Bateau à vapeur

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Bailey Gatzert, bateau à vapeur du Fleuve Columbia ca. 1910

Un bateau à vapeur est un bateau dont la force de propulsion est fournie par une machine à vapeur. Cette désignation comprend les machines au fonctionnement alternatif et les turbines. Elles peuvent être alimentées par des carburants fossiles (charbon, mazout) ou, au sens strict, par l'énergie nucléaire bien que l'usage préfère parler dans ce cas de propulsion nucléaire.

Les bateaux anglais dont le nom est précédé de SS sont des bateaux à vapeur (abréviation de steamship en anglais).

Histoire

Les premiers bateaux mus par la vapeur furent des embarcations ou des navires de petites dimensions dont la vitesse et l'autonomie, encore très faibles, limitaient l'évolution sur des lacs ou des rivières.

Le premier fut en 1776 le Palmipède du Français Claude François Jouffroy d'Abbans qui navigua sur le Doubs, en France.

Navigation intérieure

Le Clermont de Robert Fulton

En France, Claude François Jouffroy d'Abbans fit fonctionner un bateau à vapeur à aube mais qui, lors des premiers essais, était trop lent pour naviguer sur une rivière. En 1783, grâce à de nouvelles pales, le pyroscaphe réalisé avec le concours d'Antoine Frerejean parvint à naviguer sur la Saône, près de Mâcon, pendant environ un quart d'heure, avant que la machine ne tombe en panne. Le 15 juillet 1783, le marquis de Jouffroy d'Abbans remonta, avec succès, à contre-courant la Saône à Lyon de la cathédrale Saint-Jean à l'île Barbe[1].

En 1784, James Rumsey construisit un bateau propulsé par pompage (pump-driven boat (water-jet)) qui navigua à contre-courant sur la rivière Potomac en 1786. Il déposa un brevet dans l'État de Virginie. En Pennsylvanie, John Fitch, une connaissance de William Henry, fit un bateau à vapeur à pales en 1785.

L'Américain Robert Fulton fut le premier à proposer en 1798 un modèle de sous-marin. Admirateur de la Révolution française, il était ensuite venu visiter la France. En 1802, à l'âge de 27 ans, il lança sur la Seine un chaland à vapeur. Sa démonstration ne suscita guère d'intérêt. Le , Fulton ouvrit aux États-Unis la première ligne commerciale régulière à vapeur avec le Clermont entre New York et Albany, sur l'Hudson[2].

Au xixe siècle, de nombreuses compagnies tentèrent d'exploiter ces nouveaux moyens de transport sur les rivières françaises mais de nombreux accidents (explosions, incendies, naufrages…) tempérèrent l'expansion de la voie navigable. Une des dernières sur la Loire s'appelait ainsi, pour rassurer les clients, la compagnie des Inexplosibles. 21 bateaux de ce type furent construits et naviguèrent entre 1820 et 1840. Une réplique (non fonctionnelle) de ces bateaux a été construite (le no 22) et est amarrée depuis l'été 2007 sur le quai de Châtelet à Orléans. La construction des voies de chemin de fer précipita le déclin du trafic fluvial des passagers.

Les péniches et gabares, tractées avant par des animaux ou des hommes, ont été tirées ensuite pendant longtemps par des remorqueurs à vapeur, sur des « trains » qui pouvaient atteindre douze chalands. La relativement modeste puissance de ces bateaux obligeait les mariniers à des trésors d'anticipation dans la manœuvre, surtout en période de crue sur les fleuves. La plupart des remorqueurs ont été convertis au diesel au milieu du XXe siècle avant d'être remplacés par des pousseurs.

Le XIXe siècle a vu l'apparition des premiers automoteurs, chalands équipés de leur propre machine qui les rendaient complètement autonomes.

Aux États-Unis, la faiblesse du tirant d'eau dans certains endroits du Mississippi a entraîné la construction de bateaux à fonds plats, les steamboats mus par des roues à aubes qui ont été longtemps des moyens incontournables de transport de fret et de passagers sur ces fleuves.

