Mythomanie

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La mythomanie désigne un trouble pathologique caractérisé par une tendance au mensonge et la fabulation[1].

Mythomanie
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Mary Baker-Willcocks célèbre mythomane anglaise connue sous le nom de « Princesse Caraboo de Javasu », tableau d'Edward Bird

Traitement
Spécialité Psychiatrie et psychologieVoir et modifier les données sur Wikidata
Classification et ressources externes
CIM-10 F60.8

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Étymologie[modifier | modifier le code]

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Le terme « mythomanie » est formé de mytho- et -mane, avec comme préfixe le mot grec ancien μῦθος (« fable, récit, légende, conte ») et comme suffixe le mot grec μανία (« manie »). le verbe « mythonner » unique basé sur ce préfixe signifie « mentir »[2].

Histoire[modifier | modifier le code]

Ce comportement a été décrit pour la première fois par le psychiatre Anton Delbrück (de) en 1891[3]. Le terme a été réutilisé en 1905 par l'aliéniste Ernest Dupré pour entre autres décrire un des traits de l'hystérie. Il désignait ainsi une « tendance constitutionnelle présentée par certains sujets à altérer la vérité, à mentir, à imaginer des histoires (fabulations) enfin à imiter des états organiques anormaux » qu'il voyait comme des simulations, d'où le lien à l'hystérie.

La mythomanie peut être décelée chez l'enfant, Dupré l'ayant décrite de manière détaillée, censée évoluer plus ou moins naturellement vers une meilleure appréhension de la réalité, alors que la mythomanie de l'adulte peut s'associer à l'hystérie, à d'autres névroses, aux perversions ou même aux psychoses. En psychiatrie, et à part pour Dupré, la mythomanie est rarement considérée comme un symptôme isolé, ce qui fait que le concept est la plupart du temps traité en association avec les autres troubles auxquels elle est associée.

Le terme n'est plus beaucoup utilisé en psychiatrie. Il n'existe pas dans les dernières classifications. Les recherches actuelles sur les syndromes de conversion montrent que cette pathologie fonctionnelle cérébrale est différente d'une simple simulation[4][source insuffisante].

Prévalence[modifier | modifier le code]

Une étude démontre qu'un délinquant juvénile sur 1 000 serait mythomane. L'âge d'apparition moyen est de 16 ans et ce trouble comportemental serait aussi bien répandu chez les hommes que chez les femmes[5]. 40 % des cas rapportés proviendraient d'une anomalie du système nerveux[5] (par exemple une épilepsie, un traumatisme crânien ou une infection du système nerveux[5]).

Description[modifier | modifier le code]

Le mensonge désigne l'acte de donner intentionnellement une fausse information[6]. Certains individus le font même sans exprimer aucune crainte[7]. Le mensonge pathologique peut avoir des effets néfastes (faux jugements notamment) dans la vie de l'individu et de son entourage[8]. Le mensonge excessif est communément perçu chez les patients atteints de troubles mentaux. Les individus souffrant de trouble de la personnalité antisociale utilisent le mensonge dans le but de tirer profit de leur entourage. Certains individus souffrant de trouble de la personnalité borderline mentent pour attirer l'attention sur eux en clamant qu'ils sont délaissés ou maltraités[9]. Le mensonge pathologique peut survenir parfois lorsqu'un individu ment sans pour autant tirer profit de ce mensonge[10].

Il existe de nombreuses conséquences chez les patients qui mentent d'une manière abusive. Étant donné la perte de confiance qu'entraînent les mensonges compulsifs, l'entourage du patient peut se défier de la personne, voire s'en détourner. Si le comportement maladif persiste, les conséquences du mensonge peuvent s'avérer catastrophiques voire criminelles[3]. Certaines études suggèrent que certains individus auraient une « prédisposition à mentir »[11].

Classifications psychiatriques[modifier | modifier le code]

Les classifications actuelles ne considèrent pas toutes la mythomanie comme une pathologie. La Classification Internationale des Maladies (CIM-10) la classe dans les autres troubles de la personnalité qui sont des caractéristiques propres à chaque individu qu'il garde tout au long de sa vie[12]. Sa définition n'en est pas donnée dans la classification du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-IV).

