Acroléine

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Acroléine
Image illustrative de l’article Acroléine
Image illustrative de l’article Acroléine
Identification
Nom UICPA prop-2-énal
Synonymes

2-propénal
aldéhyde acrylique
acrylaldéhyde

No CAS 107-02-8
No ECHA 100.003.141
No CE 203-453-4
SMILES
InChI
Apparence liquide incolore à jaune, d'odeur âcre[1].
Propriétés chimiques
Formule C3H4O  [Isomères]
H2C=CH-CHO
Masse molaire[3] 56,063 3 ± 0,003 g/mol
C 64,27 %, H 7,19 %, O 28,54 %,
Moment dipolaire 2,552 ± 0,003 D (cis)

3,117 ± 0,004 D (trans)[2]

Propriétés physiques
fusion −88 °C[1]
ébullition 53 °C[1]
Solubilité dans l'eau à 20 °C : 200 g·l-1[1]
Paramètre de solubilité δ 20,1 MPa1/2 (25 °C)[4]
Masse volumique 0,8 g·cm-3[1],
1,94 (vapeur)
d'auto-inflammation 234 °C[1]
Point d’éclair −26 °C (coupelle fermée)[1]
Limites d’explosivité dans l’air 2,831 %vol[1]
Pression de vapeur saturante à 20 °C : 29 kPa[1]
Viscosité dynamique 0,33cP (25 °C)
Point critique 51,6 bar, 232,85 °C [5]
Thermochimie
Cp
Propriétés électroniques
1re énergie d'ionisation 10,103 ± 0,006 eV (gaz)[7]
Précautions
SGH[9]
SGH02 : InflammableSGH05 : CorrosifSGH06 : ToxiqueSGH09 : Danger pour le milieu aquatique
Danger
H225, H301, H311, H314, H330 et H400
SIMDUT[10]
B2 : Liquide inflammableD1A : Matière très toxique ayant des effets immédiats gravesE : Matière corrosive
B2, D1A, E,
NFPA 704
Transport
-
   1092   
Classification du CIRC
Groupe 3 : Inclassable quant à sa cancérogénicité pour l'Homme[8]
Écotoxicologie
LogP 0,9[1]
Seuil de l’odorat bas : 0,02 ppm
haut : 1,8 ppm[11]

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

L'acroléine est une substance chimique de formule brute C3H4O aussi connue sous divers noms comme propènal, prop-2-ènal, prop-2-èn-1-al, acraldéhyde, acrylaldéhyde, aldéhyde acrylique, acquinite, aqualin, aqualine, biocide, crolean, éthylène aldéhyde, magnacide, magnacide H ou slimicide.

Elle se présente sous la forme d'un liquide incolore à légèrement jaunâtre avec une odeur âcre et désagréable. C'est un aldéhyde (H2C=CH-CHO) extrêmement toxique par inhalation et ingestion, elle est le constituant de la papite. Les limites d'exposition atmosphérique de l'acroléine vont de 20 ng/m3[12] à 0,4 µg/m3[13]. L'acroléine est un irritant majeur présent dans la fumée de cigarette ; sa concentration peut varier de 0,006 à 0,120 ppm en atmosphère enfumée.

Elle a pour origine l'incendie de matières plastiques, les fruits pourrissants, la décomposition de graisses. Elle se forme lorsque les acides gras présents dans les viandes se dégradent sous l’action de la chaleur (barbecues). Les acides gras à longues chaînes brisent les liens qui les liaient au glycérol, puis la molécule de glycérol perd deux molécules d’eau pour former l’acroléine. Elle contribue aussi au parfum des caramels préparés par chauffage en décomposition partielle du saccharose.

Propriétés physico-chimiques[modifier | modifier le code]

L'acroléine possède les propriétés dues au groupement aldéhyde et à la présence de la double liaison C=C (addition d'hydracides). Elle fait partie de la famille des aldéhydes alpha-beta insaturés.

C'est un composé instable qui se polymérise facilement à la lumière pour former du disacryl (solide plastique). Elle prend naissance à chaud dans les graisses et les huiles (d'où son nom : âcre-oléine).

L'industrie pharmaceutique et chimique des matières plastiques, utilisant l'alcool allylique (CH2=CH-CH2-OH) pourrait avoir un effet hépatotoxique à la suite de la formation d'acroléine par l'ADH, cela produirait la libération du fer de la ferritine qui induirait un processus de lipoperoxydation (Lauwerijs).

Production et synthèse[modifier | modifier le code]

Le premier procédé de production d'acroléine a été mis au point et commercialisé par Degussa en 1942. Dans ce procédé, l'acroléine était produite par la condensation en phase gazeuse d'acétaldéhyde et de formaldéhyde, réaction catalysée par le silicate de sodium à des températures entre 300 et 320 °C[14]. En 1948, Shell a développé le premier procédé industriel d’oxydation sélective de propène en acroléine en utilisant un catalyseur à base d’oxyde de cuivre supporté[15]. En 1957, la société Standard Oil of Ohio (Sohio) a découvert que des catalyseurs à base de molybdates de bismuth avaient une excellente sélectivité pour cette réaction[16].

