Cèpe

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Cèpe
Nom vulgaire ou nom vernaculaire ambigu :
l'appellation « Cèpe » s'applique en français à plusieurs taxons distincts.
chrisanteron
Cèpe de Bordeaux (Boletus edulis)

Taxons concernés

Plusieurs espèces dans les genres suivants

Au sens strict :

Au sens large :

Cèpe est un nom vernaculaire ambigu en français, pouvant désigner plusieurs espèces différentes de champignons. Officiellement ce terme ne doit désigner que les espèces de Boletus au sens strict, mais, par utilisation populaire et abus de langage, ce terme englobe dans son sens large beaucoup plus d'espèces. Ces espèces au sens large sont principalement des bolets, comestibles[1], généralement au pied obèse orné d'un réseau et dont les pores blancs deviennent jaunâtres avec l'âge[2]. Cependant l'ambiguité de ce terme lorsqu'il est utilisé en dehors de son sens strict peut aussi désigner des bolets ne partageant pas ces caractéristiques.

Le sens strict du nom Cèpe ne compte que 4 espèces, appelées les "Cèpes royaux" : Le Cèpe de Bordeaux (Boletus edulis), le Cèpe bronzé (Boletus aereus), le Cèpe d'été (Boletus reticulatus) et le Cèpe des pins (Boletus pinophilus). À noter le fait que tous les Cèpes sont des bolets, mais que tous les bolets ne sont pas des Cèpes. Il existe plus d'une centaines d'espèces de bolets en France. Seulement quatre d'entre elles, celles citées ci-dessus, sont officiellement des Cèpes (en plus donc d'être déja des bolets). Le Cèpe, selon cette définition et les caractéristiques communes de ces quatre espèces, est un bolet au pied typiquement obèse, orné d'un fin réseau blanc, à la chair ferme, immuable (ne changeant pas de couleur à la coupe), aux pores blanches jaunissant avec l'âge et à la comestibilité excellente.

Étymologie et histoire[modifier | modifier le code]

Cèpe est un mot de genre masculin qui vient du latin cippus, via l'occitan gascon cep qui signifie tronc (le « cep » de vigne a la même origine)[3].

Le mot cèpe fait son entrée dans le Dictionnaire de l'Académie française avec la 6e édition de 1832-1835 qui définit ces champignons comme étant pour la plupart bons à manger et plus particulièrement des bolets comestibles. La 8e édition (1932-1935) de ce même dictionnaire réduit cette définition aux seuls « champignons très charnus » et considère les cèpes comme synonymes de « bolets comestibles »[4].

Le Trésor de la Langue Française (1971-1994) considère seulement le cèpe comme synonyme de bolet comestible[5].

Noms français et scientifiques correspondants[modifier | modifier le code]

Noms normalisés[modifier | modifier le code]

Liste alphabétique des noms normalisés qui sont recommandés par le Comité pour les noms français des champignons de la Société mycologique de France (SMF)[6]. Selon l'autorité mycologique, le terme de "Cèpe" ne revient qu'aux espèces du genre Boletus au sens strict, c'est à dire uniquement ces quatre espèces, qui sont, en Europe, les seules et uniques espèces de Cèpes :

Ces quatre espèces étant donc les seules pour lesquelles le nom de "Cèpe" revient de droit et officiellement, on appliquera également ce terme pour les formes (ou variétés) de ces espèces. Certaines d'entre elles étaient autrefois considérées comme des espèces de Boletus sensu stricto à part entière, ce qui leur a donné l'occasion d'obtenir un nom vernaculaire durant ce statut d'espèce. Mais aujourd'hui, elles sont rattachées en tant que formes d'une des quatre espèces de Cèpes mentionnées ci-dessus. Toutefois, leur nom vernaculaire leur est resté, ce qui résulte en ces cas particuliers de formes d'espèces nommées, auxquelles on n'accorde pas normalement de nom vernaculaire. À part cela, ces quatres Cèpes ont également d'autres formes sans noms vernaculaires qui ne sont pas listées ici (voir la partie "variété et formes" pour chacun des quatre Cèpes).

