Averroès

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Averroès
Ibn Rochd ابن رشد
détail de la toile du XIVe siècle, Triunfo de Santo Tomás, de Andrea de Bonaiuto
Naissance
Décès
École/tradition
Principaux intérêts
Idées remarquables
unité de l'intellect agent séparé, fondation de la raison philosophique à partir de la Révélation
Œuvres principales
Grand Commentaire du Traité De l'âme d'Aristote
Discours décisif
Incohérence de l'Incohérence
Influencé par
A influencé
Parentèle
Ibn Ruchd al-Gadd (grand-père)Voir et modifier les données sur Wikidata

Averroès ou Ibn Rochd de Cordoue (arabe: ابن رشد, Ibn Rochd) est un philosophe, théologien rationaliste islamique, juriste, mathématicien et médecin musulman andalou de langue arabe du XIIe siècle. Il est né en 1126 à Cordoue, en Andalousie, mort le à Marrakech, au Maroc. Il est dit Ibn Rochd mais il est plus connu en Occident sous son nom latinisé d'Averroès. Son nom complet est Abu al-Walid Muḥammad ibn Aḥmad ibn Muḥammad ibn Aḥmad ibn Aḥmad ibn Rošd, أبو الوليد محمد بن احمد بن محمد بن احمد بن احمد بن رشد.

Son œuvre est reconnue en Europe occidentale, dont il est, d'après certains, comme le spécialiste Alain de Libera, « un des pères spirituels » pour ses commentaires d'Aristote[1]. Certains vont jusqu'à le décrire comme l'un des pères fondateurs de la pensée laïque en Europe de l'Ouest[2].

Son ouverture d'esprit et sa modernité déplaisaient aux autorités musulmanes de l'époque, qui l'exilèrent comme hérétique, et ordonnèrent que ses livres soient brûlés[3]. Profondément méconnu de son vivant, il a commenté abondamment et brillamment les œuvres d'Aristote : aussi les théologiens latins le nommaient-ils « Le Commentateur ». Averroès est l'un des plus grands philosophes de la civilisation arabo-islamique[4].

Biographie

Il est issu d'une grande famille de cadis (juges) de Cordoue (malékites). Il est petit-fils de Ibn Ruchd al-Gadd, cadi de Cordoue et célèbre écrivain dont on retrouve une œuvre en une vingtaine de volumes sur la jurisprudence islamique à la Bibliothèque royale du Maroc.

Il est formé par des maîtres particuliers. La formation initiale commence par l’étude, par cœur, du Coran, à laquelle s'ajoutent la grammaire, la poésie, des rudiments de calcul et l'apprentissage de l'écriture. Averroès étudie avec son père, le hadith, la Tradition relative aux actes, paroles et attitudes du Prophète et le fiqh, droit au sens musulman, selon lequel le religieux et le juridique ne se dissocient pas.

Les sciences et la philosophie ne sont étudiées qu’après une bonne formation religieuse. Averroès élargit l'activité intellectuelle de son milieu familial en s'intéressant aux sciences profanes : physique, astronomie, médecine. À l'issue de sa formation, c’est un homme de religion féru de savoirs antiques et curieux de connaître la nature.

Averroès cultiva la médecine, qu'il avait étudiée sous Avenzoar, et fut médecin de la cour almohade ; mais il s'attacha plutôt à la théorie qu'à la pratique.

Le calife Abu Yaqub Yusuf lui ayant demandé, en 1166, de présenter de façon pédagogique l’œuvre d’Aristote, Averroès cherche à retrouver l'œuvre authentique. Il utilise plusieurs traductions. En appliquant les principes de la pensée logique dont la non-contradiction, et en utilisant sa connaissance globale de l’œuvre, il décèle des erreurs de traduction, des lacunes et des rajouts. Il découvre ainsi la critique interne. Il a écrit trois types de commentaires : les Grands, les Moyens et les Abrégés. Il apparaît comme l’aristotélicien le plus fidèle des commentateurs médiévaux.

Vers 1188-1189, on assiste à des rébellions dans le Maghreb central et une guerre sainte contre les chrétiens. Le calife Abu Yusuf Yaqub al-Mansur fait alors interdire la philosophie, les études et les livres, comme dans le domaine des mœurs, il interdit la vente du vin et le métier de chanteur et de musicien.

À partir de 1195, Averroès, déjà suspect comme philosophe, est victime d’une campagne d’opinion qui vise à anéantir son prestige de cadi. Al-Mansûr sacrifie alors ses intellectuels à la pression des oulémas. Averroès est exilé en 1197 à Lucena, petite ville andalouse peuplée surtout de Juifs, en déclin depuis que les Almohades ont interdit toute religion autre que l’islam. Après un court exil d’un an et demi, il est rappelé au Maroc où il reçoit le pardon du sultan, mais n’est pas rétabli dans ses fonctions. Il meurt à Marrakech le 10 ou 11 décembre 1198 sans avoir revu l’Andalousie. La mort d’Al-Mansûr peu de temps après marque le début de la décadence de l’empire almohade.

Suspecté d'hérésie, il n’aura pas de postérité en terre d’islam. Une part de son œuvre sera sauvée par des traducteurs juifs. Elle passera par les Juifs de Catalogne et d'Occitanie dans la scolastique latine.

C'est l'un des plus grands penseurs de l'Espagne musulmane. Médecin, mathématicien, il s'intéresse surtout à la théologie et à la philosophie. Il commente les œuvres d'Aristote et cherche à séparer clairement la foi et la science. Ce projet inquiète les musulmans traditionalistes, mais va trouver un écho en Occident. Cet écho sera cependant tumultueux : Averroès sera à la fois surnommé le « Commentateur » d'Aristote par excellence, et caricaturé sous divers traits : hérétique, tyran sanguinaire, athée, libertin[5].

Pensée

Jurisprudence

Son livre Bidâyat ul-mudjtahid wa nihâyat ul-Muqtasid fait référence en matière de jurisprudence comparée. Il y cite et discute les avis des différents madhhabs (écoles) en matière de fiqh (jurisprudence islamique).

