Achille Liénart

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Achille Liénart
Image illustrative de l’article Achille Liénart
Le cardinal Liénart en .
Biographie
Nom de naissance Achille Gustave Louis Joseph Liénart
Naissance
à Lille (France)
Ordination sacerdotale
Décès (à 89 ans)
à Lille
Cardinal de l'Église catholique
Créé
cardinal
par le
pape Pie XI
Titre cardinalice Cardinal-prêtre
de S. Sisto
Évêque de l'Église catholique
Ordination épiscopale par
Charles-Albert-Joseph Lecomte
Prélat de la Mission de France
Évêque de Lille
Autres fonctions
Fonction religieuse

Blason
« Miles Christi Jesu »
(en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org

Achille Liénart, né le à Lille et mort le dans la même ville, communément désigné sous le titre cardinal Liénart, a été évêque de Lille pendant quarante ans. Une telle longévité est assez rare dans l'histoire de l'Église. Son soutien au syndicalisme chrétien lui valut le qualificatif de cardinal rouge qui ne recouvre pas cependant la totalité de son action, qui s'étendait à tous les milieux.

Aumônier du 201e régiment d'infanterie pendant la Grande guerre, curé de la paroisse Saint-Christophe de Tourcoing jusqu'en , il devient à 44 ans le plus jeune évêque de France. Il est créé cardinal moins de deux ans plus tard par Pie XI à un moment où celui-ci souhaite renouveler profondément l'épiscopat français. Le cardinal Liénart accorde, dans la ligne de ce pontificat, une priorité au développement de l'Action catholique, particulièrement de l'Action catholique spécialisée, moyen privilégié de l'évangélisation dans le diocèse de Lille.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, Achille Liénart collabore activement avec le régime de Vichy, soutenant publiquement la politique du maréchal Pétain ainsi que l'institution du STO et s'abstenant de toute condamnation des persécutions à l'encontre des juifs. Il est l'un des plus ardents partisans du concile de Vatican II et l'un des plus importants parmi les évêques libéraux qui souhaitent un assouplissement de la discipline, de la liturgie et de la théologie.

Biographie[modifier | modifier le code]

Éducation et famille[modifier | modifier le code]

Achille Gustave Louis Joseph Liénart est issu d'une famille appartenant à la moyenne bourgeoisie lilloise. Il est le deuxième d'une famille de quatre enfants : Anna, Marie-Thérèse et Maurice. Son père, Achille Philippe Hyacinthe Liénart (décédé en ) est négociant en toile, et sa mère, née Louise Delesalle, élève ses enfants. Il nait rue Princesse à Lille, à deux pas de la maison d'un autre illustre lillois Charles de Gaulle, né six ans plus tard[1]. Leur train de vie n'est pas important et la famille est très unie. Quand il prend ses fonctions d'évêque en , il installe sa mère dans un appartement à l'évêché jusqu'à sa mort en .

En , il entre au collège jésuite Saint-Joseph, situé depuis rue de Solférino à Lille, où il obtient en son baccalauréat de philosophie. Sa vocation apparaît tôt: dès sa sortie du collège, il sait qu'il sera prêtre et entre au séminaire d'Issy-les-Moulineaux, près de Paris. Il effectue son service militaire, qui durait deux ans, en au 43e RI à la citadelle de Lille.

Puis il reprend ses études ecclésiastiques au séminaire Saint-Sulpice à Paris. Comme on le destine à l'enseignement religieux supérieur, il fréquente également l'institut catholique de Paris. Ordonné prêtre le [2] il se spécialise en Écritures saintes à l'institut biblique de Rome dont, en , il est parmi les premiers étudiants. Puis il enseigne au séminaire de Saint-Saulve.

Il est le grand-oncle de l'écrivain Élisabeth Bourgois.

