Assurage (alpinisme et escalade)

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 15 décembre 2014 à 05:28 et modifiée en dernier par LeFit (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.
Une jeune grimpeuse assurée « en moulinette » sur SAE

Pour les sports de progression en hauteur comme l'escalade, l'alpinisme, la spéléologie, la randonnée pédestre, l'assurage est une technique fondamentale de réduction des conséquences de la chute d'une personne. Cela s'effectue par le contrôle de la corde de progression, de manière à ce que la personne engagée soit retenue si elle venait à chuter.

Cette tâche est habituellement assignée à un assureur. Cependant l'auto-assurage, notamment en solo, est aussi possible, mais il s'agit d'une technique avancée. Pour assurer un grimpeur, l'assureur utilise généralement le principe de la friction de la corde sur un objet qui va lui permettre de coulisser mais qui pourra être bloqué manuellement, voire automatiquement dans certains cas, lors de la chute. Lors de leur travail en hauteur, les cordistes doivent aussi s'assurer eux-mêmes mais généralement avec des moyens complémentaires à uniquement la corde.

Histoire

Historiquement, assurer un grimpeur signifiait simplement que l'assureur passait un bout de corde autour de sa taille ou de l'épaule. La friction de la corde sur le corps de l'assureur était utilisée pour arrêter la chute. Cette technique est encore utilisée par des sportifs ayant besoin de se mouvoir rapidement sur des terrains de faible pente comme en alpinisme, mais elle n'est plus utilisée sur du rocher raide car elle moins efficace et peut causer des blessures à un assureur devant arrêter une longue chute.

Techniques d'assurage

Assurage en mouvement

Lorsqu'ils pratiquent l'assurage en mouvement, les membres d'une cordée s'assurent mutuellement sans arrêter la progression d'aucun des membres de la cordée.

Assurage en mouvement sans point de protection

Deux alpinistes encordés progressant sur une pente de neige, corde tendue
Cordée pratiquant l'assurage en mouvement sans point de protection

Lorsqu'elles pratiquent l'assurage en mouvement sans point de protection, les personnes s'assurent mutuellement en étant simplement reliées par une corde : si l'un des membres de la cordée chute, c'est l'autre ou les autres membres de la cordée qui retiennent ou tentent de retenir sa chute. Ce mode d'assurage suppose une progression sur un terrain peu raide pour que la chute de l'un des membres de la cordée puisse être arrêtée. Aussi cette technique est utilisée en alpinisme sur des terrains peu difficiles ou sur glacier.

Lorsqu'on progresse sur un glacier peu raide, le principal risque est généralement la chute dans une crevasse qui n'est pas toujours visible[1]. Le simple encordement des alpinistes permet d'enrayer la chute de l'un des alpinistes par son ou ses compagnons de cordée à condition de respecter certaines précautions (grande longueur de corde entre les membres de la cordée et progression corde tendue principalement), le frottement de la corde sur la lèvre de la crevasse aidant à freiner la chute[2].

En terrain rocheux comme sur neige ou sur glace, lorsque le terrain est peu raide, la corde qui relie les membres de la cordée peut permettre d'enrayer une chute sans que la corde ne soit reliée à quelque ancrage fixe. Cependant, seul celui qui est au-dessus (le premier de cordée), est généralement en mesure de retenir son compagnon[3], à condition de respecter quelques principes :

  • limiter le nombre de membre de la cordée (deux alpinistes voire éventuellement trois alpinistes) ;
  • avoir une longueur de corde réduite entre membre de la cordée (pour permettre une réaction rapide du premier de cordée)[3] ;
  • progresser corde tendue afin que le premier de cordée sente immédiatement la chute de son second et puisse réagir rapidement[3].

Assurage en mouvement avec points de protection

Lorsque le risque de chute augmente et que le terrain de progression se redresse, il devient difficile aux membres d'une cordée d'arrêter la chute de l'un d'entre eux par la seule présence de la corde qui les relie. Aussi, l'assurage est obtenu en faisant passer la corde dans au moins un point de protection (ou point d'assurage) entre les membres de la cordée[4] : si la chute d'une personne provoque celle de toute la cordée, celle-ci sera retenue par le point de protection. Les points de protection peuvent être naturels (arbre ou bloc rocheux derrière lequel on fait passer la corde)[4] ou artificiels (piton, coinceur, sangle passée autour d'un becquet rocheux, broche à glace, etc.).

Assurage par longueurs

Un homme, assis sur une vire rocheuse d'une paroi verticale, assure avec une corde un autre homme en train de grimper quelques mètres en dessous
Cordée faisant l'ascension d'une voie de plusieurs longueurs. Le premier de cordée, « vaché » (attaché) au relais, assure son second en train de grimper.

Lorsque le terrain s'approche de la verticalité, l'assurage en mouvement avec points de protection ne suffit plus pour assurer la sécurité des membres de la cordée. Il devient alors nécessaire que l'assureur arrête sa progression pour sécuriser la progression de la cordée. Les membres de la cordée progressent alors alternativement, de relais en relais.