Métaphysique et épistémologie

Le paradigme de l'Artisan divin

Averroès cherche à élaborer une connaissance rationnelle de Dieu, qu'il revient au philosophe d'établir. Pour cela, il façonne le paradigme de l'Artisan divin : nous pouvons connaître Dieu et son acte de création par analogie avec l'étude du processus de fabrication artisanale. De même que l'analyse des objets fabriqués peut nous donner une connaissance de la nature de l'artisan qui les a faits, l'étude des étants créés peut nous donner une connaissance de la nature de Dieu[6].

La théorie métaphysique de l'artisan et du produit fabriqué permet de faire la différence entre les savants et la foule : en présence d'objets artisanaux, la foule ne comprend pas la « recette » de leur fabrication, tandis que le scientifique sait comment ils ont été produits, il connaît leur cause. Les scientifiques connaissent les règles de production d'un objet, contrairement à la foule[7]. Ainsi, il revient au philosophe de connaître Dieu à travers son acte de création par la raison, tandis que la foule n'a accès qu'à l'expérience sensible des étants créés. La foule doit s'en tenir à cette connaissance sensible des étants qui lui fait sentir que le monde a été créé par Dieu, mais elle ne peut comprendre au moyen de la raison l'acte de création.

La connaissance philosophico-théologique de Dieu n'est cependant pas une connaissance directe, de type intuitive, comme le serait la vision angélique de Dieu. Elle s'appuie en fait sur l'étude de la nature, qui est la création de Dieu[8]. C'est pour cette raison qu'Averroès fait l'éloge de la physique, la science des étants naturels, à la suite d'Alexandre d'Aphrodise et de Simplicius. Il a d'ailleurs livré à la postérité un commentaire de la Physique d'Aristote[9].

Théorie de la connaissance

Commentaire sur De Anima,
manuscrit français, troisième quart du XIIIe siècle
Le « ça pense en moi » : l'intellect agent séparé

Dans son Grand Commentaire au De Anima, livre III, Averroès allie aux doctrines d'Aristote celles de l'École d'Alexandrie sur l'émanation, et il enseigne qu'il existe une intelligence universelle à laquelle tous les hommes participent, que cette intelligence est immortelle, et que les âmes particulières sont périssables[10]. Alain de Libera fait d'Averroès l'un des premiers philosophes du « ça pense » : le sujet n'est pas maître de sa propre pensée, il y a quelque chose d'autre qui le fait penser. C'est l'« intellect unique et séparé, commun à tous les hommes qui pense en moi quand je pense[11]. » Alain de Libera ajoute que, pour Averroès, « ce n'est pas l'homme qui pense, mais l'intellect, ou ce n'est pas « moi » qui pense, mais l'agrégat constitué par mon corps (objet de l'intellect) et l'intellect séparé (sujet agent de la pensée)[11]. » Le « ça » désigne cet intellect séparé qui est Dieu, et qui actualise dans mon esprit les formes intelligibles lorsque mon corps perçoit des objets.

C'est la théorie de l'illumination : l'intellect agent séparé illumine mon corps qui serait sinon incapable de parvenir à se faire une idée des formes intelligibles (les quiddités des choses) ; elle a été critiquée par Albert le Grand et Thomas d'Aquin qui voulaient sauvegarder le caractère individuel de la pensée[11]. Ils accusaient la thèse averroïste de conduire à l'irresponsabilité d'un point de vue moral : si je ne suis pas maître de mes pensées, on ne peut pas me reprocher les actions dont mes pensées sont les motifs. Toujours d'après Alain de Libera, cela fait d'Averroès un précurseur de la psychanalyse (le « ça » est un terme de la seconde topique de Freud), mais la singularité de sa théorie vient de son identification du « ça » et de Dieu, comme si l'action de Dieu sur nos pensées se situait dans les profondeurs de notre âme et non dans sa conscience, comme le dira plus tard Joris-Karl Huysmans[12].

Le savant et le prophète

Averroès admet plusieurs modes de connaissance, qui sont autant de relations différentes entre notre système cognitif et l'intellect agent séparé (Dieu). L'un est celui des savants ou scientifiques, lesquels pensent les formes intelligibles qui sont dans l'Intellect agent au moyen du raisonnement syllogistique. Le raisonnement n'est possible qu'à partir de l'expérience de la nature. Ce mode de connaissance est discursif, il relève du logos. L'autre mode de connaissance, plus intuitif, est celui des prophètes, lesquels reçoivent directement les formes des choses au moyen d'images qui sont implantées dans leur esprit (faculté imaginative) par l'Intellect agent. C'est pourquoi le Coran use massivement d'images pour faire connaître Dieu aux hommes[13].

Il résulte de cette théorie deux conséquences importantes : la première est que la connaissance par images du prophète est supérieure à la connaissance par syllogismes du scientifique, alors qu'habituellement cette hiérarchie est inversée. Chez Aristote notamment, qui fournit à Averroès les instruments conceptuels lui permettant de construire sa théorie de la connaissance, la question n'est pas tranchée[14]. Aristote dit à la fois que les images sont une étape intermédiaire dans le processus d'abstraction qui va des formes sensibles aux formes intelligibles (les images sont donc cognitivement inférieures aux intelligibles)[15], mais également que « jamais l'âme ne pense sans image » (ce qui peut induire une primauté ontologique de l'imaginaire sur le conceptuel)[16].

Deuxième conséquence : le mode de connaissance des prophètes n'est pas le même que celui des scientifiques, mais leur source est exactement la même : c'est l'Intellect agent. C'est pour cette raison qu'Averroès peut affirmer que les savants (qui sont aussi les scientifiques et les philosophes) sont les « héritiers » des prophètes : leur mode de connaissance est également d'origine divine[17].

Foi et savoir

Le combat intellectuel contre les théologiens

Averroès cherche à donner un statut et un rôle très précis à la philosophie, aux côtés de la religion. Ses conceptions en matière de théologie s'inspirent du rationalisme d'Aristote en filigrane[18].

