Chaussure à orteils

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Chaussures à orteils
Une paire de chaussures à orteils Vibram
Une paire de chaussures à orteils Vibram

La chaussure à orteils (ou chaussure à orteils séparés) est un type de chaussure légère, appelé aussi Gant de pied[1], nu pieds[2], cinq orteils[2], ou encore qualifié de « baskets-gants à mi-chemin entre chaussette et seconde peau »[3] et faisant partie de la famille des chaussures dites minimalistes.

Description[modifier | modifier le code]

La chaussure à orteils est une chaussure légère et peu structurée, avec une semelle souple et fine. Elle est composée d'une pointe divisée en 5 compartiments afin d'envelopper séparément chaque orteil[1], de la même façon qu'un gant enveloppe chaque doigt de la main. La chaussure destinée à la course minimaliste est composée de caoutchouc type élastomère (semelle), de polyamide (dessus de la chaussure) et de microfibre anti-microbienne[1] (semelle intérieure), mais il existe des modèles fabriqués dans d'autres matériaux tels que le silicone[4]. Ce type de chaussure est utilisé, notamment pour la course à pied minimaliste (Il peut être aussi utilisé pour d'autres sports, tels le yoga, le surf, les arts martiaux), grâce à une semelle très fine, il permet de retrouver les sensations de marche et de course à pied pieds-nus[5]. La chaussure est déclinée en multiples modèles par les fabricants.

Origines[modifier | modifier le code]

Inventée[6] en 1999[7] par Robert Fliri, un étudiant en design italien du Val Venosta[8] qui « voulait trouver un moyen de mieux se déplacer dans la nature »[9],[10],[11], la chaussure à orteils a été développée en 2005 avant d'être présentée pour la première fois, la même année[12], par le fabricant italien Vibram et commercialisée sous le nom de Vibram FiveFingers ou 5doigts en langue française. Ciblant initialement les yachteurs[13],[14], elles se sont révélées inadaptées à cet usage[15].

Usages[modifier | modifier le code]

Elle est utilisée notamment dans les activités suivantes :

  • Jogging
  • Randonnée
  • Yoga ou Pilates
  • Arts martiaux
  • Surf
  • Kayak

Santé et orthopédie[modifier | modifier le code]

Caractéristiques orthopédiques pour la course à pied[modifier | modifier le code]

Les arguments orthopédiques en faveur de la chaussure à orteils sont liés à des thèses scientifiques sur la posture de la foulée[16], dont celle de David Lieberman[17], qui cherchent à atteindre, pour le coureur, l'objectif d'une course qualifiée de plus physiologique en défendant le principe de la course à pied pieds-nus[2]. Ces thèses sont construites à partir de la critique du concept de fabrication des chaussures de course conventionnelles[2], en soutenant que celles-ci sont équipées d'un renfort au talon qui impose une position du pied qui ne serait pas naturelle et qui endommagerait les structures squelettiques[2]. Ces thèses n'ont pas atteint le consensus au sein de la communauté scientifique[2]. Paradoxalement l'argument des dommages au squelette a été également utilisé par les opposants à la course pieds-nus[2]. Certains spécialistes ont avancé que si les chaussures à orteils améliorent la sensation du sol, par ailleurs elles font courir des risques de blessure plus importants[18] et ne conviendraient qu'à des coureurs « bio-mécaniquement parfaits »[19],[20],[21]. Selon une étude commandée en 2011 par l'American Council on Exercise, l'intérêt de ce genre de chaussures dépendrait du style de course[22]. Les spécialistes orthopédistes craignent pour ses utilisateurs des risques de lésions (fractures de fatigue, entorses de cheville ou tendinites achilléennes)[2], mais il est difficile de tirer des conclusions rigoureusement scientifiques quant à la responsabilité de ce type de chaussures dans les lésions du pied, du fait du caractère pluri-paramétrique de la formation de ces lésions[2],[23].

Les bienfaits supposés pour la santé[modifier | modifier le code]

Présente dans l'argumentaire publicitaire des marques de sport[2], l'affirmation du bienfait pour la santé qu'apporterait l'utilisation des chaussures à orteils est loin d'avoir été corroborée par la communauté scientifique de façon unanime[2]. La question a été posée à la justice américaine à travers un recours collectif de consommateurs lancé en mars 2012 dans l'État du Massachusetts, puis en Californie et dans l'Illinois[24], à l'encontre de la société Vibram USA Inc, considérant qu'il y avait publicité mensongère lorsque l'entreprise prétendait que ses modèles de chaussures à orteils réduisaient les risques de blessures et renforçaient les muscles du pied[24]. Le recours a été initié par une acheteuse de chaussures à orteils Vibram, Valérie Bedzek, dont la plainte contestait la véracité de l'argumentaire publicitaire de Vibram USA Inc. sur des bienfaits pour la santé de leur produit[25]. Valérie Bedzek jugeait qu'elle n'aurait jamais acheté ce type de chaussures sans cet argumentaire qui aurait permis à Vibram USA Inc. de fixer un niveau de prix de vente supérieur à celui des chaussures de course conventionnelles présentes sur le marché et d'en tirer une plus-value indue à l'aide de faux arguments[25].[pertinence contestée] Tout en niant toute faute ou responsabilité de leur part[24], la société Vibram USA Inc a accepté un accord de résolution de conflit (en) avec la partie adverse[24] où elle s'est engagée à consacrer une somme de 3,75 millions de dollars américains en vue d'un dédommagement de ses clients[26],[27] et à renoncer à son argumentaire publicitaire sur les bienfaits pour la santé de son produit tant que la société n'aura pas les moyens de prouver scientifiquement ses assertions[24].