Formes avec un nom vernaculaire de Boletus edulis :

Formes avec un nom vernaculaire de Boletus aereus :

Confusions fréquentes et possibles[modifier | modifier le code]

Le malfamé Bolet Satan (Rubroboletus satanas)

Ces Cèpes, nottament Boletus edulis, sont parmi les espèces de champignons sauvages les plus ramassées et recherchées. Cependant, étant des espèces populaires dites faciles à identifier, même pour les néophytes, elles peuvent tout de même être confondues avec d'autres espèces de bolets de valeur gustative égale, moindre, non comestibles ou même immangeables, rarement toxique. Si les cueilleurs de Cèpes semblent être au courant de l'existence du Bolet Satan (Rubroboletus satanas) et craignent la confusion avec ce dernier, cette confusion est finalement improbable, rien que par les critères morphologiques du Bolet Satan ; un pied aux teintes rouges, un chapeau blanc et une chair bleuissante, on fera aisément la différence entre cette espèce (rare, qui plus est) et les Cèpes. Cette espèce, diabolisée par les cueilleurs de Cèpes et la culture populaire, ne fait pas cas d'un très grand danger de confusion vu cette grande différence, mais plutôt d'une mauvaise réputation en tant que l'espèce de bolet toxique la plus connue. Elle n'est cependant pas la seule espèce de bolet toxique en France, on en dénombre une douzaine, principalement les espèces du genre Rubroboletus et Imperator.

Si la confusion avec ces espèces toxiques est difficile, les Cèpes sont plus fréquemment confondus avec d'autres espèces de bolets par les cueilleurs. Ces espèces de bolets en question, ressemblant morphologiquement bien plus aux Cèpes, ne sont pas toutes toxiques mais sont pour une certaine partie simplement de moindre valeur culinaire que les Cèpes. Elles sont généralement moins connues du public, surtout pour les cueilleurs inexpérimentés, ce qui entraine communément des confusions entre ces dernières et les Cèpes, bien que ces confusions soient généralement bénignes. Parmi ces bolets ressemblants aux Cèpes et entraînant des confusions, on notera :

Noms divers non-officiels[modifier | modifier le code]

Liste alphabétique des noms vernaculaires ou des noms vulgaires, non retenus par la SMF, dont l’usage est attesté[10]. L'appellation de ces espèces en tant que "Cèpe" relève d'un abus de langage, les utilisateurs synonymisant le mot Cèpe avec le mot bolet.
Note : Cette liste est variable selon les usages. Certaines espèces peuvent avoir plusieurs noms et, les classifications évoluant encore, les noms scientifiques ont peut-être un autre synonyme valide.

Voir aussi "Faux cèpe" - Le Bolet amer (Tylopilus felleus).

Commerce des cèpes[modifier | modifier le code]

Marchandes de cèpes à Pau (Pyrénées). Peinture d'Édouard Pingret de 1834.

Cèpes de France[modifier | modifier le code]

Nomenclature commerciale[modifier | modifier le code]

En France, seules deux espèces ont droit légalement[12] à l'appellation commerciale de « cèpe » : le Cèpe de Bordeaux (Boletus edulis) et le Cèpe bronzé (Boletus aereus)[8].

Mais on trouve en réalité sur le marché deux autres espèces commercialisées sous ce nom : le Cèpe d'été ou cèpe réticulé (Boletus aestivalis, syn. Boletus reticulatus) et le Cèpe des pins ou Cèpe de montagne (Boletus pinophilus, syn. Boletus pinicola)[8].

Un gros champignon brun au pied renflé.
Cèpe bronzé (Boletus aereus).

Ce sont des bolets appartenant au genre Boletus et à la section edules (en classification classique). Tous sont d'excellents comestibles qui se distinguent des autres bolets par leur chair très ferme qui reste toujours blanche.

