Concile d'Éphèse

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 26 septembre 2014 à 10:00 et modifiée en dernier par 213.44.114.4 (discuter). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.

Le concile d'Éphèse, troisième concile œcuménique de l'histoire du christianisme, est convoqué en 430 par l'empereur romain de Constantinople Théodose II. Le concile condamne le 22 juin 431 le nestorianisme comme hérésie, et anathématise et dépose Nestorius comme « hérésiarque ». À l'inverse des conciles de Nicée (325) et de Constantinople (381) dont les questions théologiques portaient principalement sur l'unicité de Dieu, le concile d'Éphèse marque un tournant dans le dogme en définissant l'union hypostatique des deux natures, humaine et divine, du Christ. Le concile d’Éphèse marque donc pour l’Église l'explicitation et de la proclamation du Christ homme et Dieu.

Les origines du concile d'Éphèse

Le concile, réunit par l'empereur à la demande de Nestorius, patriarche de Constantinople, a pour objectif de réconcilier l’Église suite à la polémique autour du titre "Theotokos" « mère de Dieu » donné par la ferveur populaire à Marie. Nestorius proposait en effet d'utiliser plutôt "Christotokos" « mère du Christ » qui lui semble d'avantage en ligne avec les écritures. Pour Nestorius, la Vierge Marie est seulement la mère de l'homme Jésus. Ce faisant il introduisait une subtile dissociation (dite hypostatique) entre le caractère divin (Jésus fils coéternel de Dieu) et le caractère humain (Jésus de Nazareth fils de Marie) du Christ.

Fin 428, Nestorius écrit à l'évêque de Rome Célestin Ier pour appuyer sa thèse, malheureusement il lui écrit en grec et pas en latin.

A Pâques 429, Cyrille, Patriarche d'Alexandrie, attaque les thèses de Nestorius dans ses homélies et dans une Lettre aux moines. Durant l'été 429 il s'adresse directement à Nestorius (Deuxième Lettre de Cyrille à Nestorius). Puis il fait porter à Rome, par le diacre nommé Posidonius, un dossier christologique traduit en latin avec la mission d'accuser Nestorius d'adoptianiste, c'est-à-dire quelqu'un qui conçoit Jésus-Christ comme un homme que Dieu aurait adopté. Le moine Jean Cassien, moine d'origine orientale installé à Marseille et bon connaisseur de l'Orient, rédige un Traité de l'Incarnation. Contre Nestorius  en sept livres. Sur ces bases, un synode régional se tient à Rome début août 430, condamne Nestorius et exige une rétractation dans les dix jours.

Nestorius tente de se défendre et réussit à convaincre l'empereur de convoquer un concile œcuménique le 19 novembre 430. Il sollicite également l'appui de Jean d'Antioche, André de Samosate et Théodoret de Cyr.

Simultanément Cyrille réunit de son côté un synode régional à Alexandrie qui condamne à nouveau Nestorius. Il lui adresse une troisième lettre contenant 12 anathèmes.

Le déroulement du concile d'Éphèse

Le concile a été convoqué pour la Pentecôte, soit le 7 juin 431. Les lettres de convocation sont adressées à tous les évêques métropolitains de l'Empire d'Orient et à quelques évêques occidentaux.

Seuls, Nestorius, accompagné d'une cinquantaine d’évêques et Cyrille, à la tête d'une délégation de onze évêques arrivent à Ephèse dans les délais. La quinzaine d'évêques de Palestine n'arrivera que le 12 juin sous la conduite de Juvénal de Jérusalem. Jean, patriarche d'Antioche et ses 68 évêques partisans de Nestorius, bloqués par le mauvais temps n'arrivent que le 26 juin. Les légats romains le 10 juillet seulement.

Memnon, l’évêque d’Éphèse, est un ardent partisan de Cyrille, au point qu'il faudra accorder à Nestorius un protection militaire, par crainte de la dévotion excessive des moines d’Éphèse.

Dès le lendemain de la date fixée pour l'ouverture des débats, et malgré les retards, Cyrille décide d'ouvrir le concile sans plus attendre et contre l'avis de Candidien, délégué impérial.

Le concile s'ouvre donc le , Nestorius, patriarche de Constantinople, accompagné de seize évêques fait face à Cyrille d'Alexandrie et ses cinquante épiscopes.

La décision de condamner Nestorius est prise le jour même et Nestorius est déposé.

Le 26 juin, arrivent les 68 évêques orientaux entourant Jean d'Antioche, qui, trouvant le concile déjà commencé et Nestorius déposé, se réunissent, furieux, et organisent un "contre-concile" (conciliabule), par lequel ils entendent "excommunier" Cyrille, Memnon, évêque d’Éphèse et leurs partisans, et annuler les décisions conciliaires déjà prises.