Avantages supposés[modifier | modifier le code]

Elle posséderait les avantages suivants[28] :

  • meilleure mobilité des orteils,
  • rétablissement d'une foulée naturelle sans courir sur les talons[29],
  • renforcement des muscles des pieds et des jambes,
  • amélioration de l'équilibre, de la posture et de l'agilité[30].
  • Meilleure proprioception[1]

Inconvénients supposés[modifier | modifier le code]

  • Perte de l'effet syndactylie obtenu grâce à l'enveloppe commune des orteils. La fractures ou luxation d'un orteil peut ainsi survenir lors de contraintes mécaniques plus faibles[réf. nécessaire].

Situation commerciale[modifier | modifier le code]

Le succès commercial des chaussures à orteils s'appuie sur la mode de la course pieds-nus qui fut popularisée par les champions olympiques Herb Elliott et Abebe Bikila en 1960, ou encore par des figures telles que Michael Randall Hickman surnommé « El Caballo blanco », un coureur de longue distance empli d'une spiritualité et d'une philosophie[31] qui inspira le personnage du livre, écrit en 2009 par Christopher McDougall[32],[33], [34], Born to Run [13], devenu en quelques années « La Bible » inspiratrice de la course pieds-nus qui a popularisé ce mode de course auprès d'un large public.

Les chaussures à orteils ont été expérimentées pour la première fois dès l'année 2006, lors du Marathon de Boston[2] et proposées, la même année, aux coureurs[réf. souhaitée], à l'initiative du coureur américain Ted "barefoot" McDonald[13]. Elles ont été adoptées par des praticiens du yoga[35] et des arts martiaux[36]. Ces chaussures font l'objet d'un engouement aux États-Unis[37] qualifié d'« insatiable »[38]. Les ventes de chaussures à orteils de la marque inventrice Vibram sont passées de 470 000 $ en 2006 à 50 000 000 $ en 2010[12].