Diagnostic différentiel[modifier | modifier le code]

La mythomanie est une attitude considérée comme volontaire (ou consciente) mais elle peut se confondre avec d'autres attitudes non volontaires (ou inconsciente) du patient et d'ordre psychiatrique, voire des troubles neurologiques :

Prise en charge[modifier | modifier le code]

La psychothérapie semblerait être la seule méthode efficace pour remédier au mensonge pathologique. Aucune recherche n'a été menée concernant un éventuel traitement pharmaceutique[3]. Actuellement, il n'existe aucune étude sérieuse concernant un traitement efficace contre la mythomanie[3].

Personnalités[modifier | modifier le code]

Certaines personnalités notables ont été qualifiées de mythomanes :

Münchhausen sur son boulet de canon, gravure d'August von Wille (1872).
  • Karl Friedrich Hieronymus, baron de Münchhausen (1720 - 1797), Surnommé le « baron de Crac » (« baron du mensonge ») en raison de sa réputation d'affabulateur hors pair. Son nom est d'ailleurs à l'origine d'une maladie psychiatrique grave : le syndrome de Münchhausen qui décrit des personnes simulant tous les symptômes d'une maladie afin d'attirer sur elles l'attention des médecins, voire de leurs proches.
  • Mary Baker (née Willcocks), dite « Princesse Caraboo » (1791-1864), mystificatrice anglaise qui s'est permise de tromper les membres de la haute société d'une petite ville britannique durant quelques mois (en se prétendant être une princesse royale venue d'un pays lointain) avant d'être démasquée par une de ses anciennes employeuses comme étant une femme de ménage de la région[13].
  • Sir Edmund Backhouse (en) (1873-1944)., baronet, dit « L'Ami des plus grands ».
  • Blaise Cendrars, dénommé le « mythobiographe » dans un article du journal Le Monde allie dans ses récits autobiographiques, des faits réels et inventés[14].
  • André Malraux (1901-1976), écrivain et homme politique[15].
  • Misha Defonseca, de son vrai nom Monique De Wael (née en 1937) déclarait à qui voulait l'entendre être une rescapée juive de la Shoah, ayant traversé l’Europe à pied et parcouru 3 000 km, à la recherche de ses parents, protégée par des loups alors qu'elle était une petite fille. Elle a réussi à abuser l'écrivain Elie Wiesel. Monique De Wael était en fait une jeune femme catholique et fille d'un employé communal d'une commune belge qui a dénoncé des résistants durant la seconde guerre mondiale.
  • Stéphane Bourgoin (né en 1953), écrivain de faits divers, spécialiste auto-proclamé des tueurs en série.
  • Jean-Claude Romand (né en 1954), un homme pris dans l'engrenage du mensonge, qui a abattu sa famille en 1993. Son histoire est racontée par Emmanuel Carrère dans L'Adversaire (2000), reprise par un film de Nicole Garcia avec Daniel Auteuil dans le rôle principal.
  • Philippe Berre (1954 - 2021) est un escroc, principalement connu pour s'être fait passer pendant près d'un mois pour un ingénieur chargé de coordonner des travaux de l'A28, à Saint-Marceau dans la Sarthe. Cette usurpation a librement inspiré le film À l'origine de Xavier Giannoli avec François Cluzet.
  • Janet Cooke reçoit le prix Pulitzer pour un reportage bidonné relatant les aventures d'un jeune toxicomane de huit ans, prénommé Jimmy, pour le Washington Post. Elle se déclare elle-même diplômée maniant avec aisance l'espagnol et le français. Une enquête interne finit par mettre à jour son ignorance totale de ses deux langues, l'inexistence de ses diplômes et finalement l'invention du sujet du reportage[16].
  • Xavier Dupont de Ligonnès (né en 1961) est quelquefois qualifié par la presse comme « mythomane » du fait de certaines déclarations à des témoins et quelques un de ses mails envoyés à ses proches (même si certains le contestent)[17],[18],[19].
  • Frédéric Bourdin, né en 1974), surnommé « Le caméléon » qui a usurpé l'identité d'enfants disparus. Il réussit même quelque temps à passer pour un mineur alors qu'il était âgé de 30 ans. Son histoire est à l'origine du docufiction The Imposter, sorti en 2012.
  • Brian Blackwell (né en 1986) est un meurtrier anglais qui a tué ses parents afin de profiter de leur argent et d'éblouir sa petite amie, une jeune étudiante du Liverpool College en s'attribuant un rôle de grande personnalité du sport roulant sur l'or[20].