  • Cèpe de Bordeaux (Boletus edulis) : Le plus célèbre et le plus répandu, il pousse dans les forêts. La couleur du chapeau varie selon les variétés et l'arbre auquel le champignon est associé, mais il est le plus souvent noisette. Les tubes et les pores sont blancs au départ, puis virent au jaune clair et enfin au verdâtre. Le pied, presque rond chez les exemplaires jeunes (bouchons de champagne), est trapu, en forme de massue. Il est de couleur légèrement ocracée, orné à son sommet d'un fin réseau blanc qui se prolonge plus ou moins vers le bas, les mailles du réseau s'élargissant. La chair a l'odeur et la saveur de la noisette.
  • Cèpe bronzé (Boletus aereus) : Espèce méditerranéenne associée au chêne-vert. Le chapeau est plus noir que chez le précédent, le pied plus coloré, la chair plus ferme, l'odeur et la saveur plus fortes.
  • Cèpe d'été (Boletus reticulatus) : Comme son nom l'indique, sa saison de prédilection est la fin du printemps et le début de l'été. On le rencontre surtout dans les forêts de feuillus.
  • Cèpe des pins ou Cèpe des pins de montagne[13] (Boletus pinophilus) : associé aux conifères (pin sylvestre notamment) ou aux feuillus d'altitude. Son chapeau est brun-rouge, assez sombre. Le pied a à peu près la même couleur, mais en plus pâle.
Un monceau de cèpes séchés à Borgotaro au festival des porcini, Italie.

Estimation du tonnage[modifier | modifier le code]

Les cèpes peuvent varier considérablement en taille. Une estimation de 1998 suggère la consommation annuelle totale mondiale de Boletus edulis et des espèces étroitement apparentées, Boletus aereus, Boletus pinophilus et Boletus reticulatus se situerait entre 20 000 et 100 000 tonnes[14]. Selon les chiffres officiels, environ 2 700 à 3 000 tonnes ont été vendues en France, en Italie et en Allemagne en 1988. La quantité réelle doit dépasser largement ces chiffres car il ne tient pas compte des ventes informelles ou de la consommation des récolteurs occasionnels[15]. Ils sont largement exportés et vendus sous forme séchée, proposés dans des pays où ils n'existent pas naturellement, comme l'Australie et la Nouvelle-Zélande. La communauté autonome de Castille et León en Espagne produit de 7 700 à 8 500 tonnes par an[16]. À l'automne, le prix de cèpes dans l'hémisphère Nord se situe généralement entre 20  et 80  le kilogramme selon la qualité, mais à New York en 1997, la rareté a fait grimper le prix de gros à près de 200  le kilogramme[15].

Cèpes séchés italiens[modifier | modifier le code]

Dans les environs de Borgotaro dans la province de Parme d'Italie du Nord, les quatre espèces de Boletus edulis, Boletus aereus, Boletus aestivalis et Boletus pinophilus ont été reconnues pour leur goût supérieur et officiellement appelé Fungo di Borgotaro. Ces champignons, collectés depuis des siècles, sont exportés commercialement. Cependant, en raison des tendances récentes dans la mondialisation du commerce des champignons, la plupart des cèpes commercialement disponibles en Italie ou exportés par l'Italie ne sont plus originaires d'Italie. Ces cèpes et autres champignons sont importés en Italie en provenance de divers endroits, en particulier de Chine et des pays d'Europe de l'Est. Ces derniers sont ensuite souvent réexportés sous le label Cèpes à l'italienne[17],[18].

IGP Fungo di Borgotaro[modifier | modifier le code]

Il existe une appellation d’origine contrôlée européenne (IGP) pour les cèpes, il s’agit du « Fungo di Borgotaro (it) » qui distingue les cèpes de la région de Borgo Val di Taro en Italie qui se situe dans le Haut Val Taro près de Parme.

Baisse de la qualité[modifier | modifier le code]

En Italie, la déconnexion avec la production locale a eu un effet négatif sur la qualité, par exemple, dans les années 1990, certains des porcini séchés exportés vers l'Italie de la Chine contenait des bolets amers (Tylopilus felleus), semblables en apparence, et une fois sec, presque impossible pour les cuisiniers ou les mycologues de les distinguer des Boletus. Les Tylopilus felleus ont généralement un goût très amer. Cette amertume est transmise à la saveur du cèpe avec lequel ils sont mélangés.

Après la chute du rideau de fer et des barrières économiques et politiques qui ont suivi, tant centrale qu'orientale, les pays européens où les traditions locales de récolte de champignons, comme l'Albanie, Bulgarie, Macédoine, Roumanie, Serbie et Slovénie, se sont instaurés exportateurs de cèpes, se concentrant principalement sur le marché italien[19]. Cèpes et autres champignons sauvages sont également destinés à la France, à l'Allemagne et aux autres marchés d'Europe occidentale, où la demande existe, mais la collecte à l'échelle commerciale fonctionne mal[19]. Toutefois, la cueillette de Boletus edulis est devenue une source de revenu saisonnier et un passe-temps dans des pays comme la Bulgarie, en particulier pour de nombreux Roms et les communautés de chômeurs. Malheureusement, un manque de contrôle conduit à une forte exploitation de cette ressource de champignons[20].