Le 29 juin, Théodose fait annuler les décisions du 22 juin.

Le 10 juillet, arrivent enfin les légats romains Arcadius et Profectus et le prêtre Philippe, délégués par le pape Célestin Ierqui soutiennent aussitôt Cyrille.

Le 11 juillet, les légats pontificaux valident, au nom du pape, les décisions du 22 juin puis ils déposent Jean d'Antioche, Théodoret de Cyr et une trentaine d’évêques.

Le 22 août, Théodose ordonne la fin et la dissolution du concile[1].

Une autre hérésie est abordée durant le concile d'Éphèse : le pélagianisme et le concile condamne le pélagien Célestius.

Les canons du concile œcuménique d’Éphèse

Concile d’Éphèse de 431, mosaïque de Notre-Dame de Fourvière

Canon 1. Des métropolitains sectateurs de Nestorius et de Célestius.

Comme il fallait que les évêques qui n'ont pas assisté au concile, mais sont restés dans leur territoire ne soient pas sans savoir ce qui a été décidé, nous faisons savoir à votre sainteté, que :

Le métropolitain qui abandonne ce saint et œcuménique concile, pour entrer dans l'assemblée des apostats ou qui y entrera à l'avenir; ou celui qui a partagé les opinions de Célestius ou les partagera à l'avenir, celui-là perd toute juridiction sur les évêques de la province, et est déjà exclu de toute communion et déclaré suspens par le concile. Les évêques de sa province et les métropolitains voisins qui sont orthodoxes doivent veiller à ce qu'ils soit entièrement dépossédé du rang d'évêque.

Canon 2. Des évêques qui rejoignent ceux de Nestorius.

Si d'autre part certains évêques suffragants n'ont pas assisté au saint concile et ont passé à l'apostasie, ou bien cherchent à y passer, ou bien, après avoir signé la déposition de Nestorius, sont ensuite retournés à l'assemblée des apostats, ceux-là suivant la sentence du saint concile, sont exclus du sacerdoce et déchus de leur rang.

Canon 3. Des clercs déposés par Nestorius à cause de leur orthodoxie.

Si dans une ville ou une campagne quelconque des clercs ont été déposés par Nestorius ou ses partisans, à cause de leurs sentiments orthodoxes, nous avons jugé qu'à juste titre ils doivent être réintégrés dans leurs fonctions. En règle générale nous ordonnons que les clercs, qui reçoivent ce concile orthodoxe et œcuménique ou le recevront maintenant ou après, en quelque temps que ce soit ne doivent être subordonnés en aucune manière et à aucun moment aux évêques qui ont apostasié ou qui apostasieront ou qui vont à l'encontre des saints canons et de la vraie foi.

Canon 4. Des clercs sectateurs de Nestorius.

Si certains clercs apostasient et osent prendre parti, secrètement ou publiquement, pour Nestorius, ils sont eux aussi déposés par ce saint concile.

Canon 5. Des clercs condamnés à des peines ecclésiastiques, absous par Nestorius.

Quant à ceux qui ont été condamnés pour des actions coupables par un saint synode ou par leurs propres évêques, et auxquels Nestorius, agissant contre les canons, avec l'indifférence qui le caractérise, ou bien ses partisans ont cherché ou chercheront à rendre la communion ou leur rang, nous avons jugé qu'ils ne doivent retirer aucun profit de ce fait et n'en demeureront pas moins déposés.

Canon 6. De ceux qui enfreignent les décisions du concile.

De même, au sujet de tous ceux qui voudraient renverser d'une manière quelconque les décisions du saint concile à propos d'un chacun, le concile décide que, s'ils sont évêques ou clercs, ils perdront entièrement leur rang, et s'ils sont laïcs, ils seront excommuniés.

Canon 7. Acclamation contre ceux qui altèrent la foi de Nicée.

Le saint concile a décidé qu'il ne sera pas permis de produire en public, d'écrire ou de composer un symbole de foi autre que celui défini par les saints pères réunis à Nicée sous la conduite du saint Esprit. Ceux qui oseront composer un autre symbole, le répandre, ou le présenter à ceux qui veulent se convertir et reconnaître la vérité, venant du paganisme, du judaïsme ou de n'importe quelle hérésie, ceux-là, s'ils sont évêques ou clercs, seront dépouillés, les évêques de l'épiscopat et les clercs de la cléricature; s'ils sont laïcs, ils seront anathématisés. De même, si des évêques, des clercs ou des laïcs étaient convaincus d'admettre ou d'enseigner la doctrine contenue dans l'exposé du prêtre Charisius, au sujet de l'incarnation du Fils unique de Dieu, ou bien encore les enseignements impurs et pervers de Nestorius qui y sont adjoints, qu'ils tombent sous le coup de la sentence de ce saint et œcuménique concile, c. à d. que le évêque soit dépouillé de son épiscopat et soit déposé, et le clerc pareillement soit déchu de la cléricature, et si c'est un laïc, qu'il soit anathématisé, comme il a été dit plus haut.

