Pays d'Arlon

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Pays d'Arlon
Pays arlonais
Drapeau de Pays d'Arlon
Drapeau
Noms
Nom luxembourgeois Arelerland
Nom Allemand Areler Land
Altbelgien-Süd
Südostecke
Administration
Pays Drapeau de la Belgique Belgique
Région Drapeau de la Région wallonne Région wallonne
Province Drapeau de la province de Luxembourg Province de Luxembourg
Capitale Arlon
Statut Région linguistique
Démographie
Gentilé Arlonais
Géographie
Coordonnées 49° 40′ nord, 5° 46′ est
Divers
Langues traditionnelles Arlonais (dialecte luxembourgeois)
Localisation
Géolocalisation sur la carte : Belgique
Voir sur la carte topographique de Belgique
Pays d'Arlon
Géolocalisation sur la carte : Belgique
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Pays d'Arlon

Le Pays d’Arlon ou Pays arlonais (en luxembourgeois : Arelerland) est une sous-région traditionnelle et culturelle de Belgique située dans le sud-est de la province de Luxembourg en Région wallonne. Elle possède une forte culture luxembourgeoise et apparaît très liée au grand-duché de Luxembourg voisin[1]. Sa capitale régionale est Arlon.

Il s'agit de la partie de la Belgique où le luxembourgeois est la langue vernaculaire traditionnelle, la région étant limitrophe avec le Luxembourg[2]. L’Areler (arlonais) est le dialecte le plus occidental du luxembourgeois[3].

La Communauté française de Belgique reconnaît par un décret de 1990 la spécificité linguistique et culturelle des utilisateurs des « langues régionales endogènes », dont le luxembourgeois[4].

Toponymie[modifier | modifier le code]

Géographie[modifier | modifier le code]

Ve d'Arlon et de l'Église Saint-Donat, sur la colline de la Knippchen.

La région est délimitée à l’ouest par la Gaume (une autre sous-région linguistique de Belgique), au nord par l’Ardenne (dont fait partie la pointe nord de la région), à l’est par le Luxembourg et au sud par la région française du Pays Haut.

Rose des vents Ardenne Oesling Rose des vents
Gaume N Gutland
O    Pays d’Arlon    E
S
Pays Haut

Elle correspond en grande partie à l’arrondissement d'Arlon. Elle comprend, du nord au sud, les communes de Fauvillers (partie orientale), Martelange, Attert, Habay (uniquement la section de Hachy), Arlon, Messancy et Aubange (partie orientale).

Géologie[modifier | modifier le code]

Le Pays d’Arlon est situé sur deux régions géologiques distinctes. Ses trois quarts sud se trouvent en Lorraine belge, seule région du Jurassique (Ère secondaire) de Belgique. Son quart nord, qui couvre les communes de Fauvillers, Martelange et Attert (en partie), se trouve en Ardenne, dont le terrain date du Dévonien inférieur. La transition se fait par une bande du Trias (Ère secondaire) traversant le centre de la commune d’Attert[5].

Les trois cuestas caractéristiques de la Lorraine belge se retrouvent dans le Pays d’Arlon :

Localités[modifier | modifier le code]

Le Pays d'Arlon correspond à peu de chose près au territoire de l'arrondissement administratif d'Arlon.

Voici les localités appartenant au Pays d’Arlon, classées par commune et section avec leur nom luxembourgeois entre parenthèses :

Cours d’eau[modifier | modifier le code]

Le Pays d’Arlon est drainé par des cours d’eau appartenant aux deux bassins versants suivants :

Histoire[modifier | modifier le code]

Contexte : période néerlandaise[modifier | modifier le code]

Carte des dix-sept provinces composant le Royaume uni des Pays-Bas, plus le Grand-duché de Luxembourg, au sud, propriété du roi des Pays-Bas, Guillaume Ier.

