contes, le merveilleux peut commencer par une formule introductive, propre à chaque conteur (exemple : « Il était une fois »).

Les contes merveilleux ont une structure typique :

  • Situation de départ : Personnage (héros), son environnement.
  • L'élément déclencheur (élément perturbateur) : il arrive quelque chose qui va provoquer un blocage, une situation désespérée.
  • Les épreuves que le héros doit traverser (les péripéties) : le héros va devoir affronter des situations difficiles, dangereuses et plus ou moins fantastiques.
  • La solution (élément de résolution) : Le héros est vainqueur des épreuves qu'il traverse successivement.
  • La situation finale : les prouesses du héros, son courage, son abnégation, etc. sont venus à bout du blocage de la situation désespérée initiale, tout rentre dans l'ordre. « Tout est bien qui finit bien ». Le conte merveilleux finit bien car, en réalité, après un parcours à travers le chaos, il faut que l'ordre cosmique soit restauré.

Un nouvel art du spectacle ?

Associée généralement aux arts oratoires et du spectacle[6], cette discipline artistique semble paradoxale. Alors qu'elle est vraisemblablement l'une des plus vieilles formes d'expression de l'histoire de l'humanité, elle semble très jeune en tant que pratique artistique formelle. En effet, ce n'est que depuis la seconde moitié du XXe siècle qu'elle intéresse les théoriciens de l'art et cherche à se structurer au même titre qu'une autre discipline artistique. Depuis les années 1970 et le mouvement du renouveau du conte, le terme de conte est de plus en plus utilisé pour désigner l'art de raconter des histoires à un auditoire.

Le conte en tant que genre écrit

Illustration de Gustave Doré pour Le Chat botté

Nombre de ces contes véhiculés par le bouche à oreille ont fait l'objet, depuis la Renaissance, de collectes et de réécritures par des écrivains. Ces démarches figent ces histoires dans une version donnée, et les transforment en objets appartenant au domaine de la littérature écrite. Cela amène les écrivains à se détacher peu à peu des sujets, des structures et des thèmes des contes oraux dont ils s'inspirent.

Le conte littéraire est alors un récit court (contrairement au roman ou à l'épopée), dans lequel les actions sont racontées (et non représentées comme au théâtre).

Selon Vial, on peut qualifier de conte « tout récit qui atteste de la part de l'écrivain l'intention d'isoler dans la multitude des traits qui constituent un événement ou le destin d'une personne, un élément et de déblayer au profit de cet élément unique. »[7]

Le terme de conte littéraire n'est donc pas synonyme de conte de fées ou de littérature exclusivement enfantine, contrairement à ce que son caractère volontiers fantaisiste et invraisemblable laisse souvent penser.

Cette forme littéraire peut adopter des contenus très diversifiés ; elle ne vise pas nécessairement à émerveiller le lecteur, mais peut également vouloir l'édifier (conte moral, allégorique), l'effrayer (conte d'horreur), l'amuser (conte satirique), etc.

Centres des Contes et Légendes

Bibliographie

Monographies

  • Bruno de La Salle, Le murmure des contes, En collaboration avec Henri Gougaud, Édition Desclée Brouwer, 2002
  • Bruno de La Salle, Plaidoyer pour les Arts de la parole, Éditions CLiO, 2004
  • B. de La Salle, M. Jolivet, H. Touati, F.Cransac, Pourquoi faut-il raconter des histoires ? 1er tome, Éditions Autrement, 2005
  • B. De la Salle, M. Jolivet, H. Touati, F. Cransac, Pourquoi faut-il raconter des histoires ? 2e tome, Éditions Autrement, 2006
  • Bruno de La Salle, Le Conteur amoureux, Nouvelle édition augmentée, Éditions du Rocher, 2007
  • Nicoles Belmont, Poétique du conte (essai sur le conte de tradition orale), Gallimard
  • Nicole Belmont et Michel Izard, édition fr. du Rameau d'or (1911-1915) de James Frazer, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1984
  • René-Lucien Rousseau, L'envers des contes. Valeur initiatique et pensée secrète des contes de fées, Saint-Jean-de-Braye : Dangles, 1991, 239 p.
  • Vladimir Propp, Morphologie du Conte, Points-Seuil, Paris
  • Bruno Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, Gallimard, Paris
  • Marie-Louise Von Franz (collaboratrice de Carl Gustav Jung), L'interprétation des contes de fées, La fontaine de Pierre, Paris
  • Pierre Péju, La petite fille dans la forêt des contes. Pour une poétique du conte : en réponse aux interprétations psychanalytiques et formalistes.
  • Jean-Claude Bouvier, Contes de l'écrit - contes de l'oral : l'opposition est-elle pertinente ?, Publications de l'université de Provence, Aix-en-Provence, 2003 (ISBN 978-2-85399-524-5)
  • Michel Hindenoch, Conter, un art ?, Éditions La Loupiote
  • Jeanne Demers, Le Conte - Du mythe à la légende urbaine. Québec Amérique, Coll. « En Question ».
  • Luda Schnitzer, Ce que disent les contes, Éd. du Sorbier, 1985 (ISBN 978-2-7320-0010-7)
  • Fabien Vehlmann et Frantz Duchazeau, Les cinq conteurs de Bagdad, Dargaud, Coll. "Long courrier" 1996 (ISBN 978-2-205-05779-9)
  • Jihad Darwiche, Le conte oriental,la tradition orale au Liban, Éd.Édisud, Coll. "L'espace du conte" 2001, (ISBN 2-7449-0246-2)

Articles

  • Pierre Gamarra, « De la théorie et de l'art du conte » in Europe, avril 1984, numéro 660, p. 187-191

Revues consacrées au conte

  • La grande oreille : ateliers de littérature orale. Sous la dir. de Claude Lecouteux. Paris : Maison de la Parole, 1999-.
  • Cahiers de littérature orale

Notes et références

  1. Deuxième sens du mot conte, Petit Robert, 1967
  2. Littré, le dictionnaire de la langue française.
  3. Voir aussi Conte étiologique. Ce type de contes fournit des réponses inventées à des questions plus anecdotiques que celles du mythe, par exemple : pourquoi tel oiseau a-t-il tel chant, tel plumage ou telle habitude.
  4. Bernadette Bricout, article « conte » dans Universalis, version électronique 7
  5. Anne-Marie Thiesse, La construction des identités nationales. Paris: Seuil, 2001.
  6. Soazig Hernandez, Le Monde du conte, Paris, L’Harmattan, La Librairie des humanités, 2006, p. 226
  7. (A. Vial, Maupassant et Vart du roman, Nizet, Paris, 1954, p. 480.)
  8. Quentin Pourbaix, « Des chimères et un projet : contes et légendes auront bientôt un centre dédié. », La voix du Nord,‎ (lire en ligne)

Voir aussi

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Articles connexes

Liens externes