Alexandre Soljenitsyne

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Alexandre Soljenitsyne
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Alexandre Soljenitsyne en 1998.
Nom de naissance Alexandre Issaïevitch Soljenitsyne
Naissance
Kislovodsk, RSFS de Russie
Décès (à 89 ans)
Moscou, Russie
Activité principale
Écrivain
Distinctions
Prix Nobel de littérature (1970)
Prix Templeton (1983)
Grand Prix de l'Académie des sciences morales et politiques (2000)
Prix d'État (Russie) 2007
Auteur
Langue d’écriture russe

Œuvres principales

Alexandre Issaïevitch Soljenitsyne (en russe : Александр Исаевич Солженицын, ISO 9 : Aleksandr Isajevič Solženicyn), né le 28 novembre 1918 ( dans le calendrier grégorien) à Kislovodsk et mort le à Moscou, est un écrivain russe et dissident soviétique, auteur notamment d'Une journée d'Ivan Denissovitch, de L'Archipel du Goulag et de La Roue rouge.

Biographie

Les années de formation

Alexandre Issaïevitch[1] Soljenitsyne[2] naît le 28 novembre 1918 ( dans le calendrier grégorien)[3] à Kislovodsk, dans le nord du Caucase[4]. Son père, Issaaki Sémionovitch Soljenitsyne, étudiant en philologie et en histoire à l'université de Moscou, s'engage volontairement dans l'armée russe dès l'été 1914 et sert en Prusse-Orientale[5]. Au printemps 1918, devenu officier, de retour du front, il se blesse grièvement lors d'un accident de chasse et meurt d'une septicémie le 15 juin 1918 à l'hôpital de Gueorguievsk. La mère d'Alexandre, Taïssia Zakharovna Chtcherbak, d'origine ukrainienne, qui est fille d'un self-made man paysan de la région de la Kouma, est alors étudiante en agronomie à Moscou. Les parents d'Alexandre se sont connus à Moscou lors d'une permission d'Issaaki en avril 1917 et se sont mariés le dans la brigade d'Issaaki[6].

Jusqu'à l'âge de six ans, le jeune Alexandre est confié à la famille de sa mère tandis que celle-ci travaille comme sténodactylo à Rostov-sur-le-Don. Il reçoit des rudiments d'instruction religieuse, tout en étant admis parmi les Pionniers. L'origine sociale « malsaine » de sa famille maternelle lui vaut d'ailleurs une exclusion temporaire de l'organisation[7]. À Rostov, il partage avec sa mère[8] un petit logement de neuf mètres carrés situé à proximité de l'immeuble de la Guépéou[9]. Épris très jeune de littérature, ayant fait ses premiers essais littéraires alors qu'il était collégien, Alexandre Soljenitsyne choisit néanmoins de poursuivre des études universitaires de mathématiques et de physique. À la fois parce qu'il n'y avait pas de chaire de littérature à l'université de Rostov[10] et pour des raisons alimentaires. Il suit des cours de philosophie et de littérature par correspondance ; il s'inscrit à un cours d'anglais et suit également des cours de latin[11]. Comme il le reconnaissait volontiers, à l'époque il adhère encore à l’idéologie communiste dans laquelle il a grandi[12],[13].

Le , il épouse Natalia Alexeïevna Rechetovskaïa, une étudiante en chimie et pianiste dont il fait la connaissance en septembre 1936[14]. Il passe avec succès ses examens finaux de mathématiques le [15]. Il est à Moscou pour ses examens de littérature le , quand éclate la guerre contre le Troisième Reich.

La guerre

Lors de l'invasion allemande en 1941, il manque d'abord de se faire réformer, puis, à l'automne 1941, il est engagé comme soldat dans une troupe hippomobile à l'arrière avant d'obtenir le — à sa demande — une place à l'école d'artillerie[16]. Fin 1942, il est nommé commandant d'une batterie de repérage par le son. Il combat comme officier de l'Armée rouge[12], et sera décoré en 1944 de l'Étoile rouge pour sa participation à la prise de Rogatchov[17].