Après la défaite de Napoléon Ier et la fin du Premier Empire français qui avait annexé les anciens Pays-Bas autrichiens, dont faisait partie le Luxembourg au sens large, les puissances européennes victorieuses se réunirent lors du congrès de Vienne pour réorganiser leurs territoires et leurs frontières. Ells décidèrent de la création d'un nouvel état tampon entre la France et la Confédération germanique (née au même moment), en créant le royaume uni des Pays-Bas (que l'on peut comparer au territoire du Bénélux actuel). Les puissances choisirent de confier ce nouvel état à Guillaume Ier de la maison d'Orange-Nassau avec le titre de « roi des Pays-Bas ». Cependant, la création de la Confédération germanique avait privé Guillaume de quelques principautés et territoires privés situés dans la région de Coblence. En conséquence, il reçut, à titre de compensation, des terres situées directement au sud de son nouveau royaume mais qui demeuraient sa propriété personnelle : le grand-duché de Luxembourg, formé pour l'occasion sur les bases de l'ancien Duché de Luxembourg et dont il devint le premier grand-duc. Ce territoire correspond grosso modo à l'actuel Luxembourg et à la province belge de Luxembourg et formait une union personnelle avec le Royaume uni des Pays-Bas dont le souverain partageait alors les deux titres : roi et grand-duc. Le Pays d'Arlon en faisait donc partie, sans encore exister officiellement.

Genèse : période belge[modifier | modifier le code]

Les sous-régions linguistiques de Wallonie
  • Pays d’Arlon
  • Gaume
Les limites du territoire belge avant le traité des XXIV articles.

Cependant, le royaume uni des Pays-Bas et ses dix-sept provinces ne vécut pas longtemps. En effet, en aout 1830 éclate la révolution belge qui mène la déclaration d'indépendance de la Belgique le , lors de laquelle les huit[7] provinces méridionales du Royaume font sécession, entrainant le début de la guerre belgo-néerlandaise. Afin de régler ce conflit, les grandes puissances européennes se réunirent lors de la conférence de Londres pour aboutir à la reconnaissance de la jeune Belgique et à l'établissement de ses frontières. Le gouvernement provisoire de Belgique revendiquait alors tout le Luxembourg dont la population avait en partie adhéré à la révolution avec des figures locales telles que Charles Metz, Jean-Baptiste Nothomb ou Jean-Pierre Willmar (la population de la capitale-forteresse, cependant, était restée fidèle au roi grand-duc, avec des « orangistes » comme Jean Ulveling ou Jean-Jacques Willmar).

Le , la conférence adopte le protocole n°24 qui envisage l'achat du Grand-duché de Luxembourg par la Belgique, ce qui fut refusé par Guillaume Ier. A l'issue des négociations, un premier traité est signé, le traité des XVIII articles dans lequel l'article 3 précise que[8] :

« Les cinq puissances emploieront leurs bons offices pour que le statu quo dans le grand-duché de Luxembourg soit maintenu pendant le cours de la négociation séparée que le souverain de la Belgique ouvrira avec le roi des Pays-Bas et avec la Confédération germanique, au sujet dudit grand-duché, négociation distincte de la question des limites entre la Hollande et la Belgique. »

A la suite de cela, les cinq puissances (Autriche, France, Pays-Bas, Prusse, Royaume-Uni et Russie) décidèrent de partager le Grand-Duché entre son propriétaire légitime, Guillaume Ier, et le jeune État belge. Chose nouvelle dans l'esprit des diplomates de l'époque, le partage devait se faire dans le respect de la frontière linguistique entre les parlers germanique (luxembourgeois, allemand etc.) omniprésents dans la partie orientale du Luxembourg et les parlers romans (wallon et gaumais) en vigueur dans la partie occidentale.

