Alec Smith

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Alec Smith
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Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 56 ans)
LondresVoir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Alexander Douglas SmithVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Université Rhodes
Chaplin High School (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Activité
Père

Alec Smith, de son nom complet Alexander Douglas Smith, (1949-2006) fut un Rhodésien engagé pour une solution pacifique du conflit colonial de la fin des années 1980 en Rhodésie. Du fait qu’il était le propre fils du premier ministre Ian Smith et qu’il était en contact avec toutes les parties en conflit au travers de son engagement au sein de l'ONG Initiatives et Changement, il put jouer un rôle de premier plan dans le dénouement pacifique du conflit et la transition sans violence vers le Zimbabwe indépendant[1].

Biographie[modifier | modifier le code]

Enfance et formation[modifier | modifier le code]

Alec Smith naquit le à Gweru en Rhodésie (le Zimbabwe actuel). Il fut le seul fils biologique de Ian Smith et de son épouse née Janet Watt. (Ian Smith adopta les deux enfants que Janet Watt avait eus d’un premier mariage.) Alec grandit dans la ferme familiale des Smith à Selukwe (aujourd’hui Shurugwi), une petite ville minière et rurale de 8500 habitants (dont 500 blancs).

En , le père d’Alec Smith, Ian Smith, devint premier ministre de Rhodésie dans le cadre d’une indépendance unilatérale conflictuelle avec le Royaume uni destinée à conserver le gouvernement du pays entre les mains de la minorité blanche, poste qu’il devait occuper jusqu’en 1979. Il fut donc un père relativement absent à partir des 14 ans d’Alec qui avait par ailleurs une relation difficile avec sa mère. En 1970, Alec commença des études de droit à l'université de Rhodes en Afrique du Sud. Il se signala pour la première fois à l’attention du public en demandant un passeport britannique, se déclarant à cette occasion loyal sujet de la couronne et s’opposant ainsi publiquement aux positions politiques de son père[2]. En révolte contre son père (mais sans rupture totale), Alec Smith s’adonna largement aux fêtes et aux paradis artificiels. Il fut renvoyé de son université à la fin de sa première année d’études en 1971. L’été suivant, il fut arrêté à son retour du Mozambique en possession de LSD et d’amphétamines, jugé et condamné à une peine de prison avec sursis pour trafic de stupéfiants. De retour en Rhodésie, il fit son service militaire et plusieurs petits boulots.

Conversion et militantisme[modifier | modifier le code]

En 1972, Alec Smith déclara s’être converti au christianisme évangélique, et avoir été à la fois libéré de sa dépendance aux drogues et à l’alcool par Dieu et rendu conscient de l’injustice de la discrimination raciale. À la même époque, il s’intégra à l’équipe locale d’Initiatives et Changement (Réarmement moral selon la terminologie de l’époque) et tint un certain nombre de meetings en faveur de l’égalité des races et de la démocratie ; il devint alors l’ami de plusieurs leaders nationalistes noirs. À partir de 1976, la guerre civile rhodésienne s’intensifia provoquant le rappel des réservistes rhodésiens blancs. Pour y échapper, Alec partit s’établir à Londres où vivait déjà son demi-frère Robert[3]. C’est à Londres qu’il rencontra l’étudiante norvégienne Elisabeth Knudsen, qu’il épousera en 1979 à Oslo. Son père Ian Smith ne put assister au mariage en raison du boycott exercé par la Norvège comme par une partie de la communauté internationale envers le régime rhodésien. Considérablement aigri par ces mesures contre la Rhodésie, Ian Smith décrira l’incident d’Oslo comme "la goutte qui fait déborder le vase". En 1980, la Rhodésie devint le Zimbabwe après un bref gouvernement de transition dirigé par Abel Muzorewa [4], un épisode dans lequel Alec Smith joua un rôle pacificateur (voir ci-après). Alec Smith revint alors s’installer au Zimbabwe. Il fut tenu à l’écart par une partie de la communauté blanche qui le considérait comme un traître et par une partie des noirs qui ne voulaient pas approcher le fils d’Ian Smith. Il occupa néanmoins une série d’emplois au cours des années 1980 parmi lesquels la direction d’une équipe professionnelle de football (the Black Aces). Il devint aussi aumônier de réserve au sein de la nouvelle armée nationale zimbabwéenne. Trois enfants naquirent au sein du foyer d’Alec Smith, qui offrirent un réconfort à leur grand-père Ian Smith, surtout après le décès de son épouse en 1994. Alec devint ensuite le partenaire de son père dans les affaires familiales. Dans ces fonctions, il supervisa la publication des mémoires d'Ian Smith et reprit la direction des fermes familiales.