Navires de haute mer

Reconstitution d'un bateau à vapeur de mer avec roues à aubes. Musée Héritage Centre à Cobh, Irlande.

Les premiers navires de mer équipés de machines à vapeur furent des voiliers à peine modifiés. La propulsion par roue à aubes installées de part et d'autre du maître-couple des bateaux permit de ne rien changer aux lignes d'eau des voiliers, le poids de la machine étant compensé pas une diminution du lest. Le rendement était si faible et les quantités de charbon nécessaires pour effectuer un long voyage tellement importantes que la machine n'était utilisée qu'à de courts moments, surtout comme appoint, pour traverser les calmes et faire route plus directement vers la destination en cas de vents contraires. Ces bateaux étaient alors des voiliers à moteur auxiliaire.

C'est à un Anglais, Henry Bell, que revient la gloire d'avoir fait passer [la navigation à vapeur] des rivières à l'Océan. En 1812, ayant construit un bateau de 30 tonnes, la Comète, muni de roues à palettes latérales, il le fit d'abord naviguer sur la Clyde, puis, s'enhardissant, il le lança sur la mer et fit le tour des îles Britanniques[3].

Le premier navire à vapeur qui traversa la Manche fut l'Élise, un petit bâtiment de 16m de long acquis à Londres par la Compagnie de navigation parisienne Pajol. Il relia Newhaven au Havre dans la nuit du 15 au 16 mars 1816 par des conditions de mer très difficiles.

En mai-juin 1819, le Savannaha d'abord prévu comme navire à voile puis équipé d'une machine de 90 ch, effectua la première traversée de l'Atlantique. Il avait embarqué 75 tonnes de charbon et 25 tonnes de bois[4]. Il poursuivit son périple jusqu'à Saint-Pétersbourg. Après son retour, la machine fut démontée.

Le navire Karteria, construit en Angleterre et incorporé dans la flotte grecque en 1826, fut le premier navire à vapeur impliqué dans un combat naval[5]. Le premier navire à vapeur de la Marine française fut le Sphinx, construit à l'Arsenal de Rochefort par l'ingénieur Jean-Baptiste Hubert. Achevé en 1833, il remorqua d'Égypte en 1833 le bateau le Louxor qui portait le fameux obélisque installé depuis au centre de la place de la Concorde à Paris.

C'est à partir de 1837 que des navires purent effectuer la traversée de l'Atlantique toue entière sous vapeur. La durée passé alors de 35 jours à 18 jours (Sirius) ou 15 jours et 5 heures (Great Western)[4].

Lorsque l'on installa les premières roues à aubes, le système de propulsion par hélice avait été étudiée et avait connu quelques applications (mémoire de du Quet, 1729, sous-marin de Buhnell en 1776, bateaux de Fitch en 1796, 1797, essais de Fulton au Havre en 1800[6]). Cependant, l'idée d'un rendement inférieur à celui de la roue à aubes qui prévalait alors donnait la préférence à cette dernière[7] malgré ses inconvénients : fragilité des roues et mauvais comportement dans la houle, cible faciles pour aux artilleurs des bateaux de guerre. Toutefois, parallèlement aux travaux du Français Frédéric Sauvage (qui breveta le principe de l'hélice d'Archimède appliqué à la propulsion des navires le 28 mai 1832[7]), les Anglais Smith et Rennie expérimentèrent dès 1838 différents types de spires sur une embarcation à vapeur, naturellement appelé l'Archimède.

L'année 1842 vit la mise en chantier de deux navires civils emblématiques : en France, le Napoléon, petit paquebot de 47 mètres équipé d'une machine de 120 ch, qui deviendra le Corse[7], construit au Havre par les chantiers Augustin Normand, et en Angleterre le Great-Britain, construit par Patterson. Par leurs performances, ces deux navires à hélices marquèrent un tournant dans l'histoire de la navigation à vapeur. À partir de cette date, l'hélice prit rapidement la place de la roue à aubes sur les navires de mer.