Première Guerre mondiale[modifier | modifier le code]

Au début du conflit, bien qu'ayant été réformé RD2 en , il signe un engagement le et devient l'aumônier volontaire de l'ambulance 3 de la 51e division de réserve qui est envoyée dans les Ardennes pour soutenir les 1er et 10e corps d'armée à Dinant. Il participe, toujours avec la 51e division, à la bataille de la Meuse en et à la bataille de la Marne en .

Le , il est nommé à la division d'infanterie du 3e corps d'armée avant d'être, de à , l'aumônier du 201e RI, qui est un régiment du Nord. Au front, il va au secours des blessés et des mourants. Il sera blessé deux fois : à la cuisse le [3] et à la nuque le [4], pendant la bataille de la Somme. À la fin du conflit, il est démobilisé en .

Il devient enseignant au grand séminaire de Lille et s'intéresse de près aux questions sociales.

Évêque de Lille[modifier | modifier le code]

En , il est nommé curé doyen de l'église Saint-Christophe de Tourcoing, il étonne encore en se déplaçant à bicyclette[1], et le , il devient évêque de Lille à seulement 44 ans, plus jeune évêque de France dans un jeune diocèse créé en . Il va le rester quarante ans. Sa nomination par Pie XI surprend, en raison de ses prises de position favorables aux ouvriers du textile face au patronat lillois[1].

Tout juste nommé, il se pose en médiateur lors de la grande grève d'Halluin, qui dura de à [5]. Il défend l'idée d'un syndicalisme chrétien indépendant[1].

Le cardinal Liénart, nommé en , plus jeune cardinal au monde, est l'un des six cardinaux français à participer au conclave de 1939 qui élit Pie XII.

Il défend la mémoire de Roger Salengro, maire de Lille, ministre du Front populaire, après son suicide, consécutif à une campagne de calomnie d'une violence extrême : « La politique ne justifie pas tout, la calomnie ou même la médisance sont des fautes que Dieu condamne[1]. »

Seconde Guerre mondiale[modifier | modifier le code]

Le , la poche de Lille tombe : Lille est occupée. La région Nord-Pas-de-Calais est sous l'autorité de l'Ober Feld Kommandatur ou OFK 670 et de son gouverneur Felzman. Le , le cardinal Liénart obtient de Felzman des laissez-passer pour lui ainsi que pour ses collaborateurs afin de pouvoir se déplacer librement en zone « occupée » (le Nord-Pas-de-Calais faisant partie de la zone interdite) et de réorganiser le diocèse de Lille. Le , jour de la signature de la convention d'armistice franco-allemande dans la clairière de Rethondes, il est convoqué par Rüdiger, le Regierungspräsident pour le Nord-Pas-de-Calais. Le cardinal s'y présente accompagné de Lotthe[Qui ?]. L'entretien est courtois, le but du cardinal est avant tout de « préserver les conditions pastorales sous l'occupation »[6].

À l'instar de la hiérarchie catholique, le cardinal Liénart prône le loyalisme vis-à-vis du gouvernement de Vichy.

Le cardinal était à Vichy aux côtés du maréchal Pétain, en , lors du renvoi de l'amiral Darlan par les Allemands. Il déclare dans le Journal de Roubaix daté du  : « Pétain est l'homme autour duquel tous doivent se tenir ».

Le cardinal reste silencieux lors des rafles de juifs[7]. Sa position ne se nuance qu'en 1943 à propos du STO[8]. À la suite des événements de la nuit du au lors du massacre d'Ascq, le cardinal Liénart écrit une lettre de protestation au général von Falkenhausen transmise par l'intermédiaire du général-lieutenant Bertram qui le convoque le soir-même à l'OFK. Les services secrets allemands, arrivés sur place, l'autorisent à célébrer lui-même[réf. nécessaire] les funérailles des victimes du massacre le .

Prélat de la mission de France[modifier | modifier le code]

Après la guerre, « l'évêque rouge » puis le « cardinal rouge » défend encore l'idée des prêtres-ouvriers[1].