Philosophe, médecin, astronome, il est aussi cadi, c'est-à-dire homme de loi, juge. Et c'est sur le terrain juridique que le cadi de Séville va porter la première offensive contre les détracteurs de la philosophie. Le chef de file de ces derniers ayant vécu un siècle plus tôt et à l'autre extrémité du monde musulman, c'est à Al-Ghazali qu'Averroès va pourtant répondre, dans l'Incohérence de l'incohérence. L'ouvrage d'al-Ghazali, le Tahafut al-Falasifa (incohérence des philosophes) est comme une référence pour le mysticisme musulman, et précisément celle des acharites qui sont actifs en Al-Andalus à l'époque d'Averroès. Il critique le rationalisme des philosophes.

Dans le Tahafut al-Tahafut (incohérence de l'incohérence), l'ouvrage d'al-Ghazali est critiqué point par point, les propos sont sanctionnés par une fatwa qui les caractérise comme « blâmables », et la philosophie d'Aristote restaurée dans sa plus « pure » version. Averroès a mis en avant le fait de comparer le monde où il vivait et sa religion l'islam.

La philosophie face à la Révélation

Avec le Kitab fasl al-maqal (livre du discours décisif), il répond d'une manière originale à un très ancien problème que l'on retrouve dans le sous-titre de l'ouvrage : celui de la « connexion entre la Révélation et la philosophie ». La réponse est placée sur le terrain juridique, celui de la science de la Loi musulmane : Averroès ancre la philosophie dans la réalité sociale. Il s'agit de fonder en droit l'existence du philosophe dans la cité musulmane : la philosophie cherche sa légitimité aussi bien aux yeux du droit de la société, qu'à ceux de la loi religieuse. Alain de Libera résume cette opération ainsi, reformulant une phrase gilsonienne : « reconstruire la théologie sur un plan tel que son accord de fait avec la philosophie apparaisse comme la conséquence des exigences de la Révélation elle-même et non comme le résultat accidentel d'un simple désir de conciliation »[19].

Ainsi, Averroès constate que le Coran s'adresse à tous les musulmans : aussi bien de faible que de haute culture[20]. Le caractère universel de la Révélation ne saurait précisément être universel s'il ne s'adressait pas à eux selon leur niveau de culture. Il y a le sens premier, simple et imagé pour le commun des mortels et un discours plus soutenu ; il arrive qu'une contradiction apparaisse entre ces deux types d'énoncés et c'est précisément là que doit intervenir la philosophie : le philosophe, par le raisonnement, doit déceler le sens profond, caché du Texte. Averroès va pouvoir donner à la philosophie, dans une fatwa (le Discours décisif), son caractère « obligatoire », comme le veut la Loi musulmane. Ne pas éclairer le texte par une réflexion philosophique serait nuire à la foi du fidèle, en livrant ce dernier aux interprétations contradictoires. Les interprétations contradictoires ont en effet pour conséquence soit la tendance à la remise en cause des dogmes de la foi (scepticisme), soit le sectarisme (faire valoir une interprétation partielle contre toutes les autres). Averroès écrit ainsi : « Le Coran tout entier n'est qu'un appel à l'examen et à la réflexion, un éveil aux méthodes de l'examen »[21]. La philosophie permet de rechercher l'interprétation vraie et complète de la parole sainte, qui met fin à la fois au scepticisme et au sectarisme.

Philosophie politique

Des divergences d'interprétation

La philosophie politique d'Averroès a suscité des interprétations très différentes, et parfois même contradictoires. Cela est dû notamment aux difficultés d'exégèse d'une œuvre qui nous est parvenue sous des traductions mutilées ou approximatives, mais aussi aux stratégies interprétatives propres aux lecteurs d'Averroès, souvent originales.

On peut constater que l'exégèse de la philosophie politique d'Averroès suit un chemin similaire à l'exégèse de l'une de ses influences principales en ce domaine, le platonisme politique : Platon fut tour à tour interprété comme un révolutionnaire, un réformateur et un conservateur[22],[23],[24].

Averroès réformateur

La première grande interprétation de la philosophie politique d'Averroès considère ce dernier comme un réformateur. Cette tradition interprétative naît avec des auteurs comme Marsile de Padoue et Dante Alighieri, et nous est rendue par les médiévistes Étienne Gilson[25] et Alain de Libera[26]. Le projet de « monarchie universelle » exposé dans le traité De Monarchia de Dante réclame la caution d'Averroès[27]. Or, ce projet a pour but de séparer et d'harmoniser le pouvoir temporel de l'empereur et le pouvoir spirituel du pape. Si ce projet se réclame d'Averroès, c'est à partir de deux idées principales puisées chez ce dernier.

La première, c'est l'idée de la séparation entre la foi et le savoir, qui seraient deux ordres de vérité distincts (sans être opposés néanmoins : la doctrine de la double vérité est une caricature polémique des opinions averroïsantes)[28]. Cette séparation dans l'ordre de la connaissance aurait pour corollaire dans l'ordre éthique et politique la séparation entre le temporel et le spirituel.

La deuxième, c'est l'idée d'un intellect commun à tous les hommes. Dante l'interprète non pas comme un monopsychisme (les hommes singuliers n'ont pas d'intellect propre, il n'y a qu'un Intellect unique et séparé d'eux), mais, à la suite des critiques de Thomas d'Aquin contre l'averroïsme[29],[30], comme une communion intellectuelle de l'humanité, où chaque intellect particulier apporte sa contribution personnelle à la connaissance collective de l'humanité tout entière.

La philosophie politique d'Averroès est alors interprétée non pas comme révolutionnaire (il ne s'agit pas de renverser un quelconque pouvoir établi), ni comme conservatrice (il ne s'agit pas d'instaurer ou de perpétuer une théocratie religieuse ou philosophique), mais comme réformatrice : l'intellect exige de séparer le temporel du religieux, et la société humaine a pour but la connaissance et la sagesse dans un cadre de paix universelle. Il s'agit d'une forme primitive de laïcité. Cette interprétation d'Averroès semble « progressiste » à côté de la position politique propre d'Étienne Gilson qui la restitue et la commente. En effet, ce dernier souhaite restaurer l'augustinisme politique, et se sépare par conséquent du projet de Dante inspiré par Averroès : l'augustinisme politique consiste en une forme de théocratie. Gilson la caractérise comme l'union des hommes autour de la foi et du pouvoir de l'Église catholique et de son chef, le pape. Il n'y est donc pas question de laïcité, ni de séparation entre le temporel et le spirituel.