Le Goulag

En 1945, il est condamné à huit ans de prison dans les camps de travail pour « activité contre-révolutionnaire », après avoir critiqué dans sa correspondance privée la politique de Staline ainsi que ses compétences militaires. Dans une lettre interceptée par la censure militaire, Soljénitsyne reprochait au « génialissime maréchal, meilleur ami de tous les soldats » (selon les qualificatifs officiels) d'avoir décapité l'Armée rouge lors des « purges », d'avoir fait alliance avec Hitler et refusé d'écouter les voix qui le mettaient en garde contre l'attaque allemande, puis d'avoir mené la guerre sans aucun égard pour ses hommes et pour les souffrances de la Russie. Son destinataire aussi fut arrêté, car à deux ils formaient une « organisation contre-révolutionnaire » et, à ce titre, passibles de l'article 52 du code pénal soviétique : « Nous étions deux qui échangions nos pensées en secret : c'est-à-dire un embryon d'organisation, c'est-à-dire une organisation[18] ! »

Au début 1952, Natalia Rechetovskaïa, qui a été renvoyée de l'université d'État de Moscou en tant qu'épouse d'un « ennemi du peuple » en 1948, doit divorcer pour retrouver un emploi[19]. À sa sortie du camp en février 1953[20], quelques semaines avant la mort de Staline[12], Soljenitsyne – matricule CH-262 (anciennement matricule CH-232)[21] – est envoyé en « exil perpétuel » au Kazakhstan. Il est réhabilité le et s'installe à Riazan, à 200 km au sud de Moscou, où il enseigne les sciences physiques. Il se remarie avec Natalia le , puis divorce à nouveau en 1972 (pour des raisons personnelles cette fois) pour épouser, l'année suivante, Natalia Dmitrievna Svetlova, une mathématicienne.

Auteur en URSS

C'est Une journée d'Ivan Denissovitch publié en 1962 dans la revue soviétique Novy Mir grâce à l'autorisation de Nikita Khrouchtchev en personne, qui lui acquiert une renommée tant dans son pays que dans le monde. Le roman décrit les conditions de vie dans un camp de travail forcé soviétique du début des années 1950 à travers les yeux d'un zek, Ivan Denissovitch Choukhov.

Il est reçu au Kremlin par Khrouchtchev. Cependant, deux ans plus tard, sous Léonid Brejnev, il lui est de plus en plus difficile de publier ses textes en Union soviétique. En 1967, dans une lettre au Congrès des écrivains soviétiques, il exige « la suppression de toute censure – ouverte ou cachée – sur la production artistique ».

Ses romans Le Premier Cercle et Le Pavillon des Cancéreux, ainsi que le premier tome de son épopée historique La Roue rouge, paraissent en Occident et lui valent le prix Nobel de littérature en 1970, récompense qu'il ne pourra recevoir que quatre ans plus tard, après avoir été expulsé d'URSS. Il n'a en effet pas pu se rendre à Stockholm de peur d'être déchu de sa nationalité soviétique et de ne pouvoir rentrer en URSS, le gouvernement suédois ayant refusé de lui transmettre le prix à son ambassade de Moscou. Sa vie devient une conspiration permanente pour voler le droit d’écrire en dépit de la surveillance de plus en plus assidue du KGB. Une partie de ses archives est saisie chez un de ses amis en septembre 1965. En 1969, alors qu'il est persécuté par les autorités et ne sait plus où vivre, il est hébergé par Mstislav Rostropovitch[22]. Il manque d'être assassiné en août 1971, par un « parapluie bulgare ». Une de ses plus proches collaboratrices échappe de justesse à une tentative d'étranglement et à un accident de voiture.