Décès[modifier | modifier le code]

En , Alec Smith se rendit en Norvège avec sa famille pour Noël. Le , lors d’une escale à Londres au début de leur retour vers le Zimbabwe, Alec Smith fut frappé par un infarctus du myocarde et décéda quasi immédiatement dans le salon d’attente de l'aéroport d'Heathrow[5]. Une crémation fut organisée en Norvège et un service religieux en sa mémoire eut lieu à la cathédrale anglicane de Harare[6]. La famille chargea Inger, la fille ainée d’Alec Smith, de communiquer la nouvelle à Ian Smith. Affaibli par une chute l’année précédente, Ian Smith fut profondément affecté par ce décès et ne s’en remit pas. Il mourut moins deux ans plus tard, âgé de 88 ans.

Un rôle pacificateur[modifier | modifier le code]

De 1975 à 1979, la Rhodésie fut aspirée dans une guerre civile de plus en plus violente entre le gouvernement, entre les mains de la minorité blanche, et les armées des deux mouvements de libération[7]. Le mouvement d’origine chrétienne Initiatives et Changement (Réarmement moral selon la terminologie de l’époque) s’engagea dans la recherche d’une solution pacifique, et, à cette fin, organisa des rencontres entre personnes appartenant à des partis opposés. Alec Smith était étroitement associé à ce mouvement et cherchait comment parvenir à cette solution pacifique[8]. Le parti nationaliste noir ZANU-PF qui recrutait au sein de l'ethnie majoritaire au Zimbabwe allait certainement triompher lors des élections de 1980 mais la minorité blanche n’était pas prête à céder le pouvoir et préparait un coup d’état sous le nom de code d'"opération quartz"[9]. Informée de ces préparatifs, les membres de l’équipe rhodésienne d'Initiatives et Changement cherchaient à désamorcer cette situation qui ne pouvait conduire qu’à une reprise et sans doute à une aggravation de la guerre civile. Pour cela, ils décidèrent d’organiser des rencontres en personne entre le chef du ZANU-PF Robert Mugabe et Ian Smith. L'un des membres d’Initiatives et Changement, le haut fonctionnaire Joram Kuchera, utilisa ses contacts au sein du ZANU-PF pour établir le contact avec Mugabe tandis qu’Alec Smith se faisait l'ambassadeur du mouvement auprès de son père, malgré leurs nombreuses divergences de vues. Une réunion put finalement être organisée après les élections dans l nuit du 3 au dans la maison de Robert Mugabe, accompagné du seul Joram Kuchera. Elle dura plusieurs heures et fut étonnamment amicale. Un compromis fut trouvé, Ian Smith acceptant le verdict des urnes – et décommandant donc l’opération quartz qui était sur le point d’être déclenchée - et Robert Mugabe acceptant la présence de blancs dans le gouvernement et l’administration[10]. Cette contribution marquante à la paix au Zimbabwe fut le point culminant de plusieurs années de prise en contacts avec les partisans des différents partis en présence, une activité très risquée dans un contexte de guerre civile. Alec Smith ne joua par la suite aucun rôle politique, mais resta actif dans la vie associative et dans le développement du sport au Zimbabwe. Il déclina semble-t-il une invitation à se joindre au parti du "Mouvement pour le changement démocratique" à la fin des années 1990.

Héritage[modifier | modifier le code]

En 1984, Alec Smith publia un récit autobiographique sur la fin du régime blanc en Rhodésie intitulé « Tu seras mon frère » (titre original : Now I Call Him Brother)[11]. Sa biographe Rebecca de Saintonge rapporte ces mots d’un proche dans The Independent du  : "[Alec Smith] était un homme au teint très clair et aux yeux d’une couleur [bleu] délavé, qui marchait lentement et parlait lentement. Il était extrêmement calme et énigmatique ; on ne savait jamais très bien d’où il venait et où il allait.[1]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b "Alec Smith, Unlikely Reconciler in Zimbabwe", article de Rebecca de Saintonge, The Independent du 2 février 2006 [1]
  2. The Times, 14 December 1970
  3. The Times, 18 May 1970
  4. NZ History article :Operation Agila, "The British Empire's Last Sunset"
  5. Peta Thornycroft, article du Telegraph du 23 janvier 2006, "Ian Smith's son dies" [2]
  6. 24 Hours: report on death of Alec Smith
  7. Voir Histoire de la Rhodésie du Sud, Wikipédia, l'encyclopédie libre, 27 mars 2015, 07:37 UTC, particulièrement la section "République de Rhodésie (1970–1979)" [Page consultée le 1 juin 2015]
  8. Article "De la crise rhodésienne au Zimbabwé", site d’Initiatives et Changement [3]
  9. Operation Quartz: possible military coup Rhodesia 1980
  10. MRA in Africa :Alec Smith's role in securing transition in 1980
  11. Ouvrage traduit en français : Alec Smith , Tu seras mon frère, traduction de l’anglais par Eliane Stallybrass et Charles Piguet, Éditions de Caux / Nouvelles Édition Africaines, 1986, (ISBN 9782723607865)