Averroès révolutionnaire

La deuxième grande interprétation de la philosophie politique d'Averroès fait de ce dernier un révolutionnaire et un penseur de gauche radicale. Cette tradition interprétative utilise principalement les outils d'exégèse théorisés par le marxisme[31]. En effet, il faudrait dissocier chez Averroès l'aspect idéologique de sa pensée (ses opinions concernant l'ordre social et la théocratie) de l'aspect « politique » ou « matériel ». Ce deuxième aspect concerne les conséquences sociales et politiques de la pensée de l'auteur, parfois indépendamment de ses intentions propres et déclarées.

En ce sens, ce qui serait important dans la philosophie politique d'Averroès, ce ne serait pas ses opinions sur un pouvoir appartenant exclusivement aux philosophes théologiens, mais les conséquences pratiques de ses thèses métaphysiques. C'est de cette façon que le philosophe allemand Ernst Bloch, tenant du marxisme hétérodoxe (en marge du marxisme soviétique), lit la philosophie d'Averroès. Pour lui, la principale thèse qui fait d'Averroès un révolutionnaire est l'idée que la matière contient en elle-même tous les possibles[32]. Cette thèse, héritée d'Aristote, fut reprise selon l'auteur par Avicenne, puis par Averroès lui-même, et aurait influencé ensuite Giordano Bruno et Goethe.

En identifiant la matière et la catégorie de possible, la tradition de « gauche aristotélicienne » proposerait une alternative à la fois au spiritualisme conservateur et féodal et au matérialisme « bourgeois » et « mathématicien » (le matérialisme qui considère la matière comme une entité quantitative et mécanique). La matière doit être considérée, selon Bloch lecteur d'Aristote et d'Averroès, comme une entité qualitative, vivante et pleine de possibles. C'est de l'usage dialectique et qualitatif (dans la lignée de Karl Marx) de la matière et de la production que naîtront les changements économiques et sociaux vers une société plus juste.

La deuxième thèse qui accréditerait l'image d'un Averroès matérialiste et même panthéiste est celle qui conçoit l'homme comme un corps, sans intellect ou esprit qui viendrait de nulle part. L'homme se réduirait à ses facultés corporelles (sensation, imagination, intellection patiente), et n'aurait pas de faculté « spirituelle » (intellect agent d'origine divine). Cette position est proche de celle d'Alexandre d'Aphrodise, et la polémique entre les partisans des deux philosophes portera sur le statut d'un éventuel Intellect unique et séparé (thèse du monopsychisme).

La dissidence de l'averroïsme latin au Moyen Âge et de l'averroïsme italien à la Renaissance par rapport aux autorités établies (Universités et Église) serait l'émanation même de cet esprit révolutionnaire intrinsèque à la pensée du maître, Averroès[33].

Averroès conservateur

La troisième interprétation importante est celle du philosophe français Rémi Brague, qui, contre les interprétations « métaphysiques » ou « épistémologiques » d'Averroès (interprétations qui faisaient appel aux théories de la matière ou de l'intellect), se propose de lire Averroès au nom de la « vérité historique »[34]. Ici, pas de distinction entre une histoire empirique et une histoire dialectique, entre des opinions idéologiques et une pensée travaillant en profondeur dans les rapports socio-économiques comme dans le marxisme ; pas non plus d'interprétation strictement politique comme celle de Dante. Il s'agit d'une exégèse purement historique de la philosophie politique d'Averroès. Il est également à noter que Rémi Brague ne cherche absolument pas à lire Averroès en le rapportant aux averroïstes s'inspirant du maître, que ce soient les averroïstes latins du Moyen Âge ou italiens de la Renaissance.

Il évoque alors plusieurs faits qui sont pour lui décisifs, à savoir notamment que le Discours décisif (livre à partir duquel serait fabriqué le mythe du bon Averroès, tolérant et progressiste) représente une infime partie de l'œuvre entière d'Averroès, et que le philosophe arabe a donné un commentaire de la République de Platon. Rémi Brague rappelle alors qu'Averroès n'a pas remis en cause certaines thèses considérées comme eugénistes dans l'ouvrage platonicien[35]. Cette interprétation de la philosophie politique d'Averroès est corroborée par les textes où ce dernier souhaite donner le pouvoir aux philosophes (aristotéliciens) en destituant les théologiens (ash'arites)[36]. Cette position n'est pas sans rappeler en effet l'élitisme de Platon, qui appelle de ses vœux la prise de pouvoir des « philosophes rois »[37]. L'argument principal d'Averroès est que les philosophes sont les seuls à même d'interpréter correctement la Parole sainte, là où les théologiens se perdent dans des circonvolutions dialectiques qui mènent au sectarisme religieux ; tandis que la foule doit s'en tenir à une lecture littérale des textes sacrés, n'ayant pas l'intelligence suffisante pour comprendre la lecture philosophique et rationnelle. Ainsi, la Cité idéale musulmane consiste en l'union des philosophes dirigeants, seuls à même d'interpréter les textes sacrés, et des gens du commun ignorants, mais capables de mener leur vie d'après la lettre de ces textes.