En décembre 1973, la version russe de L'Archipel du Goulag parait à Paris, car le manuscrit avait pu être clandestinement sorti d'URSS et remis à l'imprimerie Beresniak, rue du Faubourg du Temple à Paris, une des rares imprimeries françaises à disposer des caractères typographiques cyrilliques. Il y décrit le système concentrationnaire soviétique du Goulag, qu'il a vécu de l'intérieur, et la nature totalitaire du régime. L'ouvrage avait été écrit entre 1958 et 1967 sur de minuscules feuilles de papier enterrées une à une dans des jardins amis, une copie étant envoyée en Occident, par amis interposés (qui risquaient gros) pour échapper à la censure. Il décida sa publication après qu'une de ses aides, Élisabeth Voronianskaïa, fut retrouvée pendue : elle avait avoué au KGB la cachette où se trouvait un exemplaire de l’œuvre. L'ouvrage est, comme d'autres avant lui, un témoignage, mais contrairement à ceux qui l'ont précédé, il est extrêmement précis, sourcé, et cite de nombreuses lois et décrets soviétiques servant à la mise en œuvre de la politique carcérale, de sorte qu'il est beaucoup plus difficile aux « négationnistes du Goulag » de nier la véracité des faits décrits. Cette publication connaît une grande diffusion et le rend célèbre, ce qui lui vaut d'être déchu de sa citoyenneté soviétique et d'être arrêté. Mais, au lieu d'être condamné et incarcéré, il est expulsé d’Union soviétique en février 1974. En URSS, ses textes continuent cependant d’être diffusés clandestinement, sous forme de samizdats.

Auteur en exil

Grâce à l'aide de l'écrivain allemand Heinrich Böll, il s'installe d'abord à Zurich en Suisse, puis émigre aux États-Unis. Soljénitsyne devient une « figure de proue » des dissidents soviétiques, mais déjà apparaît, à travers ses interviews[23], un clivage avec certains de ses interlocuteurs qui le soupçonnent d'être réactionnaire[24] ; il se montre en effet méfiant vis-à-vis du « matérialisme occidental » et attaché à l'identité russe traditionnelle, où la spiritualité orthodoxe joue un grand rôle.

Après une période agitée faite d'interviews et de discours (comme le discours de Harvard prononcé en 1978) aux États-Unis, Soljenitsyne fut souvent invité à de conférences. Le , il fut invité à donner une conférence sur la situation mondiale au Sénat américain. L'Occident découvre alors un chrétien orthodoxe et slavophile très critique sur la société occidentale de consommation, et que les médias français classent dès lors parmi les conservateurs[12]. Comme Victor Serge ou Victor Kravtchenko avant lui, l'écrivain doit affronter une campagne supplémentaire de diffamation[25].

Il vit avec sa famille à Cavendish, dans le Vermont, pour écrire La Roue rouge, une épopée historique comptant des milliers de pages, qui retrace la plongée de la Russie dans la violence révolutionnaire.

En 1983, il reçoit le prix Templeton.

Le 25 septembre 1993, à l'occasion de l'inauguration du Mémorial de la Vendée aux Lucs-sur-Boulogne, il prononce un discours sur les guerres de Vendée et la Révolution française, comparant ces événements, qu'il qualifie de « génocide », aux soulèvements populaires anti-communistes en Russie. Il pose une réflexion sur l'idéalisme initial des révolutions, sur leur récupération par les plus violents des extrémistes, chaque fois que les conservateurs refusent de céder du terrain, et sur les bains de sang que cela représente pour les peuples.[réf. souhaitée]

Retour en Russie

Soljenitsyne prenant le train à Vladivostok, été 1994.

Dans le cadre de la Glasnost menée par Mikhaïl Gorbatchev, sa citoyenneté soviétique lui est restituée, et L'Archipel du Goulag est publié en URSS à partir de 1989. Après la dislocation de l'Union soviétique, il rentre via la France en Russie le , en arrivant par l'est, à Magadan, jadis grand centre de tri carcéral. Il traverse en un mois son pays en train. Il résidera en Russie jusqu'à sa mort. Jusqu'en 1998, il conserve une activité sociale, il a son émission de télévision, voyage en Russie, rencontre des personnes et d'anciens déportés. La maladie interrompt cette activité.