Canon 8. Vœu concernant les évêques de Chypre, qu'ils élisent à eux seuls aux sièges vacants de leur île.

Un fait, qui est une innovation contraire aux coutumes ecclésiastique et une atteinte a la liberté de tous nous a été rapporté par Réginus, l'évêque très aimé de Dieu, et ses compagnons, les très pieux évêques Zénon et Evagre, de la province de Chypre. C'est pourquoi, comme le mal commun a besoin d'une remède d'autant plus fort que sa nuisance est plus grande, vu qu'aucune coutume n'a existé jusqu'ici que l'évêque de la ville d'Antioche sacre des évêques à Chypre, ainsi que les très pieux hommes qui ont eu recours au saint concile nous le prouvèrent par leurs rapports et de vive voix, les chefs des saintes églises de Dieu en Chypre resteront sans être inquiétés ni exposés à la violence, si, observant les canons des saints et vénérés pères, ils procèdent par eux-mêmes, selon l'ancienne coutume, à l'élection des très pieux évêques. Cette même règle sera aussi observée dans les autres diocèses et dans toutes les provinces, en sorte qu'aucun des évêques aimés de Dieu ne s'empare d'une autre province, qui ne fût déjà et dès le début sous son autorité ou sous celle de ses prédécesseurs; et s'il s'en était emparé et par force se la fût assujettie, il la rendra, afin que les canons des pères ne soient pas enfreints, ni que sous le prétexte d'actes sacrés ne s'insinue l'orgueil de la puissance mondaine et que sans nous en rendre compte nous perdions peu à peu la liberté, que nous a donnée par son propre Sang Jésus Christ notre Seigneur, le Libérateur de tous les hommes. Il a été donc décidé par le saint concile œcuménique que soient sauvegardés à chaque province purs et inviolés les droits acquis déjà et dès le début selon l'usage établi depuis toujours et le métropolitain sera autorisé de prendre copie conforme de notre décision pour garantir ainsi la sécurité de sa province. Si quelqu'un produisait une ordonnance opposée à la définition présente, le saint et œcuménique concile tout entier décide que cette ordonnance sera nulle et non avenue.

Postérité du concile

Le Concile est à l'origine de la rupture des relations ecclésiastiques entre Antioche et Alexandrie durant plusieurs années, jusqu'à la réconciliation entre Jean, patriarche d'Antioche, et Cyrille patriarche d'Alexandrie en 433.

L’Église de Perse, qui n'était pas représentée au concile d’Éphèse, refusa les conclusions du concile et se plaça ainsi dans une position schismatique, la première en Orient à se séparer de l'Église de Rome.

Le pape Célestin Ier ratifia et promulgua en 432 les actes du concile œcuménique d'Éphèse, et donna à Cyrille d'Alexandrie le titre de "Défenseur de l’Église". D'un point de vue théologique, le concile d'Éphèse, précise et proclame la doctrine de l'union hypostatique des deux natures (humaine et divine) dans l'unique personne (ou hypostase) de Jésus-Christ, union fondée sur le mystère de l'Incarnation du Fils de Dieu ayant pris chair de la Vierge Marie, dans le sein de laquelle le Verbe éternel a assumé la nature humaine de manière ineffable et indicible, selon la parole évangélique : "Et le Verbe s'est fait chair et il a demeuré parmi nous." (Jn 1,14). C'est en vertu de cette même union hypostatique que la Vierge est donc véritablement appelée Mère de Dieu (Theotokos). Les Douze Chapitres formulés par Cyrille d'Alexandrie dans sa dernière lettre à Nestorius seront joints aux actes canoniques du concile.

Après 440, une hérésie nouvelle, le monophysisme d'Eutychès confondra les deux natures dans le Christ, humaine et divine, considérant l'humaine comme seulement une "apparence", en réalité absorbée par la divine. Ce qui amènera la convocation du concile de Chalcédoine, en 451, qui sera le 4e concile œcuménique. Ce concile proclamera que l'union hypostatique dans la personne du Christ n'entraîne pas pour autant la confusion des deux natures, ni l'absorption d'une nature par l'autre, définissant cela en une formule désormais célèbre : dans le Christ "vrai homme et vrai Dieu", les deux natures humaine et divine sont "sans confusion, sans mutation, sans division, sans séparation".

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Jean Huscenot, Les docteurs de l'Église, Mediaspaul Éditions, (ISBN 9782712206444, présentation en ligne)