De même, Rémi Brague évoque les liens de Martin Heidegger avec le nazisme[38], pour signaler que « la philosophie n'est pas tout à fait innocente » (Karl Jaspers) : on ne saurait écarter a priori l'idée d'une collusion entre la philosophie et les pires régimes de l'histoire. Averroès semble bien n'être pas innocent lui non plus : selon l'auteur médiéviste, Averroès, grand cadi de Cordoue, au service des Almohades, serait un « intellectuel organique » au sens d'Antonio Gramsci, par opposition à l'« intellectuel critique »[39]. Le philosophe arabe serait un soutien du pouvoir en place, non un penseur en marge ; il serait conservateur et non révolutionnaire ou progressiste. Dans ce cas précis, Rémi Brague invoque un auteur marxiste (Gramsci) pour appuyer sa stratégie interprétative sur la notion d'idéologie appliquée à Averroès, idéologie qui serait celle de la classe dominante de son époque. Il fait donc le contraire de ce que faisait Ernst Bloch, quand ce dernier « négligeait » l'idéologie pour se concentrer sur les conséquences pratiques (et parfois inconscientes) de la pensée de l'auteur.

Postérité

Détail de L'École d'Athènes de Raphaël

Moyen Âge latin

Par sa capacité à concilier la philosophie aristotélicienne et la foi musulmane, Averroès est considéré comme l'un des grands penseurs du monde islamique. Ses commentaires de l'œuvre d'Aristote, traduits en latin vers 1230 (Michael Scot) entre autres, ont par ailleurs eu une influence majeure sur les penseurs du monde chrétien médiéval, auprès duquel il a fortement contribué à la diffusion des cultures grecque et arabe.

La pensée d'Ibn Rushd est bien accueillie en Occident (dès 1225), car elle est fondée sur les idées d'Aristote qui y sont déjà connues, notamment depuis les centres de diffusion culturelle d'Angleterre et de Tolède. Si elle ne crée pas de transfert de connaissances, sa pensée participe à cette diffusion philosophique en Occident. Ses disciples les plus illustres ont été Boèce de Dacie, Siger de Brabant, Jean de Jandun et Marsile de Padoue.

George Sarton, le père de l'histoire des sciences aux États-Unis, écrit :

« Averroès doit sa grandeur à l'énorme remue-ménage qu'il a provoqué dans l'esprit des hommes pendant des siècles. L'histoire de l'averroïsme s'étale sur une période de quatre siècles jusqu'à la fin du XVIe siècle, cette période mérite peut-être plus que toute autre d'être appelée le Moyen Âge, car elle est la véritable transition entre les méthodes anciennes et modernes[40]. »

Averroès ne s'accordait pas toujours dans ses commentaires avec Alexandre d'Aphrodise, ce qui divisa toute l'école péripatétique en deux sectes, celle des averroïstes et celle des alexandristes[41]. Vers 1250, de façon vague par Albert le Grand, puis en 1252, de façon précise par Robert Kilwardby et saint Bonaventure, Averroès est accusé d'avoir dit qu'il n'existe qu'une seule âme pour tous les hommes : c'est la controverse sur l'intellect agent, le monopsychisme, l'averroïsme latin[42]. Thomas d'Aquin attaque violemment les averroïstes, et à travers eux, Averroès lui-même, le « depravator » des péripatéticiens, pour les mêmes raisons[43]. L'évêque de Paris de l'époque, Étienne Tempier, condamne en décembre 1270 puis en mars 1277, ce que Renan appellera l'averroïsme latin, avec ces thèses : éternité du monde, négation de la providence universelle de Dieu, unicité de l'âme intellective pour tous les hommes, déterminisme[44].

Renaissance italienne

Les travaux d'Averroès concernant Aristote notamment illustrent parfaitement le phénomène d'hellénisation du monde arabo-islamique, hellénisation d'où sortira directement, aux XVe et XVIe siècles, le grand mouvement culturel de la Renaissance italienne en Europe, qui se caractérisera par la reconstruction des philosophies de l'Antiquité (par exemple le néoplatonisme médicéen). Averroès influença fortement les humanistes florentins Ange Politien et surtout Pic de la Mirandole[45]. Averroès avait généralement mauvaise presse auprès du clergé et de la papauté en particulier, certains papes ayant voulu souvent le censurer. Léon X de Médicis le déclara hérétique en 1513 et le déconseilla fermement aux fidèles, mais Raphaël montre son admiration envers lui en le plaçant au milieu des plus illustres philosophes grecs dans sa fresque L'École d'Athènes.

Du XXe siècle à nos jours

Dans les arts

Le cinéaste Youssef Chahine met en scène Averroès dans son film Le Destin en 1997. Il en fait un héros de la raison contre le fanatisme religieux.

Il a également inspiré à Jorge Luis Borges une de ses nouvelles, La Quête d'Averroes, du recueil El Aleph. Jacques Attali lui consacre un roman biographique et policier (ainsi qu'à Moïse Maïmonide) : La Confrérie des Éveillés.

L'écrivain anglo-indien Salman Rushdie dit tenir son propre nom d'Averroes, car son père « Anis choisit de l'appeler Rushdie en raison de l'admiration qu'il portait à Ibn Rushd, l'Averroes de l'Occident, pour avoir été en son temps au premier plan de l'interprétation rationaliste de l'islam contre la tradition littérale »[46].

Dans la culture

Créées en 1994, les Rencontres d'Averroès se proposent de penser la Méditerranée des deux rives en invitant à Marseille des personnalités autour de tables rondes.

Le programme Averroès, quant à lui, est un système d'échange inter-universitaire au Maghreb et en Union européenne. Il a pris ce nom car la figure d'Averroès évoque un trait d'union culturel entre les pays de ces deux régions du monde.

Dans l'institution éducative et religieuse

Le premier lycée privé musulman de France métropolitaine, ouvert à Lille en septembre 2003, porte son nom, associé aujourd'hui à une bonne image dans les communautés chrétiennes comme musulmanes.

La mosquée de Montpellier a pris le nom d'Averroès[47].

Il en va de même du principal amphithéâtre de la faculté de médecine d'Angers.

Dans la philosophie

Averroès est fréquemment cité dans des polémiques au sujet des échanges culturels entre l'islam et la chrétienté, et du rapport qu'entretient la religion avec la raison. C'est le cas d'un débat qui a opposé Rémi Brague et Luc Ferry[48], également d'un débat entre le premier et Malek Chebel[49]. Rémi Brague considère qu'Averroès est un « réactionnaire » imbu de pouvoir, tandis que ses adversaires font d'Averroès un philosophe qui prône l'usage de la raison et de la tolérance. Alain de Libera apporte sa pierre à ce débat dans son article intitulé « Pour Averroès » : tout en reconnaissant le caractère élitiste de la philosophie politique d'Averroès, il en fait néanmoins lui aussi un défenseur de la raison.