Soljenitsyne vit ensuite retiré près de Moscou, au milieu de sa famille. Le Fonds Soljenitsyne aide les anciens zeks et leurs familles démunies en leur versant des pensions, en payant des médicaments. Après avoir pensé pouvoir jouer un rôle cathartique dans la Russie post-communiste, Soljenitsyne réalise que la nomenklatura a simplement changé d'idéologie, passant du communisme au nationalisme, mais qu'elle s'est maintenue aux affaires et que les démocrates, s'ils veulent convaincre, ne peuvent agir que sur les plans associatif et culturel, le plan politique étant entièrement verrouillé par Boris Eltsine, puis par Vladimir Poutine, seuls interlocuteurs agréés par l'Occident.[non neutre]

Un colloque international a été consacré à son œuvre en décembre 2003 à Moscou. Le , le président Vladimir Poutine rend hommage à Soljenitsyne en lui décernant le prestigieux Prix d'État[26].

L'ancien dissident Viktor Erofeev estima que « c'était vraiment un paradoxe douloureux de voir comment l'ancien prisonnier pouvait sympathiser avec l'ancien officier du KGB[27] ». Malgré plusieurs rencontres privées avec Poutine et des marques de sympathie réciproque, Soljenitsyne accusa la politique impérialiste du président russe d'épuiser à l'extérieur les forces vives de la nation et reprocha à son nationalisme de détourner les Russes des vrais enjeux de leur avenir. Ces positions sur la politique de la Russie sont expliquées dès 1990 dans son essai Comment réaménager notre Russie[28].

Il meurt à son domicile de Moscou à 89 ans dans la nuit du 3 au d'une insuffisance cardiaque aiguë[12]. Il est enterré au cimetière du monastère de Donskoï. Ses funérailles sont retransmises en direct à la télévision russe.[réf. souhaitée]

Un engagement controversé

Œuvre et vision historique

Symbole de la résistance intellectuelle à l'oppression soviétique, Alexandre Soljenitsyne a été régulièrement attaqué, ses ouvrages et interprétations historiques souvent dénoncés comme « réactionnaires », principalement par la gauche occidentale[réf. nécessaire]. Les opérations de déstabilisation à son encontre n'ont pratiquement jamais cessé des années 1960 jusqu’aux années 1980, et au-delà jusqu'à sa mort[réf. souhaitée]. Un zek (détenu), manipulé par le KGB, l'a accusé d'être un informateur des autorités communistes, et a pour cela écrit une fausse dénonciation[réf. nécessaire]. Le KGB a fait écrire un livre contre lui par sa première femme[réf. souhaitée] et par son ancien éditeur à Londres Alec Flegon[29].

Durant sa carrière littéraire, il aurait été accusé d'être nationaliste, tsariste, ultra-orthodoxe, antisémite ou favorable à Israël, traître, complice objectif de la Gestapo, de la CIA, des francs-maçons, des services secrets français et même du KGB. Dans son autobiographie littéraire, Le grain tombé entre les meules, et dans un article de la Litératournaïa Gazeta, « Les barbouilleurs ne cherchent pas la lumière », Soljenitsyne a répondu à ces accusations en les juxtaposant pour montrer leur incohérence.

Soljenitsyne pense que si Staline n'avait pas décapité l'Armée rouge lors des « Grandes Purges » (1937), s'il n'avait pas fait "aveuglément" confiance à Hitler (pacte germano-soviétique 1939-1941), s'il avait écouté les agents (tels Richard Sorge) qui le mettaient en garde contre l'attaque allemande du 22 juin 1941, l'invasion nazie aurait été moins désastreuse pour le pays. Soljenitsyne reproche aussi à Staline d'avoir envoyé au Goulag tous les soldats soviétiques prisonniers des Allemands (se laisser capturer vivant étant considéré comme une « trahison ») alors que la reconstruction du pays nécessitait la participation de tous.[réf. souhaitée]