Dans la culture populaire[modifier | modifier le code]

En langage populaire, le terme « mytho » (un apocope du mot mythomane) définit une personne qui a tendance à l'exagération, voire à propager de fausses informations. Le terme est devenu très courant dans la seconde moitié du XXe siècle[21].

Dans la littérature[modifier | modifier le code]

Couverture des Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon (1899)

La mythomanie est un thème utilisé dans la littérature :

Dans la chanson[modifier | modifier le code]

Au cinéma et à la télévision[modifier | modifier le code]

La mythomanie est abordée au cinéma avec notamment :

La mythomanie est abordée à la télévision avec, notamment :

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Éditions Larousse, « Définitions : mythomane - Dictionnaire de français Larousse », sur www.larousse.fr (consulté le )
  2. [https://dictionnaire.lerobert.com/definition/mythonner Site lerobert.com, définition de mythonner.
  3. a b c et d (en) CC Dike, « Pathological Lying: Symptom or Disease? », Psychiatric Times, vol. 25, no 7,‎ (lire en ligne)
  4. Patrik Vuilleumier « Mécanismes cérébraux des troubles moteurs psychogènes : hystérie et hypnose » Genève, Congrès français de psychiatrie, novembre 2012
  5. a b et c (en) King BH, Ford CV, « Pseudologia fantastica », Acta Psychiatrica Scandinavica, vol. 77, no 1,‎ , p. 1–6 (PMID 3279719, DOI 10.1111/j.1600-0447.1988.tb05068.x)
  6. (en) Lying. (n.d.). Dictionary.com Unabridged. Consulté le 26 septembre 2011, depuis Dictionary.com.
  7. (en) Rowe, D. (2010) Why we lie: The Source of Our Disasters, New York: HarperCollins.
  8. (en) Dike CC, Baranoski M et Griffith EE, « Pathological lying revisited », The Journal of the American Academy of Psychiatry and the Law, vol. 33, no 3,‎ , p. 342–9 (PMID 16186198, lire en ligne)
  9. (en) Birch S, Kelln B. & Aquino E., « A review and case report of pseudologia fantastica », The Journal of Forensic Psychiatry & Psychology, vol. 17, no 2,‎ , p. 299–320 (lire en ligne [PDF])
  10. (en) Healy, M., & Healy, W. (2004) Pathological lying, Accusation And Swindling, Winnetka, Illinois : Kessinger Publishing.
  11. (en) Yang Y, Raine A, Narr K, Lencz T, LaCasse L, Colleti P. et Toga A., « Localisation of increased prefrontal white matter in pathological liars », British Journal of Psychiatry, no 190,‎ , p. 174–175 (PMID 17267937, lire en ligne [PDF])
  12. « F60.8 Autres troubles spécifiques de la personnalité » (consulté le )
  13. Oxford Dictionary of National Biographie de Mary Baker (née Willcocks), alias Princess Caraboo].
  14. Site lemonde.fr, article de Jean-Louis Jeannelle "Blaise Cendrars, « mythobiographe ».
  15. Site radiofrance.fr, article "André Malraux (1901-1976)".
  16. Site liberation.fr, article de Guillaume Pajot "Le Washington Post le nez dans le bidon".
  17. Site europe1.fr article "Xavier Dupont de Ligonnès, un "mythomane".
  18. Site parismatch.com, article de Sophie Noachovitch, Arnaud Bizot "Xavier Dupont de Ligonnès : sur la piste du mystérieux « Jean »".
  19. Site ouest-france.fr, article de Vanessa Ripoche "Dupont de Ligonnès en vie dans un nouveau roman".
  20. L'affaire Brian Blackwell le 1er avril 2015 dans L'Heure du crime de Jacques Pradel, sur RTL.
  21. Site lalanguefrancaise.com, fiche sur le mot Mytho.
  22. Site grasset.fr, présentation du roman La Menteuse.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Odile Dot Du petit mensonge à la mythomanie édition Marabout service, 340 pages (ISBN 978-2501006316)

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]