Aujourd'hui la société pionnière n'est plus le fabricant exclusif dans le monde de ce type de chaussures[23]. À la suite du succès rencontré par ce produit parmi les consommateurs, d'autres fabricants ont développé des produits concurrents, tels que Feelmax[39],[40], de Terraplana[40],[39],[41], Nike[42], Adidas[43], Merrell[44], New Balance[21] et Fila, dont le modèle Skele-toes a fait l'objet d'un dépôt de plainte pour imitation par Vibram[45]. Une étude de la revue spécialisée Runner's world considère qu'une douzaine de marques devaient ainsi se disputer en 2011 le segment de marché de ces chaussures « minimalistes », qui représentait alors 2 % du total de celui des chaussures de course, avec une prévision de croissance à deux chiffres pour 2011[46]. En 2012 le marché de la chaussure à orteils était toujours qualifié de « micro-marché peu mature »[23] mais avec une évaluation des ventes par les spécialistes qui avaient augmenté au point de représenter 10 % de l'ensemble des ventes de la chaussure de course[2],[23], avec un marché représentant 25 milliards de dollars aux États-Unis[2]. L'armée américaine en a par ailleurs interdit l'usage aux militaires à l'entraînement, au motif de la préservation d'une « image militaire professionnelle »[47].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c et d Nordine Attab, Gants de pieds, courir pieds nus ou presque, chronique sport de l'émission Allô docteurs! du 13 septembre 2010 sur France 5, consulté le 21 juin 2014
  2. a b c d e f g h i j k l m et n Charles Msika, « Les chaussures à cinq doigts de pied gagnent du terrain », Le Quotidien du médecin,‎ (lire en ligne)
  3. Arnaud Vaulerin, « Ça mue des pieds », Libération,‎ (lire en ligne)
  4. (en)Tom Caughlan, « Inov-8 Evoskin Review », iRunFar.com,‎ (lire en ligne)
  5. (en)Cindy Crawford, « Natural running; why some are running barefoot », San Diego Running Fitness Examiner,‎ (lire en ligne)
  6. (en) Footwear having independently articuable toe portions
  7. (en) « The story of the five fingers », Bodyconsciousdesign, (consulté le )
  8. (de) Südtiroler Wochenmagazin, 1997
  9. (en)Lou Dziernak, « Barefoot your Soul », SGB,‎ (ISSN 1548-7407)
  10. (en) « Vibram FiveFingers shoes », Steve van Dulken, (consulté le )
  11. (en) John Vonhof, Fixing Your Feet: Prevention and Treatments for Athletes, Wilderness press, (ISBN 9780899976389, lire en ligne), p. 85-86
  12. a et b (en)« Bare facts; Running fads », The Economist,‎
  13. a b et c (en) Christopher McDougall, Born to Run: A Hidden Tribe, Superathletes, and the Greatest Race the World Has Never Seen, Profile Books, (ISBN 9781861978776, lire en ligne), p. 165
  14. (en)John Ewold, « Protect your feet at the beach, in the boat or at the mall with shoes designed for water and land but with more support than a water sock. », Star Tribune,‎
  15. (en)Hilary Nelson, « Barefoot; After a little sole searching, I'm ready to trade my high-tech running shoes for the feel of earth beneath my feet », Concord Monitor,‎
  16. (en)Laura Casey, « Barefoot running gains a following », Seattle Times,‎ (lire en ligne)
  17. (en) « Foot strike patterns and collision forces in HABITUALLY barefoot versus shod runners »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) (consulté le )
  18. (en)Bethany English, « Form, not footwear, crucial for runners », Columbus Dispatch,‎ (lire en ligne)
  19. (en)Cynthia Billhattz Gregorian, « If the shoe fits ... it still may help your feet », Tribune Business news,‎
  20. (en)Amy Cortese, « Wiggling Their Toes at the Shoe Giants », New York Times,‎ (lire en ligne)
  21. a et b (en)Andrew Adam Newman, « Appealing to Runners, Even the Barefoot Brigade », New York Times,‎ (lire en ligne)
  22. (en)« American Council on Exercise Evaluates Benefits of Vibram FiveFingers Shoes for Barefoot Runners », Kcentv,‎ (lire en ligne)
  23. a b c et d Yannick Cochennec, « Barefoot: les minimalistes de la course à pied tracent leur route », Slate,‎ (lire en ligne)
  24. a b c d et e (en) Matt McCue, « Vibram Agrees to Settle Class Action Lawsuit », Runnerswolrd,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  25. a et b (en)Matt McCue, « TheVibram Lawsuit,explained », Runnerswolrd,‎ (lire en ligne).
  26. Lenny Bernstein, « People who bought these Vibram FiveFinger shoes may be entitled to a refund », Washington Post, (consulté le )
  27. Site internet ordonné par la justice américaine pour informer les consommateurs du jugement du recours collectif contre la société Vibram USA Inc.
  28. « Émission 'C'est le pied'" France 4 », sur Youtube, (consulté le ).
  29. (en) « Barefoot Running: How Humans Ran Comfortably and Safely Before the Invention of Shoes », sur ScienceDaily, (consulté le ).
  30. 5 raisons de porter des FiveFingers
  31. Nathalie Lamoureux, « Les Tarahumaras, super-athlètes et fêtards de l'extrême », Le point,‎ (lire en ligne)
  32. (en)Marianne Takacs, « Going ape for 'gorilla' footwear; Five Fingers shoes designed to mimic barefoot experience », Toronto Star,‎ (ISSN 0319-0781)
  33. (en)Jen Murphy, « Aping the Early Human Workout », Wall Street Journal,‎ (lire en ligne)
  34. Christopher McDougall, « Sommes_nous nés pour courir? » [vidéo], Ted conférences, (consulté le )
  35. (en)Dan Synge, « Kitted Out. Dan Synge on the latest yoga gear », The Daily Telegraph,‎
  36. (en)Sam Whiting, « FiveFingers foot gloves a runaway hit », San francisco Chronicle,‎ (lire en ligne)
  37. (en)Frederick E. Allen, « Names You Need to Know in 2011: FiveFingers », Forbes,‎ (lire en ligne)
  38. (en) Sally Edwards, Carl Foster et Roy Wallack, Be a Better Runner: Real World, Scientifically-proven Running Concepts and Techniques that Will Dramatically Improve Your Speed, Endurance, and Injury Resistance, Fair Winds, (ISBN 9781592334247, lire en ligne), p. 150
  39. a et b (en)Gary T. Pakulski, « 5-toed athletic shoes have fans, critics », The Blade,‎
  40. a et b (en)Cindy Crawford, « Barefoot running; minimalist shoes to get you there », San Diego Running Fitness Examiner,‎ 200` (lire en ligne)
  41. (en)Coeli Carr, « The Cobbler's Child », Time Magazine,‎ (lire en ligne)
  42. (en)Allan Brettman, « Nike launched 'natural movement' shoes, FiveFingers ran away with it », The Oregonian,‎
  43. (en)Vicky Hallet, « These little piggies worked out », Washington Post,‎ (ISSN 0190-8286, lire en ligne)
  44. (en)Hilary MacGregor, « Nearly Naked », Los Angeles Times,‎ (lire en ligne)
  45. (en)Chris Reidy, « FiveFingers shoe maker sues rival », Boston Globe,‎ (ISSN 0743-1791)
  46. (en)Bob Parks, « Is Less More? », Runner's World,‎ (lire en ligne)
  47. (en)Jason Ukman, « Army bans use of ‘toe shoes,’ citing image concerns », Washington Post,‎ (lire en ligne)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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