Autres

En 1976, l'union astronomique internationale a donné le nom de Ibn-Rushd à un cratère lunaire.

Bibliographie

Publications anciennes

Colliget, ou Collyget.

On a d'Averroès (voir sur gallica) :

  • des Commentaires sur Aristote, publiés en latin, Venise, 1595, in-folio ;
  • un recueil d'écrits sur la médecine, connu sous le titre de Colliget (1166), corruption du mot arabe "colliyat" (الكليات) qui signifie le livre de tous, Venise, 1482 ;
  • des Commentaires sur les canons d'Avicenne, Venise, 1484 ;
  • l'Incohérence de l'incohérence des philosophes d'al-Ghazalietc.

Publications modernes

  • Discours décisif sur l'accord de la religion et de la philosophie (Fasl al-maqâl fîmâ bain ashsharî'ah wa al-hikmah min al-ittisâl, 1179), trad. M. Geoffroy, Paris, Garnier-Flammarion, 1996.
  • Averroès. L'intelligence et la pensée. Sur le De anima Présentation et traduction inédite par Alain de Libera, Paris, GF Flammarion, 2ème édition corrigée 1998.
  • Grand commentaire du De anima d'Aristote, livre III (429a10 – 435b25) (Sharh kitâb al-nafs, 1186), traduction, introduction et notes par Alain de Libera, Paris, Flammarion, G.F. 974, 1998.
  • Dévoilement des méthodes de démonstration des dogmes de la religion musulmane (Al Kashf 'an manâhij al-adilla, 1180), trad. partielle Marc Geoffroy, in Alain de Libera, Averroès. L'Islam et la raison, Paris, Garnier-Flammarion, 2000, p. 97-160.
  • La béatitude de l'âme, Paris, Vrin, 2002, trad. M. Geoffroy et C. Steel.
  • Incohérence de l'incohérence, trad. partielle Marc Geoffroy, in Alain de Libera, Averroès. L'Islam et la raison, Paris, Garnier-Flammarion, 2000, p. 167-204. Réfutation du fameux Incohérence des philosophes (Tahâfut al-falâsifa) de Al-Ghazâlî (1095). Trad. anglaise par S. Van Den Berg, Averroes' Tahafut al-tahafut, Londres, 1954, 2 t. 
  • L'Islam et la raison, précédé de Pour Averroès (Alain de Libera), Paris, GF-Flammarion, trad. Marc Geoffroy, 2000.
  • Moyen commentaire du De interpretatione d'Aristote (Talkhîs kitâb al-'ibârah), trad. A. Benmakhlouf et S. Diebler, Commentaire moyen sur le De interpretatione, Paris, Vrin, 2000.
  • Commentaire moyen à la Rhétorique d'Aristote (Talkhîs al-Khatâbah, 1176), édition critique du texte arabe et traduction française par M. Aouad, 3 vol. Union académique internationale, Corpus Philosophorum Medii Aevi, Averrois Opera, Series A : Averroes Arabicus, XVII, coll. « Textes et traditions » 5, Paris, Vrin, 2002.
  • Grand commentaire sur la Métaphysique d'Aristote (Tafsîr mâ ba'd al-tabî'ah, entre 1182-1193) : Grand commentaire sur la Métaphysique (libre II, c.à.d. B), trad. L. Bauloye, Paris, Vrin, 2003 ; Grand commentaire sur la Métaphysique (livres XI et XII), trad. M. Aubert, Paris, Les Belles-Lettres, 1984.

Anciennes éditions en ligne

  • Accord de la religion et de la philosophie, traité d'Ibn Rochd (Averroès), trad. par Léon Gauthier, Alger, 1905 (en ligne).

Études sur Averroès

(par ordre alphabétique)