En , le cardinal Liénart accède aux fonctions de prélat de la mission de France.

Il ajoute à son blason, qui comportait une représentation de Notre-Dame de la Treille (vénérée à Lille depuis le XIIIe siècle), le symbole du pont à trois arches de Pontigny où est situé le siège de la mission de France.

Achille Liénart, fatigué, remet deux fois sa démission. Paul VI l'accepte en . Le cardinal, « un homme tranquille qui a déclenché des tempêtes », se retire à la paroisse Saint-André de Lille, où il meurt à l'âge de 89 ans, le [1].

Vatican II[modifier | modifier le code]

Le cardinal Liénart (à droite) avec Marcel-Marie Dubois pendant le concile Vatican II.

Lors de la première session de travail du IIe concile œcuménique du Vatican, le cardinal Liénart déclenche un coup de théâtre : alors que l'ordre du jour prévoit un passage direct au vote des textes des commissions préparatoires, il prend la parole avec le cardinal Frings pour demander un débat préalable.

Le changement de procédure proposé est immédiatement accepté par Jean XXIII. À une immense majorité, les évêques décident alors par un vote de ne pas procéder ainsi que l'ont prévu les commissions préparatoires, mais de d'abord délibérer entre eux, par groupes nationaux et régionaux, ainsi que dans des réunions plus informelles.

Armes[modifier | modifier le code]

Blason du cardinal Liénart

Les armes du cardinal Liénart se blasonnent comme il suit :

Écartelé: au premier d'azur à la Vierge de la Treille d'argent, au deuxième et troisième de gueules au pont d'argent à trois arches qui est de Pontigny, au quatrième d'azur au livre des Saints Évangiles d'argent chargé de l'alpha et l'oméga de sable. À la croix de sable chargée en cœur du Sacré Cœur d'or, rayonnant, blessé et enflammé de même, brochant sur les partitions. Accompagné de la devise MILES CHRISTI JESU[9].

Hommages[modifier | modifier le code]

Distinctions[modifier | modifier le code]

Art[modifier | modifier le code]

Lieux[modifier | modifier le code]

Parcours ecclésiastique[modifier | modifier le code]

Publications[modifier | modifier le code]

  • A. Liénart, L'âme d'un régiment : l'Abbé Thibaut : aumônier du ler R.I., Cambrai, Oscar Masson, , 109 p. (présentation en ligne)
  • Abbé Achille Liénart (préf. Catherine Masson), Journal de guerre 1914-1918, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, (ISBN 978-2-7574-0073-9)

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f et g Christophe Henning, « Achille Liénart, le cardinal des ouvriers », dans Cent ans de vie dans la région, Tome 2 : 1914-1939, La Voix du Nord éditions, Hors série du 17 février 1999, p. 82-83
  2. La Voix du Nord, octobre 2009
  3. Liénart, p. 43
  4. « Le 23, nous souffrons également : le poste de secours du 5e bataillon reçoit un obus de 150 qui tue le médecin aide-major Roshem, blessant l'abbé Liénart et le médecin auxiliaire Férot, qui malgré tout restent à leur poste », Le 201e d'infanterie en campagne, Paris, (lire en ligne), p. 48 et Liénart, p. 47.
  5. Collectif, Le Nord, de la Préhistoire à nos jours, Bordessoules, (ISBN 2-903504-28-8), p. 309
  6. Catherine Masson, Le cardinal Liénart, évêque de Lille 1928-1968
  7. Le Cardinal Liénart Article de Catherine Masson sur le site du diocèse de Lille
  8. Collectif, Le Nord, de la Préhistoire à nos jours, Bordessoules, (ISBN 2-903504-28-8), p. 328
  9. Archives du Diocèse de Lille
  10. « Recherche - Base de données Léonore », sur www.leonore.archives-nationales.culture.gouv.fr (consulté le )
  11. « Portail sud dédié à saint Eubert », sur Cathédrale de Lille

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]