CH2CHCH3 + O2 → CH2CHCHO + H2O

Aujourd’hui, l’acroléine est exclusivement produite par cette voie d’oxydation sélective de propène en utilisant des catalyseurs composés d’au moins 4 métaux de transition (molybdène, vanadium, niobium…) présents dans au moins deux oxydes complexes. Les procédés industriels permettent aujourd'hui d’atteindre des rendements en acroléine jusqu’à 91 %. Le procédé opère typiquement à des températures entre 300 et 400 °C et à pression atmosphérique. La charge contient 5 % à 10 % de propène, mélangé avec de l’air et un diluant (de la vapeur d’eau), ce dernier permettant de rester en dessous de la limite d’explosion.

L'acroléine peut également être préparée en passant des vapeurs de glycérol sur un agent déshydratant comme du KHSO4 chauffé de 300 à 340 °C. On l'obtient également par cultures de Bacillus amaracrylus sur du glycérol.

Utilisations[modifier | modifier le code]

L'acroléine, le plus simple des aldéhydes insaturés, est un composé très réactif et constitue un intermédiaire polyvalent pour l’industrie chimique.

L'acroléine est utilisée pour la fabrication de matières plastiques (acide acrylique, acrylates...), de parfums, et dans de nombreuses synthèses organiques.

Elle est également utilisée comme intermédiaire réactionnel pour la préparation de la DL-méthionine, un acide aminé qui n'est pas synthétisé par les mammifères. La méthionine est donc souvent ajoutée comme supplément alimentaire dans la nourriture pour animaux.

Toxicité[modifier | modifier le code]

Ce composé fait partie de la Liste EPA des substances extrêmement dangereuses. C'est un irritant de la peau et des muqueuses (oculaires et nasales).

Il est hautement lacrymogène. Pour cette raison, il a été utilisé comme gaz de combat durant la Première Guerre mondiale.

Il cause une diminution de la capacité respiratoire et de la fonction pulmonaire, avec hyperréactivité bronchique.

Dans le nez et le système respiratoire, si l'exposition perdure, l'irritation peut évoluer en inflammation, avec hémorragie, métaplasie, hyperplasie, œdème.

En médecine, l’acroléine est responsable d’effet indésirable à type de cystite hémorragique par toxicité de la muqueuse vésicale pour les chimiothérapies de la classe des moutardes azotées de la famille des alkylants comme la cyclophosphamide.

En 2013, l'Anses a proposé comme valeurs guides pour la qualité de l'air intérieur (VGAI)[17] :

  • pour une exposition de courte durée (1 heure) : 6,9 µg/m3 d'air
  • pour une exposition longue durée (plus d'un an) : 0,8 µg/m3 d'air

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g h i et j ACROLEINE, Fiches internationales de sécurité chimique
  2. (en) David R. Lide, Handbook of chemistry and physics, CRC, , 89e éd., 2736 p. (ISBN 142006679X et 978-1420066791), p. 9-50
  3. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  4. (en) James E. Mark, Physical Properties of Polymer Handbook, Springer, , 2e éd., 1076 p. (ISBN 0387690026, lire en ligne), p. 294
  5. « Properties of Various Gases »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur flexwareinc.com (consulté le ).
  6. (en) Carl L. Yaws, Handbook of Thermodynamic Diagrams, vol. 1, Huston, Texas, Gulf Pub. Co., (ISBN 0-88415-857-8)
  7. (en) David R. Lide, Handbook of chemistry and physics, CRC, , 89e éd., 2736 p. (ISBN 978-1-4200-6679-1), p. 10-205
  8. IARC Working Group on the Evaluation of Carcinogenic Risks to Humans, « Evaluations Globales de la Cancérogénicité pour l'Homme, Groupe 3 : Inclassables quant à leur cancérogénicité pour l'Homme »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur monographs.iarc.fr, CIRC, (consulté le ).
  9. Numéro index 605-008-00-3 dans le tableau 3.1 de l'annexe VI du règlement CE N° 1272/2008 (16 décembre 2008)
  10. « Acroléine » dans la base de données de produits chimiques Reptox de la CSST (organisme québécois responsable de la sécurité et de la santé au travail), consulté le 23 avril 2009
  11. « Acrolein », sur hazmap.nlm.nih.gov (consulté le ).
  12. (en) « Acrolein; CASRN 107-02-8 », sur epa.gov, (consulté le ).
  13. http://www.hc-sc.gc.ca/ewh-semt/alt_formats/hecs-sesc/pdf/pubs/contaminants/psl2-lsp2/acrolein/acrolein-fra.pdf
  14. H. Schulz, H. Wagner, Synthese und Umwandlungsprodukte des Acroleins, Angewandte Chemie, (1950), Volume 62, Issue 5, 105-118 DOI 10.1002/ange.19500620502
  15. G.W. Hearne, M.L. Adams, Production of unsaturated carbonylic compounds, Shell Development Co., US 2,451,485 (1948)
  16. J.L. Callahan, R.W. Foreman, F. Veatch, Process for the oxidation of olefins, Standard Oil of Ohio, Brevet US 2,941,007 (1957)
  17. Anses Valeur guide de qualité d’air intérieur: l’Anses propose deux valeurs pour l’acroléine ; communiqué du 2013/06/25 consulté 2013-07-04 et Avis de l'Anses correspondant (PDF, 174 pages)