  • Roger Arnaldez, Averroès. Un rationaliste en Islam, Balland, 1998.
  • Averroès et l'averroïsme, XIIe-XVe siècle : un itinéraire historique du Haut Atlas à Paris et à Padoue : actes du colloque international organisé à Lyon, les 4 et 5 octobre 1999 dans le cadre du "Temps du Maroc", par l'Unité mixte de recherche 5648, CNRS, Université Lumière Lyon 2, EHESS ; avec la collaboration des associations Regard Sud et les Amis de la maison de l'Orient ainsi que de l'Institut universitaire de formation des maîtres du Rhône ; actes réunis et édités par André Bazzana, Nicole Bériou et Pierre Guichard. - Lyon : Presses universitaires de Lyon, coll. « Histoire et archéologie médiévales » no 16, 2005. 348 p. 24 cm. ISBN 2-7297-0769-7.
  • Dragos Calma, "Études sur le premier siècle de l'averroïsme latin. Approches et textes inédits", Brepols, Turnhout, 2011, ISBN 978-2-503-54291-1
  • Ali Benmakhlouf, Averroès, Les Belles Lettres, 2000.
  • Ernst Bloch, Avicenne et la gauche Aristotélicienne, Premières Pierres, 2008, (ISBN 2913534082). Interprétation marxiste hétérodoxe d'Avicenne, Averroès et Avicebron.
  • Rémi Brague, Au moyen du Moyen Âge : Philosophies médiévales en chrétienté, judaïsme et islam, Champs-Flammarion, 2008, (ISBN 2081217856). Pour une vision contextualisée et critique d'Averroès.
  • Serge Cospérec, « Averroès en terminale ? », Côté Philo, 12 (juin 2008), p. 59-84, Lire en ligne.
  • Kurt Flasch, Introduction à la philosophie médiévale, Champs-Flammarion, 1998, (ISBN 2080814192). Voir les deux chapitres sur Averroès.
  • Kurt Flasch, D'Averroès à Maître Eckhart. Les sources arabes de la mystique allemande, Vrin, 2008, (ISBN 2711619419). Sur la réception eckhartienne de la philosophie d'Averroès, qui va déterminer la mystique rhénane et la philosophie allemande ultérieure jusqu'à l'idéalisme allemand et Heidegger.
  • Angèle Kremer-Marietti, « La pensée libre d'Averroès », Dogma, novembre 2011, Lire en ligne.
  • Guillaume Lavallée, « Averroès actuel », Phares, vol. 2 (été 2002), Lire en ligne.
  • Alain de Libera et M.-R. Hayoun, Averroès et l'averroïsme, PUF (Que sais-je ?), 1991. (ISBN 2-13-044203-X).
  • Alain de Libera, « Averroès le trouble-fête », Alliage, 24-25 (1995), Lire en ligne.
  • Alain de Libera, « Pour Averroès ». Introduction à Averroès. L'Islam et la Raison, Paris, Garnier-Flammarion, 2000, p. 9-76. (ISBN 2-08-071132-6).
  • Carlos Fraenkel, « Philosophy and Exegesis in al-Fârâbî, Averroes, and Maimonides », dans M. Achard et F. Renaud (éds.), Le commentaire philosophique (I), Laval théologique et philosophique, 64.1, 2008, p. 105-125.
  • Paul Mazliak, Avicenne & Averroès : Médecine et biologie dans la civilisation de l'Islam, Vuibert/Adapt, 2004. (ISBN 2711753263).
  • Ernest Renan, Averroès et l'Averroïsme, 1852, remanié en 1860. Quatre éditions disponibles : Maisonneuve & Larose, 2002 (préface d'Alain de Libera) (ISBN 2706816082), Ennoïa, 2004 (ISBN 2914894058), Le Serpent à plumes, 2009 (présentée par Ali Benmakhlouf) (ISBN 2753804060), BiblioBazaar, 2009 (ISBN 1103373501).
  • Colette Sirat et Marc Geoffroy, L'original arabe du grand commentaire d'Averroès au "De anima" d'Aristote, Paris, Vrin, 2005.
  • Dominique Urvoy, Averroès – Les ambitions d'un intellectuel musulman, Flammarion – Champs/Biographies, 1998, (ISBN 978-2-0812-1799-7).