Libérés des épisodes peu ventés où ils n'avançaient guère lorsqu'ils ne restaient pas encalminés et du rallongement de la route qu'impose la navigation au près dans les vents contraires, les navires marchands purent prévoir leur temps de parcours avec une faible marge d'erreur. Les armateurs proposèrent alors des traversées à date régulière. Cette régularité leur permit d'augmenter le prix du fret et des billets des passagers, compensant ainsi le surcoût imposé par l'achat de charbon. Cependant, le transport des pondéreux, toujours très sensibles au coût du transport, demeura jusqu'à la Première Guerre mondiale l'apanage de grands voiliers.

Dans le domaine militaire, le navire de ligne Napoléon, conçu par l'ingénieur naval Dupuy de Lôme, lancé à l'arsenal de Toulon le 16 mai1850[8], fut premier navire de ligne dont la machine devenait le mode principal de propulsion. La voile ne servait plus que d’appoint pour favoriser les performances et économiser le charbon lorsqu'elle le permettait. Il démontra la supériorité de son mode de propulsion pendant la guerre de Crimée.

Machines auxiliaires

Le moteur à vapeur permit aussi l'implantation de machines auxiliaires qui alimentèrent en énergie de nombreux dispositifs manœuvrés à bras d'homme. Il était devenu possible d'appliquer une grande puissance au safran, aux cabestans, aux grues, aux pompes. Il rendit possible le chauffage de toutes les parties habitables, puis l'implantation de l'électricité. Il a modifié ainsi radicalement les conditions de vie à bord pour les équipages et les passagers. Il a largement contribué à l'augmentation de la dimension des navires dans lesquels il devenait possible de proposer des conditions de confort jusque-là inconnues en mer.

Développement de la vapeur

Le développement de la machine à vapeur vit le passage des machines à piston aux turbines, du charbon au pétrole. La vapeur demeura le mode de propulsion essentiel de la période 1870-1950. Les mâtures disparurent progressivement vers 1900 pour ne plus être que des mâts de charge ou de signaux. La course à la puissance, à la vitesse et au luxe des paquebots transatlantiques donna le départ du trophée du ruban bleu.

L'augmentation des puissances des moteurs à gazole a fait disparaître les machines à vapeur de la marine de commerce. La propulsion nucléaire (turbine à vapeur alimentée par une chaudière nucléaire) en est le dernier avatar pour la marine militaire.

Notes et références

  1. Et Jouffroy d'Abbans remonta la Saône en bateau à vapeur, Le Progrès, 9 août 2009
  2. Gaston Malherbe, Histoire de la conquête des mers, Hachette, , p. 113
  3. E.O. Lamy, Dictionnaire de l'Industrie et des Arts Industriels, Librairie de Dictionnaires, Paris, tome I, p. 546
  4. a et b Maurice Daumas, Histoire Générale des Techniques, PUF, Paris, 1968, tome III, p.344 et suiv.
  5. Léon Haffner, Cent ans de marine de guerre. Réédition par les Éditions du Gerfault, Paris' 2002, p. 25
  6. Maurice Daumas, Histoire Générale des Techniques, PUF, Paris, 1968, tome III, p.346
  7. a b et c Daumas op.cit. p. 347
  8. (en) Tony Gibbon, The Encyclopedia of Ship, Londres, Amber Books, , 544 p., p 105

Voir aussi

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Bibliographie

  • Michel Mollat, Les origines de la navigation à vapeur, Paris, Presses universitaires de France, , 206 p..
  • Yves Rochcongar (dir.) et Laurent Huron (dir.), Steamers de Loire, chantiers et constructeurs, Nantes, MeMo/e+pi, coll. « Carnets d'usines », , 108 p..

Articles connexes

  • Charles Dallery a proposé l'application de l'hélice aux bateaux à vapeur.

Liens externes