Accusations d'antisémitisme

Soljenitsyne a fait régulièrement l'objet d'accusations d'antisémitisme, provenant notamment d'auteurs juifs, en raison de ses travaux historiques sur la révolution bolchevique (où il étudie l'implication des juifs au sommet de l'appareil d'État et de l'appareil répressif) et, plus récemment, en raison de son opposition aux oligarques russes (majoritairement juifs)[réf. nécessaire] et de la publication de son ouvrage historique Deux siècles ensemble sur les relations entre Juifs et Russes de 1795 à 1995. L'écrivain et ancien dissident soviétique Vladimir Voïnovitch a ainsi voulu démontrer le caractère antisémite de ce livre dans une étude polémique[30]. En France, l'historien Jean-Jacques Marie a consacré un article à chaque tome de Deux siècles ensemble, qu'il qualifie de « bible antisémite ». Selon lui, « Soljenitsyne expose, dans Deux siècles ensemble, une conception de l'histoire des Juifs en Russie digne de figurer dans un manuel de falsification historique » en écrivant une histoire des pogroms « telle qu'elle a été vue par la police tsariste[31] ». L'historien britannique Robert Service a défendu le livre de Soljenitsyne, arguant que les rapports de la police avaient intérêt à grossir, non à minimiser les faits et qu'une étude de la place des juifs dans le parti bolchevique n'était en rien antisémite par elle-même[32].

L'historien américain Richard Pipes, père du néoconservateur américain et ultrasioniste Daniel Pipes,[réf. souhaitée] a répondu à celui-ci en le qualifiant d'antisémite et d'ultra-nationaliste. En 1985, Pipes a développé son propos dans sa critique d'Août 14 : « Chaque culture a une forme propre d'antisémitisme (sic). Dans le cas de Soljenitsyne, celui-ci n'est pas racial. Cela n'a rien à voir avec le sang. Il [Soljenitsyne] n'est pas raciste, la question est fondamentalement religieuse et culturelle. Il présente de nombreuses ressemblances avec Dostoïevski, qui était un chrétien fervent, un patriote et un antisémite farouche. Soljenitsyne se place incontestablement dans la vision de la Révolution défendue par l'extrême droite russe, comme une création des Juifs[33] ».


On peut rapprocher ces critiques de la campagne de presse menée en 1947 contre Victor Kravtchenko, un des premiers dissidents : la publication de son livre en France sous le titre J'ai choisi la liberté, La vie publique et privée d'un haut fonctionnaire soviétique donna lieu à une polémique retentissante et à de nombreuses attaques des milieux communistes.[non neutre]

Positions politiques sur l'avenir de la Russie

Ses prises de position pour « une période autoritaire de transition » lui valurent de sévères critiques de la part de dissidents comme Andreï Siniavski et Andreï Sakharov, pour lesquels la Russie ne saurait se régénérer sans démocratie[34]. En fait, Soljenitsyne n'est pas hostile à la démocratie en général, mais il ne croit pas que la Russie puisse passer du jour au lendemain d'un régime totalitaire à un régime de type occidental. À la démocratie représentative à l'occidentale, qu'il perçoit comme génératrice d'une classe politique corrompue, coupée du peuple et soucieuse avant tout de ses propres intérêts, il oppose son souhait, pour la Russie, d'un pouvoir présidentiel fort, et d'une forme de démocratie locale constituée par un tissu d'associations gérant les affaires indépendamment du pouvoir qui, lui, ne devrait s'occuper que des affaires nationales (armée, politique étrangère, etc.).[réf. souhaitée] Il affirme dans son livre sur le réaménagement de la Russie que celle-ci peut emprunter à la Suisse le référendum d'initiative populaire.S’affirmant comme un fervent patriote, notion qu'il oppose au nationalisme du pouvoir, Soljenitsyne a désapprouvé la Première guerre de Tchétchénie (qui visait à empêcher l'indépendance tchétchène et luttait contre des « patriotes »), mais a approuvé la seconde (alors que les indépendantistes étaient devenus « islamistes », et selon lui, « mafieux »). Il a eu un commentaire favorable au président Poutine lors de son arrivée au pouvoir, espérant de lui des changements significatifs.[source insuffisante]

Alexandre Soljenitsyne n'a jamais démenti les accusations de royalisme portées contre lui : pour lui, le bilan du tsarisme est « supérieur à celui du communisme, en termes de satisfaction des besoins et d'élévation morale du peuple russe »[source insuffisante].