Cinéma et littérature

Notes et références

  1. Maurice-Ruben Hayoun et Alain de Libera, Averroès et l'averroïsme, PUF (Que sais-je ?), 1991, p. 121.
  2. Majid Fakhry (2001). Averroes: His Life, Works and Influence. Oneworld Publications.
  3. Roger Arnaldez, Averroès : un rationaliste en Islam, Balland, , 233 p. (ISBN 2715811527), p. 28.
  4. http://www.maaber.org/philosophy/averroes.htm
  5. Alain de Libera, « Pour Averroès », in Averroès, L'Islam et la raison, GF-Flammarion, 2000, p. 9-12.
  6. Averroès, Dévoilement des méthodes de démonstration des dogmes de la religion musulmane, in L'Islam et la raison, GF-Flammarion, 2000, p. 112-113. Le paradigme de l'Artisan divin s'inspire peut-être du « fabricant de l'univers » de Platon, Timée, 28c, in Œuvres complètes, Flammarion, 2008, p. 1989.
  7. L'idée d'un savoir comme connaissance des règles de production d'un objet, distinct de la simple expérience sensorielle de l'objet, se trouve chez Aristote, Métaphysique, Pocket (Agora), 1991, livre A, ch. 1, 981b, p. 41. Pour la science comme connaissance de la cause d'un étant, cf. Seconds Analytiques, GF-Flammarion, 2005, livre I, ch. 13, p. 130-137.
  8. Rémi Brague, « La physique est-elle intéressante ? », in Au moyen du Moyen Âge, Champs-Flammarion, 2006, 2è partie, p. 152.
  9. Rémi Brague, « La physique est-elle intéressante ? », in Au moyen du Moyen Âge, op. cit., 2e partie, p. 145.
  10. Averroès, L'intelligence et la pensée, GF-Flammarion, 1998.
  11. a b et c Henri de Monvallier, « Entretien avec Alain de Libera : autour de l’Archéologie du sujet. Pourquoi une archéologie du sujet ? » Actu Philosophia, dimanche 4 janvier 2009.
  12. Joris-Karl Huysmans, À rebours, Folio (Classique), 1977 (1884), « Préface écrite vingt ans après le roman » (1903), p. 68 : « Dieu creusait pour placer ses fils et il n'opérait que dans l'ombre de l'âme, dans la nuit. »
  13. Averroès, Dévoilement des méthodes de démonstration des dogmes de la religion musulmane, in L'Islam et la raison, GF-Flammarion, 2000, p. 121-122, paragraphe de Marc Geoffroy.
  14. Pour la réception du traité De l'âme par Averroès, cf. « Commentaires arabes du De anima », in Aristote, De l'âme, Folio (Essais), 2005, p. 218-226 (« Averroès »).
  15. Aristote, op. cit., livre III, ch. 3, p. 157-162.
  16. Aristote, op. cit., livre III, ch. 7, p. 171, et ch. 8, p. 174. Sur cette double valeur ontologique et épistémologique de l'imagination dans l'aristotélisme, cf. Cornelius Castoriadis, « La découverte de l'imagination », in Domaines de l'homme, Seuil (Points Essais), 1986, p. 409-454.
  17. Averroès, Dévoilement des méthodes de démonstration des dogmes de la religion musulmane, op. cit., p. 122.
  18. Averroès, Dévoilement des méthodes de démonstration des dogmes de la religion musulmane, in L'Islam et la raison, GF-Flammarion, 2000, p. 115, paragraphe de Marc Geoffroy.
  19. Alain de Libera, « Pour Averroès », in Averroès, L'Islam et la raison, op. cit., p. 36.
  20. Averroès, Dévoilement des méthodes de démonstration des dogmes de la religion musulmane, in L'Islam et la raison, op. cit., p. 112-113.
  21. Averroès, Dévoilement des méthodes de démonstration des dogmes de la religion musulmane, in L'Islam et la raison, op. cit., p. 108. cf. aussi le Discours décisif (§3-4), in L'Islam et la raison, op. cit., p. 82, qui s'appuie sur le Coran, VII, 185 : « N'ont-ils pas médité sur le royaume des cieux et de la terre, et toute chose qu'Allah a créée, et que leur terme est peut-être déjà proche ? En quelle parole croiront-ils après cela ? ».
  22. Les socialistes et utopistes font de Platon un révolutionnaire, souhaitant renverser l'ordre établi et le remplacer par une société fondée sur la raison. cf. par exemple Tommaso Campanella, Cité du Soleil, Ressouvenances, 1998, et Alain Badiou, République de Platon, Fayard (Essais), 2012.
  23. Hegel, quant à lui, fait de Platon un progressiste qui exprime les idées de son temps dans les Principes de la philosophie du droit, P.U.F. (Quadrige), 1998 (1821), Préface, p. 103.
  24. Enfin, Leo Strauss, Sur une nouvelle interprétation de la philosophie politique de Platon, Allia, 2004, et Allan Bloom, La cité et son ombre : Essai sur la République de Platon, Félin (Les marches du temps), 2006, interprètent Platon comme un conservateur.
  25. Étienne Gilson, Les métamorphoses de la Cité de Dieu, Vrin, 1952, ch. IV.
  26. Alain de Libera, « Pour Averroès », in Averroès, L'Islam et la raison, GF-Flammarion, 2000, p. 74-75.
  27. Dante Alighieri, De Monarchia, livre I, ch. 3, in Œuvres Complètes, Le Livre de Poche, 2002, p. 442-443. Dante place également Averroès dans les limbes de son « Enfer » : Divine Comédie, « Enfer », chant IV, v. 144, in Œuvres Complètes, op. cit., p. 615.
  28. Alain de Libera, « Pour Averroès », op. cit., p. 67-72.
  29. Thomas d'Aquin, De l'unité de l'intellect contre les averroïstes. Trad. fr. par Alain de Libera, sous le titre Contre Averroès, GF-Flammarion, 1999.
  30. Lucien-Samir Arezki Oulahbib, Pourquoi l'islam n'a pas détruit les statues de Bouddha durant quatorze siècles ? « Averroès... n'a fait que s'insurger contre le libre arbitre comme l'a démontré Thomas d'Aquin dans son Contre Averroès (trad. Alain de Libera, Garnier-Flammarion). En effet, pour Averroès, « l'homme ne pense pas, il est pensé… »
  31. Pour la conception de l'idéologie et la question de la lutte des classes dans la théorie utilisées dans l'interprétation marxiste d'Averroès, cf. Karl Marx, L'idéologie allemande, Ire partie, B, et Louis Althusser, Idéologie et appareils idéologiques d'État.
  32. Ernst Bloch, Avicenne et la gauche aristotélicienne, Premières Pierres, 2008.
  33. Ernst Bloch, La philosophie de la Renaissance, Payot & Rivages (Petite Bibliothèque), 2007, ch. 1-2.
  34. Rémi Brague, Au moyen du Moyen Âge, Champs-Flammarion, 2006, 5e partie, p. 412. Le chapitre considéré, « Averroès est-il un gentil ? », est court et virulent : il consiste en une accumulation rapide de sources historiques et philologiques, invoquées contre le mythe Averroès fabriqué par la « République française » au nom de la tolérance (p. 398).
  35. Ibid., p. 407.
  36. Alain de Libera, « Pour Averroès », in Averroès, L'Islam et la raison, GF-Flammarion, 2000, p. 75. cf., pour l'interprétation de cette thèse en termes de conservatisme politique, l'interview de Rémi Brague sur la chaîne KTO du 24 novembre 2006.
  37. Platon, République, livre V, 473c-d ; du même, Lettre VII, 326a-b, in Œuvres complètes, Flammarion, 2008, respectivement p. 1640 et p. 641.
  38. Rémi Brague, op. cit., p. 409. Voir Heidegger et le nazisme.
  39. Rémi Brague, op. cit., p. 410-411. Pour l'« intellectuel organique » chez Gramsci, voir Attilio Monasta, L'intellectuel organique selon Gramsci.
  40. (en) George Sarton, Introduction to the History of Science (cf. Prof. Hamed A. Ead, Averroes As A Physician).
  41. Ernst Bloch, La philosophie de la Renaissance, Payot & Rivages (Petite Bibliothèque), 2007, p. 28-29 ; et Averroès, L'intelligence et la pensée, Introduction d'Alain de Libera, GF-Flammarion, 1998, p. 40-41.
  42. Saint Bonaventure, vers 1260 : l'erreur averroïste consiste à dire qu'« il n'y a qu'une seule âme intellectuelle pour tous les hommes, et cela tant pour l'intellect agent que pour l'intellect potentiel » (Commentaire aux 'Sentences' de Pierre Lombard, II, d. 18 a 2, qu. 1, in Opera, t. II, p. 446-447).
  43. Thomas d'Aquin, De l'unité de l'intellect (1270), trad. Alain de Libera, Vrin.
  44. La condamnation parisienne de 1277, édition du texte latin et trad. David Piché, Vrin, 2002.
  45. Louis Valcke, Pic de la Mirandole : Un itinéraire philosophique, Les Belles Lettres (Le Miroir des Humanistes), 2005, ch. 3, section 4, p. 97-102.
  46. Dans son autobiographie, Joseph Anton, p. 35.
  47. La mosquée Averroès s'installe à La Paillade.
  48. Pour Rémi Brague, voir son interview sur la chaîne KTO du 24 novembre 2006. La réponse de Luc Ferry se trouve sur sa chaîne YouTube officielle : visionner en ligne.
  49. Lors d'une conférence à Sciences Po Paris, sur le « Dialogue islamo-chrétien », 14 avril 2011, organisée par le Centre Saint-Guillaume et Salaam, deux associations étudiantes. Voir aussi la polémique à propos du livre Aristote au mont Saint-Michel.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes