Boliarique

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Le « boliarique  » est un jargon recensé dans la région du village grec de Krávara (en grec moderne : Κράβαρα, ou Γκράβαρα), dans le nome d'Étolie-Acarnanie, et qui était utilisé comme un langage secret par une communauté de mendiants. Il a été succinctement étudié sur place, sous la dénomination anglophone de boliaric, par l'écrivain britannique Patrick Leigh Fermor dans son ouvrage Roumeli (voir Bibliographie)[1].

Dénomination et contexte ethnique[modifier | modifier le code]

Le terme de boliaric est une adaptation anglophone du terme grec boliárika et du verbe boliarevo[2],[3]. Lorsque Leigh Fermor annonce à des Grecs qu'il va se rendre à Krávara, ceux-ci lui répondent en plaisantant : Prosokhè na mi se boliarépsoun (« Prends garde à ce qu'ils ne te boliarisent pas »). Lorsqu'il évoque ce terme à Krávara même, les villageois, d'abord méfiants, finissent par lui fournir des informations et des termes de « boliarique », qu'il note soigneusement et récapitule dans l'appendice II de Roumeli, intitulé Glossary of Boliaric Vocabulary.

Le boliarique aurait été développé par les ancêtres des habitants de Krávara, qui constituaient alors une communauté de mendiants itinérants (ce qui était rare en Grèce, comme le note Leigh Fermor), afin de ne pas être compris de leur entourage. Ces mendiants s'appelaient eux-mêmes boliárides (pluriel de boliáris), et dénommaient leur langue ta boliárika. Le verbe équivalent à boliariser signifiait selon eux à l'origine « duper », par référence au caractère peu scrupuleux de ces mendiants.

Leigh Fermor indique que ce terme n'est pas grec et que le seul rapprochement linguistique qu'il ait pu envisager concerne les boliars, nobles bulgares du Moyen Âge (le terme est voisin des boyards russes). Il suppose que les boliárides, ayant autrefois erré à travers l'Albanie, la Serbie et la Bulgarie, ont emprunté au passage des éléments de vocabulaire aux peuples rencontrés.

Exemples lexicaux[modifier | modifier le code]

Parmi les termes cités par Leigh Fermor, certains peuvent en effet facilement être rapprochés de termes slaves, d'autres ayant dû avoir d'autres origines, roumaines par exemple. Toutefois, de nombreux mots semblent avoir été fabriqués. L'auteur note que la langue comprend des phonèmes inconnus du grec actuel, tels le « tch », et que pourtant les habitants de Krávara prononçaient sans difficulté.

Certains termes faisant référence à des objets très usités par des mendiants itinérants ont un grand nombre de synonymes : par exemple bâton se dit grigóro, láoussa, matsoúka, straví, kaníki, dervo[4]...

La syntaxe du boliarique semble similaire à celle du grec moderne.

Terme boliarique Traduction Rapprochements
bikiaïn mouton
boudjour pain
chveri femme
daïri route
gaïna poule latin gallina
Ghiona Athènes grec ghioni (chouette emblème d'Athènes) ?
havaloú sexe de la femme
kaïn chien roumain câine
karkévo frapper
koukouroúzo maïs russe koukourouza[5]
lióka sexe de l'homme
mantzoúnas médecin
markantós chat nom propre ?
mazarak viande bulgare meso ?
mleko lait bulgare mliako
nerogáïna gibier d'eau du grec nero (eau) + gaïna
otsia yeux slave otchi
patéllos policier
perdikis cul grec perdikis (perdrix)
pharí cheval grec phorada (jument) ?
phlamboúri soleil, jour
ripo poisson bulgare ribi ?
sardínia chaussures
tchapráka porte
tchmekiázo dormir
tchóki pierre
vatso pied
velazoura troupeau (chèvres, moutons) grec velazo (bêler)
verdílis, verdílo père, mère

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Mentionné dans son article nécrologique dans e-Kathimeriní, 11/06/2011
  2. À la 1re personne du singulier du présent de l'indicatif.
  3. Il existe un nom de famille grec (Macédoine) Bolaris (Μπόλαρης).
  4. En bulgare dervo = arbre (russe derevo).
  5. En grec : kalabóki.