Ses convictions religieuses orthodoxes suscitent également de la méfiance dans les milieux républicains.[réf. nécessaire]

Il fut accusé d'être favorable favorable aux dictatures militaires dont celle menée par Augusto Pinochet au Chili : en fait, il déplorait surtout que l'occident s'émeuve beaucoup des crimes de ces dictateurs, et fort peu de ceux du régime soviétique, et il déclara en 1976 que l'on entendait plus parler du Chili que du mur de Berlin et que « si le Chili n'existait pas, il faudrait l'inventer[35] »

Il fut favorable à la dictatures militaire menée par Francisco Franco en Espagne ajoutant après la mort de Franco que les Espagnols vivaient « dans la liberté la plus absolue » de son vivant, soulignant la victoire du « concept de vie chrétienne » durant la guerre d'Espagne[36].

Alexandre Soljenitstyne admirait au moins deux formes de démocratie occidentale : celle des États-Unis, qu'il qualifia de « pays le plus magnanime et le plus généreux de la Terre[37] ». En revanche, il a parfois critiqué la politique menée par le gouvernement américain, par exemple sur la paix négociée au Vietnam, qu'il qualifie d'« armistice stupide, incompréhensible, sans garantie aucune[38] ». Il admirait aussi la démocratie suisse et dans son livre Le Grain tombé entre les meules, il écrit : « Ah si l'Europe pouvait écouter son demi canton d'Appenzell. »

Œuvres traduites en français

La datation des œuvres d'Alexandre Soljenitsyne est difficile à établir avec précision, la plupart d'entre elles ayant connu une gestation très longue et plusieurs versions (y compris parfois une réécriture quasi complète). En ce sens, l'exergue placé au début du Premier Cercle est significatif : « Écrit de 1955 à 1958. Défiguré en 1964. Réécrit en 1968 ».

Romans

Recueils de nouvelles

  • La Maison de Matriona (1963), contient aussi L'Inconnu de Krétchétovka (retraduit sous le titre Incident à la gare de Kotchétovka) et Pour le bien de la cause
  • Zacharie l'escarcelle (1971), contient aussi La Main droite, La Procession de Pâques et Études et Miniatures
  • Ego, suivi de Sur le fil (1995)
  • Nos jeunes (1997)
  • Deux récits de guerre (2000), contient Au hameau de Jeliabouga et Adlig Schwenkitten
  • Le Clocher de Kaliazine - Études et Miniatures (2004), faisant déjà partie du recueil Zacharie l'escarcelle
  • La Confiture d'abricots et autres récits (2012), contient deux récits inédits Sur les brisures et C'est égal

Pièces de théâtre et scénarios

  • La Fille d'amour et l'innocent (en 4 actes et 11 tableaux) (1971)
  • Flamme au vent (1977)
  • Les Tanks connaissent la vérité (scénario écrit en 1959 et publié en français en 1982)
  • Le Festin des vainqueurs (écrite en 1951 et publié en français en 1986)
  • Le Parasite (scénario écrit en 1968 et publié en français en 1986)
  • Les Prisonniers (écrite en 1951 et publié en français en 1986)

Poésie

  • Le Chemin des forçats (2014)

Essais et Mémoires

  • Les Droits de l'écrivain (1969)
  • L'Archipel du Goulag (tomes I et II) (1974)
  • Le Chêne et le veau (1975)
  • Discours américains (1975)
  • Des voix sous les décombres (1975)
  • Lénine à Zurich (1975)
  • L'Archipel du Goulag (tome III) (1976)
  • Le Déclin du courage (1978)
  • Message d'exil (1979), interview accordée à la BBC
  • L'Erreur de l'Occident (1980)
  • Nos pluralistes (1983)
  • Comment réaménager notre Russie ? (1990)
  • Les Invisibles (1992)
  • Le « Problème russe » à la fin du XXe siècle (1994)
  • Le Grain tombé entre les meules (1998), éd. Fayard, 500 pages.
  • La Russie sous l'avalanche (1998)
  • Deux siècles ensemble, 1795-1995, tome 1 : Juifs et Russes avant la révolution (2002)
  • Deux siècles ensemble, 1917-1972, tome 2 : Juifs et Russes pendant la période soviétique (2003)
  • Esquisses d'exil – Le Grain tombé entre les meules, tome 2, 1979-1994, traduit du russe par Françoise Lesourd, (2005)
  • Réflexions sur la révolution de février, (2007)
  • Une minute par jour, (entretiens) (2007)

Récompenses, distinctions, Prix

Hommage

Notes et références

  1. Le patronyme Issaïevitch est une erreur de transcription commise par l'administration de Rostov en 1936. Le patronyme correct était Issaakievitch. Après discussion, Alexandre et sa mère décident de ne pas signaler l'erreur. (Saraskina, p. 139)
  2. Le spécialiste de Soljenitsyne Georges Nivat et son éditeur Claude Durand, ou encore l'éditeur Fayard écrivent son nom avec un accent aigu.
  3. La Russie a maintenu le calendrier julien en usage dans l'Empire russe jusqu'en janvier 1918. À cette date, le gouvernement révolutionnaire adopte le calendrier grégorien. Mais son adoption a été retardée dans les parties périphériques du pays. Voir Passage au calendrier grégorien.
  4. Lioudmila Saraskina, Alexandre Soljénitsyne, p. 85 et p. 975.
  5. Soljenitsyne a mis en scène sa famille dans La Roue rouge (en particulier dans Août 14). Son père sous le nom « Sania Lajenitsyne » et sa mère sous celui de « Xenia Tomtchak » (Saraskina).
  6. Saraskina, p. 76.
  7. Saraskina, p. 115.
  8. Taïssia Zakharovna Chtcherbak meurt le .
  9. Saraskina, p. 118.
  10. Saraskina, p. 140.
  11. Saraskina, p. 149.
  12. a b c d et e « La mort d'Alexandre Soljenitsyne », Libération.fr, 3 août 2008.
  13. Saraskina, p. 150
  14. Saraskina, p. 163, p. 166 et p. 977.
  15. Saraskina, p. 175.
  16. Saraskina, p. 200.
  17. Saraskina, p. 256.
  18. (Alexandre Soljenitsyne, L'Archipel du Goulag, p. 56.)
  19. Georges Nivat, Le Phénomène Soljénitsyne, p. 32.
  20. Georges Nivat, Le Phénomène Soljénitsyne, p. 33.
  21. Alexandre Soljénitsyne. Le courage d'écrire, p. 78.
  22. The Economist, 12 mai 2007, nécrologie de Mstislav Rostropovitch.
  23. L'émission télévisée Apostrophes de Bernard Pivot (visible sur Soljenitsyne chez Bernard Pivot sur ina.fr) où il est invité.
  24. Lors de la première émission de Pivot avec Soljenitsyne, Jean Daniel demanda à Soljénitsyne de le rassurer en confirmant qu'il n'était pas pour le colonialisme. Il fut rassuré au-delà de ce qu'il espérait : les colonisateurs c'est vous ! déclara le maître en bondissant de malice dans son siège : n'essayez-vous pas d'imposer votre mode de vie au monde entier ?, cité par Georges Nivat, Soljenitsyne, Paris, Seuil, collection « Écrivains de toujours », 1980, 189 pp.
  25. Par exemple dans Pierre Daix, Ce que je sais de Soljénitsyne, Éd. du Seuil, Paris 1973, où, sans l'écrire ouvertement,[non neutre] l'auteur considère pratiquement le dissident d'agent de l'impérialisme capitaliste.
  26. Le Figaro, 13 juin 2007.
  27. Alexandre Soljenitsyne, sur Bibliomonde
  28. « Décès d'Alexandre Soljenitsyne, conscience d'un siècle », La Croix, .
  29. Vladimir Volkoff, Petite histoire de la désinformation, Rocher, 1999, p. 122-123.
  30. Vladimir Voïnovitch, A Portrait Against the Background of a Myth, 2002
  31. Jean-Jacques Marie, « L'antisémitisme complaisant de Soljenitsyne », dans les Cahiers du mouvement ouvrier (publication du CERMTRI) n°17, p.146-147. Voir aussi l'article consacré au tome II de Deux siècles ensemble, dans le Cahier n°22, p.81-85
  32. Cf. « Solzhenitsyn breaks last taboo of the revolution », The Guardian, 25 juin 2003.
  33. Richard Pipes, New York Times, 13 novembre 1985.
  34. Soljenitsyne, l’archipel d’une vie, Libération, 5 août 2008.
  35. Les Dossiers de l'écran, Antenne 2, émission du 9 mars 1976. Cité dans Rideau de fer sur le Boul'Mich, Jean Salem, Editions Delga, 2009. Cf. aussi Les intellectuels contre la gauche, Michael Christofferson, Editions Agone, 2009
  36. Le Monde, 23 mars 1976. Cité dans Rideau de fer sur le Boul'mich, Jean Salem, Editions Delga, 2009.
  37. Discours de Washington (30 juin 1975), prononcé à l'invitation de l'AFL-CIO, Discours américains, Paris, Seuil, 1975, p.28
  38. Discours de Washington, loc. cit., p. 31
  39. http://dic.academic.ru/dic.nsf/enc_biography/115112/%D0%A1%D0%BE%D0%BB%D0%B6%D0%B5%D0%BD%D0%B8%D1%86%D1%8B%D0%BD
  40. http://www.asmp.fr/prix_fondations/grand_prix_aca_2000.htm
  41. http://fr.rian.ru/society/20080805/115752913-send.html
  42. http://www.rts.ch/info/monde/1200463-le-pourfendeur-du-goulag-porte-en-terre.html