L'assurage par longueurs se déroule selon le cycle suivant[5] :

  • les deux membres de la cordée (parfois trois) sont au relais sur lequel ils sont attachés ;
  • le premier de cordée quitte le relais et grimpe « en tête » assuré par son second (ou l'un de ses seconds), il passe la corde dans les points d'assurage ;
  • le premier de cordée atteint le relais suivant sur lequel il s'attache ;
  • le second de cordée (ou les seconds) grimpe à son tour assuré par le premier et le rejoint au relais.

Généralement, l'assureur (qu'il soit premier ou second de la cordée) passe sa corde par un système d'assurage qui permet à la corde de coulisser alors que le grimpeur progresse, mais permet aussi à l'assureur de bloquer facilement la corde en cas de chute. L'assureur peut également utiliser un nœud de demi-cabestan et un mousqueton comme dispositif d'assurage, mais cela peut avoir l'inconvénient de toronner la corde. En utilisant un dispositif d'assurage, l'assureur peut maintenir tout le poids du grimpeur avec très peu de force et même arrêter facilement une longue chute. Cependant, sur certains terrains, en particulier en neige lorsque les relais sont fragiles, il peut être préférable de pratiquer un assurage à l'épaule ou à la taille plutôt que d'utiliser un système d'assurage afin de limiter la sollicitation du relais ; l'assurage à l'épaule ou à la taille peut également être utilisé en terrain rocheux peu raide afin de gagner en efficacité dans les manœuvres de corde.

Moulinette

Grimpeuse faisant l'ascension d'un dièdre, assurée en moulinette par autre grimpeur positionné debout au pied de la voie d'escalade
Grimpeur assuré en « moulinette »

Lorsqu'on grimpe des voies d'une seule longueur, en falaise école notamment, il est courant de s'assurer « en moulinette ». Ce mode d'assurage est dérivé de l'assurage par longueurs : au lieu d'assurer le second depuis le relais, l'assureur assure depuis le bas de la voie, la corde reliant le grimpeur à son assureur passant alors par un point d'ancrage solide situé au sommet de la voie. Cela suppose, pour installer la moulinette, que la voie ait d'abord été parcourue « en tête » par un grimpeur assuré par son second afin de passer la corde dans le point d'ancrage situé au sommet de la voie ou encore que ce point d'ancrage soit accessible par un autre moyen (chemin).

Matériel d'assurage

Parmi l'ensemble du matériel d'escalade ou du matériel d'alpinisme, une partie est destinée à l'assurage.

Corde

La corde est nécessaire à l'assurage quelle que soit la technique adoptée, elle permet de retenir la chute ou le déséquilibre du compagnon de cordée.

Baudrier

Si les premiers grimpeurs s'encordaient en nouant la corde autour de la taille, l'usage du baudrier sur lequel est attachée la corde s'est généralisé depuis les années 1970 et son usage est aujourd'hui devenu quasiment systématique. Il permet d'améliorer la sécurité et le confort de la personne assurée.

Points d'ancrage et relais

Dès lors que risque de chute augmente et que le terrain de progression se redresse, la sécurité de la progression des alpinistes ou des grimpeurs nécessite de relier la corde au sol ou à la paroi au moyen de points d'assurage et par la confection de relais. Le matériel utilisé pour constituer ces points d'assurage et relais dépend du terrain de progression :

  • en neige, on pourra utiliser un piolet planté verticalement (si la neige est suffisamment dure), utiliser une ancre à neige, ou encore utiliser un corps mort réalisé au moyen d'un piolet ou d'un sac enfoui dans la neige[6] ;
  • sur glace, les points d'assurage et les relais sont généralement confectionnés au moyen de broches à glace mais peuvent également être des abalakovs réalisés avec une cordelette passée dans une lunule ;
  • en rocher, les points d'assurage et relais pourront être obtenus en utilisant des éléments naturels (arbre, becquet rocheux, etc., sur lesquels un anneau de sangle ou la corde est fixé) ou en utilisant des matériels tels que des pitons, des coinceurs ou encore des broches scellées.

Mousqueton et dégaine

Pour relier la corde aux points d'ancrage et relais, les alpinsites et grimpeurs utilisent des mousquetons et des dégaines.

Dispositif d'assurage

Le dispositif d'assurage permet à la corde de coulisser alors que le grimpeur progresse, mais permet aussi à l'assureur de bloquer facilement la corde en cas de chute. L'assureur peut également faire redescendre doucement le grimpeur jusqu'à un point où l'escalade peut être reprise, en jouant avec l'angle de la corde dans le dispositif d'assurage et en faisant coulisser la corde à la main.

Enjeux

L'assureur a un rôle déterminant lors d'une ascension car c'est lui qui est responsable de la sécurité du grimpeur ou de l'alpiniste. Il en découle un lien psychologique entre l'assureur et l’ascensionniste. L'un doit avoir confiance envers l'autre qui lui-même doit bien connaître son partenaire afin de repérer ses limites et les risques qu'il prend. Il est nécessaire que les différents membres de la cordée aient un vocabulaire adapté car une communication claire est la clef de ne pas commettre d'erreur fatale.

Bibliographie

Notes et références

  1. Érik Decamp, p. 38
  2. Érik Decamp, p. 40 et 42
  3. a b et c Érik Decamp, p. 30
  4. a et b Érik Decamp, p. 31
  5. Érik Decamp, p. 60
  6. Érik Decamp, p. 112