Les négociations débutent alors et l'ambassadeur plénipotentiaire du roi des français, Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, insista pour que la route menant de Metz à Liège (dont une partie deviendra l'actuelle nationale 4), en passant par Thionville, Longwy, Arlon, Martelange et Bastogne, fût attribuée à la Belgique avec les villages des alentours. Ceci dans le but de la soustraire à l'influence de la Confédération germanique dont le Grand-Duché de Luxembourg était un État-membre; d'ailleurs une garnison prussienne exerçait depuis 1815 le droit de garnison dans la capitale-forteresse de Luxembourg. Localement, des propriétaires terriens ou maîtres de forge des débuts de l'industrie sidérurgique, firent pour leur part jouer leurs relations pour que leurs terres ou entreprises fussent rattachées à la Belgique plutôt que d'être laissées au Grand-Duché. Parmi eux, Jean-Baptiste Nothomb alors détaché au cabinet du ministre des Affaires étrangères qui tenta de rattacher Pétange (où sa famille dispose d'un château) mais sans succès[9].

Un nouveau traité fut alors signé le  : le traité des XXVII articles, dont l'article 2 définit clairement la nouvelle frontière entre la Belgique et le Luxembourg[10] :

« Dans le grand-duché de Luxembourg, les limites du territoire belge seront telles qu'elles vont être décrites ci-dessous :

A partir de la frontière de France entre Rodange, qui restera au grand-duché de Luxembourg, et Athus, qui appartiendra à la Belgique, il sera tiré, d'après la carte ci-jointe, une ligne qui, laissant à la Belgique la route d'Arlon à Longwy, la ville d'Arlon avec sa banlieue, et la route d'Arlon à Bastogne, passera entre Messancy, qui sera sur le territoire belge, et Clémency, qui restera au grand-duché de Luxembourg, pour aboutir à Steinfort, lequel endroit restera également au grand-duché. De Steinfort, cette ligne sera prolongée dans la direction d'Eischen, de Hecbus, Guirsch, Oberpalen, Grende, Nothomb, Parette et Perlé, jusqu'à Martelange ; Hecbus, Guirsch, Grende, Nothomb et Parette devant appartenir à la Belgique, et Eischen, Oberpalen, Perlé et Martelange, au grand-duché. De Martelange, ladite ligne descendra le cours de la Sûre, dont le thalweg servira de limite entre les deux États, jusque vis-à-vis Tintange, d'où elle sera prolongée aussi directement que possible vers la frontière actuelle de l'arrondissement de Diekirch, et passera entre Surrel, Harlange, Tarchamps, qu'elle laissera au grand-duché de Luxembourg, et Honville, Hivarchamps et Loutermange, qui feront partie du territoire belge ; atteignant ensuite, aux environs de Doncols et de Soulez, qui resteront au Grand-Duché, la frontière actuelle de l'arrondissement de Diekirch, la ligne en question suivra ladite frontière jusqu'à celle du territoire prussien. Tous les territoires, villes, places et lieux situés à l'ouest de cette ligne, appartiendront à la Belgique ; et tous les territoires, villes, places et lieux situés à l'est de cette même ligne, continueront d'appartenir au grand-duché de Luxembourg. »

Ce traité ne fut toutefois pas reconnu avant 1838 par Guillaume Ier qui considérait toujours la Belgique comme non-viable et qui maintenait l'espoir de récupérer ses territoires et son Royaume. Toutefois, c'était bel et bien la Belgique qui contrôlait pratiquement le grand-duché, sauf sa capitale-forteresse.

Il fallut attendre le traité des XXIV articles signé le pour que la séparation soit officiellement ratifiée entre les deux parties par ce nouveau traité qui se basait sur celui de 1831, en reprenant les termes de l'article 2 concernant la frontière. Les nouveaux territoires belges devinrent alors officiellement la neuvième province du Royaume : la province de Luxembourg et c'est ainsi que naquit le « Pays d'Arlon », luxembourgophone (Arelerland), qui y fut rattaché.

Avec le temps, et du fait qu'Arlon est chef-lieu de province, ville de garnison, siège d'établissements d'enseignement secondaire, nœud ferroviaire, etc., la sous-région constituée par le Pays d'Arlon a été progressivement francisée.

XXe siècle[modifier | modifier le code]

On sait que l'Empire allemand de Guillaume II aurait annexé le Pays d'Arlon, en même temps que le Grand-Duché de Luxembourg occupé en dépit de sa neutralité imposée en 1867, si les puissances centrales avaient gagné la Première Guerre mondiale (1914-1918). On peut affirmer sans crainte de se tromper que le même sort aurait frappé ces deux entités si Hitler l'avait remporté lors de la Seconde Guerre mondiale.