Commerce[modifier | modifier le code]

La France, en 2014, est importatrice nette de cèpes, d'après les douanes françaises. Le prix à la tonne à l'import était d'environ 14 000 [21].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Meyer C., ed. sc., 2009, Dictionnaire des Sciences Animales. consulter en ligne. Montpellier, France, Cirad.
  2. Jean-Marie Polese, Champignons de France, Éditions Artémis, , p. 148.
  3. Centre National de Ressources textuelles et Lexicales : étymologie de Cèpe.
  4. Cèpe dans le Dictionnaire de l'Académie française, sur Atilf.
  5. Cèpe dans le TLFi, issu du Trésor de la Langue Française (1971-1994). Sur le portail cnrtl.
  6. noms recommandés par le Comité pour les noms français des champignons. Voir la liste des bolets sur le site de la Société mycologique de France (SMF).
  7. a b c d e f g h i et j Noms français des bolets définis par la Société mycologique de France, Fiche consultée en .
  8. a b c d e f g et h J.-M. Olivier, J. Guinberteau, J. Rondet et Michèle Mamoun, Vers l'inoculation contrôlée des cèpes et bolets comestibles ? Rev. For. Fr. XLIX - no sp. 1997. p. 222 et p. 223. Lire le document pdf en ligne[PDF].
  9. a b c d e f g h i j k et l Gérard Houdou, Champignons de nos régions, Éditions de Borée, 2005. (ISBN 2844943187 et 9782844943187). 320 pages.
  10. Attention aux appellations et traductions fantaisistes circulant sur l'Internet.
  11. a b c d e f g h i et j Nom vernaculaire en français d’après Termium plus, la banque de données terminologiques et linguistiques du gouvernement du Canada.
  12. décision no 64, Journal officiel du .
  13. Association Forêt Méditerranéenne, 1985. Forêt méditerranéenne, Volumes 7 à 9, page 140 lire en ligne.
  14. (en) Hall IR, Lyon AJE, Wang Y, Sinclair L. (1998). "Ectomycorrhizal fungi with edible fruiting bodies 2. Boletus edulis". Economic Botany 52 (1): 44–56.
  15. a et b (en) IR Hall, SR Stephenson, PK Buchanan, W Yun et A. Cole, Edible and Poisonous Mushrooms of the World, Portland, Timber Press, , p.224-225.
  16. (en) Agueda B, Parlade J, Fernandez-Toiran LM, Cisneros O, de Miguel AM, Modrego MP, Martinez-Pena F, Pera J. (2008). "Mycorrhizal synthesis between Boletus edulis species complex and rockroses (Cistus sp.)". Mycorrhiza 18 (8): 443–449.
  17. (en) N. Sitta et M. Floriani, « Nationalization and globalization trends in the wild mushroom commerce of Italy with emphasis on porcini (Boletus edulis and allied species) », Economic Botany, vol. 62 (3),‎ , p.307-322 (DOI 10.1007/s12231-008-9037-4). .
  18. (en) Boa E. (2004). Wild Edible Fungi: A Global Overview of Their Use and Importance to People (Non-Wood Forest Products). Rome, Italy: Food & Agriculture Organization of the UN. p. 96–97. Retrieved .
  19. a et b (en) N. Sitta, « Presence of Tylopilus into dried "Porcini" mushrooms from China », Micologia Italiana, vol. 29 (1),‎ , p.96-99.
  20. (en) Focus Information Agency, Bulgaria.
  21. « Indicateur des échanges import/export », sur Direction générale des douanes. Indiquer NC8=07095930 (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Pierre Montarnal : Le petit guide : Champignons (Genève, 1964 ; Paris-Hachette, 1969).
  • Régis Courtecuisse, Bernard Duhem : Guide des champignons de France et d'Europe (Delachaux & Niestlé, 1994-2000).

Liens externes[modifier | modifier le code]

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