Voir aussi

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Georges Lukacs (trad. S. Bricianer.), Soljénitsyne, Paris, Gallimard,
  • Georges Nivat, Michel Aucouturier (dir.), Cahier Soljenitsyne, Éditions de l'Herne, Cahiers de l'Herne, no 16, Paris, 1971, 420 p. (ISBN 9782851970114)
  • André Martin, Soljenitsyne le croyant : lettres, discours, témoignages, Paris, Éditions Étapes, 1973
  • Georges Nivat, Soljenitsyne, collection « Écrivains de toujours » aux éditions du Seuil, 1983
  • Georges Nivat, Le Phénomène Soljénitsyne, Fayard, 2009 (ISBN 978-2213636283) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Daniel J. Mahoney (trad. Sébastien Viguier), Alexandre Soljénitsyne. En finir avec l'idéologie, Paris, Fayard, , 330 p. (ISBN 978-2-213-63857-7)
  • Sous la direction de Nikita Struve, Le Phénomène Soljénitsyne, Actes du colloque international des Bernardins du 19 au 21 mars 2009, Éditions François-Xavier de Guibert, 2010
  • Lioudmila Saraskina (trad. Marilyne Fellous), Alexandre Soljénitsyne, Paris, Fayard, , 1063 p. (ISBN 978-2-213-63825-6) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Claude Durand, Agent de Soljenitsyne, Paris, Fayard, , 288 p. (ISBN 978-2-2136-6297-8)
  • Sous la direction de Georges Nivat, Alexandre Soljenitsyne. Le courage d'écrire, Éditions des Syrtes, 2011, 532 p., (ISBN 978-2-84545-164-3)
  • Bertrand Le Meignen, Soljenitsyne : Sept vies en un siècle, Arles, Actes Sud, coll. « Solin », , 886 p. (ISBN 978-2-7427-8785-2)

Filmographie

Articles connexes

Liens externes

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