Recensements linguistiques pour les communes du Pays d’Arlon[modifier | modifier le code]

Le recensement de 1846 n'enquêta que sur la langue couramment employée. À partir de 1866, le recensement portait sur la connaissance des différentes langues nationales. À partir de 1910, on questionnait sur la connaissance, mais également sur la langue utilisée le plus fréquemment, sans pour autant spécifier dans quel contexte (vie privée, publique, professionnelle).

Langues exclusivement connues :

Langue exclusivement ou le plus fréquemment parlée :

Les bornes frontières[modifier | modifier le code]

Le tracé de la frontière belgo-luxembourgeoise[11] a été défini lors de la conférence de Londres du . Seules la partie francophone du Luxembourg et la région d’Arlon furent accordées à la Belgique.

Le furent installées 507 bornes, dont 286 en fonte, le long de la frontière à la suite du traité de Maastricht. De chaque côté des bornes se trouvent les armoiries respectives. De nombreuses bornes sont trouées par des impacts de balles tirées par des chasseurs mécontents du partage du Luxembourg en 1839 ou lors des guerres mondiales.

Galerie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Jérôme Didelot, « On aurait dû rester Luxembourgeois », RTL,‎ (lire en ligne)
  2. « La langue luxembourgeoise en Belgique », sur luxembourg.public.lu ; site officiel du Grand-Duché de Luxembourg,  : « 15.000 à 20.000 personnes originaires de la région de l’Arelerland (pays d’Arlon, province de Luxembourg, Belgique), contiguë au Grand-Duché de Luxembourg, parlent le luxembourgeois comme langue maternelle. Dans les années 1960, ce furent encore approximativement 50.000 locuteurs. ».
  3. « Dialectes du luxembourgeois (52-ACB-db) », sur hortensj-garden.org ; site de l'inventaire des langues et dialectes du monde par l'Observatoire linguistique.
  4. « Accueil », sur Service des langues régionales endogènes de la Communauté française Wallonie-Bruxelles.
  5. Une introduction à la géologie de la Wallonie (Université de Liège).
  6. Géologie de la Lorraine belge.
  7. Anvers, Brabant, Flandre-Occidentale, Flandre-Orientale, Hainaut, Liège, Limbourg, et province de Namur
  8. « Protocole du 20 janvier 1831 et Projet de traité du 26 juin 1831 (traité des XVIII articles). », sur mjp.univ-perp.fr.
  9. « Texte de la conférence de Patrick Nothomb à l'université de Luxembourg le 11 février 2019 au campus du Limpertsberg. », sur Cercle-werner.aubange.be.
  10. « Traité des XXVII articles. », sur mjp.univ-perp.fr.
  11. (nl) « De grenspalen tussen België en Luxemburg », sur Grenspalen in de Benelux.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Publications de la Société pour la recherche et la conservation des monuments historiques dans le Grand-Duché de Luxembourg, vol. XV, (lire en ligne), « Essai étymologique sur les noms de lieux du Luxembourg germanique : Deuxième division - Luxembourg belge »
  • Frédéric Kiesel, Légendes et contes du pays d'Arlon, P. Legrain, 1988 (BNF 35691077)
  • Jean-Marie Triffaux, Combats pour la langue dans le Pays d'Arlon aux XIXe et XXe siècles : Une minorité oubliée ?, Arlon, éd. La Vie arlonaise, 2002, 478 pages (ill.).
  • Edouard Marc Kayser (lb), Quelque part entre Vienne et Londres... Le Grand-Duché de Luxembourg de 1815 à 1867, Luxembourg, éd. Saint-Paul, 1990 (ISBN 2879630770)
  • Gilbert Trausch, Le Luxembourg belge ou l'autre Luxembourg; plaquette de 32 p. (ill. → cartes, plans, photos) éditée à Luxembourg en 1996 par la Banque de Luxembourg.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]